Parole de Nordique
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Yayi Boni : Bonjour mon cousin Bio et suiveur en toute chose
Bio Tchané : Bonjour Yayi Boni ! Suiveur moi, mais pourquoi ?
–– Eh bien, cousin du Nord, tu es bien suiveur en tant qu’économiste, Fonctionnaire international, suiveur en tant que président de la Boad, et maintenant suiveur en tant que candidat à la Présidence de la République.
–– N’allons pas vite en besogne pour ce qui est de la Présidence du Bénin, le peuple est souverain, c’est lui seul qui décide...
–– Peut-être, le peuple décide, mais soyons un peu raisonnables pourquoi ne pas en décider nous-mêmes d’abord ?
–– Comment ça, décider nous-mêmes d’abord ?
–– Tu es du Nord, je suis du Nord ; je suis ton cousin, ai-je dit, c’est-à-dire ton devancier sur le chemin que j’ai tracé et que tu convoites tant. Pourquoi te présentes-tu contre moi, alors qu’on peut bien faire cause commune, et chacun à son tour chez le coiffeur ? Pourquoi m’affrontes-tu alors qu’entre nordiques, je te passerai le témoin le moment venu ?
–– Je ne me présente pas contre toi ; je me présente parce que je suis citoyen béninois, et la constitution m’en donne le droit...
–– Que veux-tu faire que je n’aie fait ou que je ne ferai ?
–– Ce sera au peuple d’en décider, Boni. Sous Mathieu Kérékou, le Bénin était plus paisible...
–– Paisible, il n’y a pas à dire, mais paisible et corrompu, oui !
–– Ah ! La corruption, parlons-en, cher cousin. En la matière, ce n’est hélas pas une vue de l’esprit de dire que tu as fait aussi bien sinon pire en trois ans que Kérékou en 10 ans ! Même si je dois reconnaître que l’économiste qui est en toi a honoré sa discipline en redressant les comptes nationaux.
–– Merci de reconnaître la vérité !
–– Certes, mais c'est pour tout aussitôt les replonger dans l'abime
–– Ah bon, quoi donc !
–– Eh bien, malheureusement, très fier de toi, et je dirai même un peu présomptueux, tu n’as pas attendu que la récolte murisse avant de le piller sur pied. Tu as préféré prendre d’une main ce que tu as apporté de l’autre. Tu as appliqué avec excès le proverbe qui dit « on est jamais mieux servi que par soi-même » ou bien « la charité bien ordonnée commence par soi-même. » Ton populisme t’entraîne dans des dépenses inconsidérées qui confinent au gaspillage pour le moins irresponsable pour un Docteur en économie. Ainsi pour ne citer que ce seul exemple, tu te glorifies de ce que sous ton gouvernement, le budget prévisionnel de l’année en cours a pu s’élever au chiffre record de 1000 Milliards de francs CFA ; mais il est à craindre qu’en réalité les recettes de l’état pour la même année ne dépassent guère 600 Milliards ! Avec la crise qui pousse les bailleurs de fonds à plus de retenue, où comptes-tu trouver les 400 Milliards de déficit ? Tout cela est inquiétant.
–– De quoi parles-tu au juste ?
–– Tu ne me suis donc pas, mon cher cousin Docteur. Je parle de ta propension pour le moins irrépressible au gaspillage. Des risques de déflagration budgétaires ne sont pas à écarter, compte tenu des dépenses fantaisistes que tu occasionnes de-ci de-là pour ton confort politique personnel, ta folie des grandeurs, ton goût des dépenses somptuaires, que rien ne justifie en dehors de l’obsession d’être réélu président, événement que tu tiens pour un défi personnel. Tout cela doit être corrigé, pour que les Béninois comprennent qu’un vrai changement est possible. Et ce changement là sera le vrai changement que je veux promouvoir, dans le respect des comptes publics et dans la rigueur budgétaire, dans l'établissement d'une nette différence morale entre le passé et le présent : la Différence éthique voilà le maître mot d'un vrai changement !
–– La Différence, je l'assume, je la porte, et je veux l'apporter. Il y a sans doute des choses à critiquer dans ce que j’ai fait, je ne le nie pas. Quand on agit on s’expose à se tromper ; et ne dit-on pas que la critique est aisée, mais l’art difficile ?
–– Certes, mais l’entêtement dans l’erreur tient plus du suicide que de l’art ; à moins que ce ne soit l’art de se suicider. Et de plus, utiliser toute une législature comme auto-école de la politique est un luxe que le Bénin ne peut plus s’offrir. Le peuple croyait qu’un novice serait moins attiré par la politique et agirait avec discernement dans le domaine de l’économie, mais il s’aperçoit que l’expérience politique ne s’apprend pas au sommet, mais à la base et sur un temps plus long que le cycle d’une législature, or tel n’est pas ton cas, mon cher cousin !
–– J’ai fait des erreurs, il fallait passer par là pour m’imposer
––T’imposer, comment ça t’imposer ?
––Pour avoir l’entière mainmise sur la machine du pouvoir et réduire mes ennemis pour apporter le Changement au Bénin
–– A mon avis, telle n’est pas la mission dont t'a investi à 75% le peuple en 2006. Tu as promis le changement, pas d’exercer un pouvoir solitaire, ni rompre avec l’esprit du Renouveau !
–– Oui, mais le changement suppose de restaurer l’autorité de l’état et mettre au travail les Béninois, ces paresseux de nature...
–– L’enfer est pavé de bonnes intentions, dit-on. Avec toi, ce dicton n’a jamais été aussi vrai. Regarde un peu ta politique, tes choix et décisions, entre précipitation et navigation à vue, tout le monde s’y perd, et rien de concret n’émerge de tout ça, en dehors des actions ostentatoires et de l’agitation médiatique, sur fond de louanges et de culte de la personnalité, pratiques, mœurs et méthodes désuètes, qu’on croyait définitivement révolues. A ce train, on est vite passé de la soi-disant restauration de l’autorité de l’état à la restauration de l’autoritarisme d’antan, pour ne pas dire à l’autocratie pure et dure...
–– Voilà que tu embouches la même rengaine que mes ennemis politiques traditionnels de la vieille classe, ces hommes du sud qui veulent la peau du Président du Nord que je suis ! Toi qui, au moment où tu étais encore au FMI Afrique, disais qu’il n’y avait pas meilleur soutien de ma personne et de ma politique que toi ! Que de chemin parcouru ! Quelle trahison !
–– Je n’invente rien, mon cher cousin. Oui, je suis du Nord, mais regarde comment sous ton règne, le Renouveau démocratique subit une torsion pour le moins regrettable.
–– Comment ça, torsion regrettable ?
–– Regarde comment tu as tordu le cou aux principes fondateurs du Renouveau : la liberté d’expression, les libertés individuelles, la gouvernance concertée, le pluralisme politique, le statut de l’opposition, la tolérance politique, tout cela sous ton règne n’est qu’un vain mot. Tu as tordu le cou à nos institutions en les instrumentalisant les uns après les autres, sans états d’âme et sans demander ton reste : de la cour constitutionnelle devenue le bastion de tes fantasmes les plus primaires, jusqu’au Conseil Economique et Social en passant par le Cour Suprême que tu as utilisée à fond dans ta guérilla de récupération des mairies perdues lors des dernières élections municipales. Et que penser de cette nouvelle forme d’incivilité politique et légale introduite sous ta houlette consistant à refuser de laisser installer les conseillers élus du peuple au motif qu’ils font l’objet d’un appel auprès de la Cour suprême alors qu’en tant que premier magistrat du pays, tu n’es pas sans savoir que de tels appels n’ont pas de caractère suspensif. Il y a aussi bien d’autres actes d’incivilité que l’époque doit à ton règne étrange et qu’il sied de voir bannir à jamais de nos meurs comme la prise en otage de conseillers, et les coups de force dans les élections de maires qui empruntent aux méthodes des westerns plutôt qu’à celles d’une démocratie apaisée que nous appelons de tous nos vœux au Bénin. Regarde enfin la crise politique qui dure depuis des mois et des mois à l’Assemblée !
–– l’Assemblée nationale, parlons-en ! Suis-je responsable du blocage du Parlement ?
–– Ah ! Quelle question ! La réponse va de soi. Si ton serviteur zélé Nago, ne s’était pas mépris sur le sens de ses responsabilités ; si au lieu de transformer le parlement en une simple chambre d’enregistrement du Gouvernement, s’ il avait eu à cœur de le diriger dans la concorde, l’esprit de tolérance, de respect des textes, on ne serait pas arrivé à ce blocage qui dure depuis près de deux ans maintenant... A mon avis, le blocage est la conséquence de l’accaparement du pouvoir par un seul parti. L’Etat FCBE
–– Mais les Députés choisissent librement leur camp !
–– A condition de leur en laisser la conscience libre. Or sous ton règne l’achat de conscience, sans vergogne ni scrupule a battu tous les records de nombre et de montant. Le marché de la transhumance a été organisé, systématisé et banalisé. Avec l’argent public que tu gaspilles pour ta seule sécurité politique, tu t’en donnes à cœur joie d’acheter qui tu veux, quand tu veux. Ces achats n’ont en rien aucun effet d’entraînement, hormis le cas de députés qui pourront aller grossir ton hypothétique majorité. Leur plus grande fonction est de faire croire à un raz-de-marée objectif de ton côté afin certainement de couvrir et de justifier les fraudes qui se préparent. Si tel plus tel plus tel plus tel autre sont de ton côté, comment peut-on penser un seul instant que le peuple ne sera pas de ton côté ? Le syllogisme est clair comme l’eau de roche ; mais cette eau a beau être claire, sa pureté est sujette à caution, et ceux qui aiment leur pays comme moi, n’en boiront pas, dussent-ils mourir de soif ! Le résultat de tout ça, c’est qu’on en arrive à la perversion de l’idée de Représentant du Peuple. Le peuple élit ses représentants, et l’autocrate les manipule à sa guise comme des pions sur un échiquier, pour ne pas dire des marchandises vivantes dont il peut disposer à sa guise et composer comme bon lui semble la salade de sa majorité. Et que dire de cette cohorte de clients ? La manipulation sans vergogne des dignitaires religieux et tribaux, des marcheurs stipendiés qui marchent dans tous les sens et par tous les temps et tout le temps à la gloire du changement et de son chef ? Avec cette culture de l’achat de conscience, l’argent a tout perverti y compris les esprits et les mœurs ; du coup, plus aucune action ne conserve le moindre cachet de spontanéité.
–– Tu parles de spontanéité, c’est oublier que nous sommes en Afrique et qu’avec l’argent, on peut se concilier bien des esprits
–– Nous sommes peut-être en Afrique, mais nous sommes en Démocratie, et le moins qu’on puisse dire est que le culte de l’argent placé sous le signe obscur du cauris s’insinue partout, même au niveau de la culture et de l’esprit.
–– Comment ça au niveau de la culture et de l’Esprit ? Tu veux dire que le Changement dénature la culture du Bénin ? Qu’ai-je fait de mal à la culture du Bénin, moi qui ai institué le milliard culturel, et encouragé les artistes ?
–– Regarde ta mainmise sur les médias, et tu auras la réponse. Les journaux sont des lieux d’animation de la vie culturelle d’un pays, des organes qui irriguent le sang de la communication dans toutes les artères du corps social. Or sous ton règne ces journaux n’ont qu’une alternative : ou bien ils sont sous contrat du gouvernement et surtout de son chef, ou bien, ils sont frappés d’excommunication politique et économique. Dans le plus pur style des dictateurs d’un autre temps, tu es même allé jusqu’à t’offrir un prisonnier de conscience ! Triste symbole !
–– Ceux qui vont en prison pour avoir enfreint les lois sur la presse le font à leur risque et péril : on ne peut pas vouloir la Démocratie et se plaindre de l’application pour tous de ses lois.
–– Certes, mais je te fais remarquer que sous Kérékou – régime par rapport auquel ton changement prend sens – les gens n’allaient pas en prison pour délit d’opinion ou offense au Chef de l’état. C’est ça le changement que tu veux pour le Bénin ?
–– Entre économistes, je crois qu’il faut éviter les caricatures ; tu ne peux contester qu’il y a eu changement en trois ans...
–– On trouve toujours le changement où l’on veut. Le tien, hélas, s’est trop spécialisé dans le clinquant et le tape à l’œil au détriment des changements intérieurs, en profondeur, vrais et durables.
–– Et les ponts supérieurs ne sont pas durables ?
–– Les ponts et échangeurs sont peut-être durables, à condition qu’on les entretienne ce qui n’est pas garanti, mais passons. Quoi qu’il en soit, ce genre d’ouvrages destinés à impressionner les foules à bon compte n'est pas de ceux qui touchent de près la vie des gens, du moins il ne constitue pas la priorité d'un changement sain et digne de ce nom.
–– Ah, dans ce cas, peux-tu me citer une de ces choses prioritaires qui auraient échappé à mon attention?
–– Eh bien prenons le simple cas de Cotonou, notre capitale et la ville phare du Bénin
–– Oui, et alors ?
–– Eh bien deux choses dont les changements auraient convaincu tous les Béninois, parce qu’elles touchent de près leur vie de tous les jours sont : le problème récurrent de l’inondation qui pourrit la vie des gens, et la qualité du CNHU de Cotonou. Or comme le prouve la permanence des inondations et la mauvaise qualité de notre hôpital considéré comme un véritable mouroir, ces deux choses sont demeurées inchangées et ne semblent pas intéresser ta fureur de changement que tu préfères déployer sur d’autres choses plus spectaculaires et plus tape à l’œil, destinées à fasciner le peuple, pendant que dans sa chair, comme dans sa vie il souffre et ne sait pas comment sortir de sa misère...
–– Ta critique est biaisée et impartiale. En tant qu’économiste, tu n’es pas sans savoir que les routes et ponts sont un vecteur de développement économique et d’émergence. Pour moi, les ponts, les routes et l’échangeur de Godomey sont des changements positifs qui auront tôt ou tard un impact positif dans la vie des gens...
–– Bien sûr, je n’en disconviens pas ; les ponts et autres échangeurs, parlons-en : ce sont de bonnes réalisations, même si mon argumentation était axée sur l’idée de priorité. Quoi qu’il en soit, je te félicite de les avoir menés à leur terme final. Mais bon Dieu ! Quelle malhonnêteté de s’en être attribué l’exclusive paternité alors que tu sais que ces choses-là avaient vu le jour en tant que projet sous le régime de Kérékou, et qu’en ma qualité de ministre de l’Economie, j’ai eu moi-même à les piloter ! Avoue que sur ces dossiers, le travail t’a été mâché et remâché... Finalement, cette manière de s’approprier l’œuvre d’un Etat dans sa continuité est regrettable...
–– La continuité de l’état, chacun en a la conception qu'il veut
–– Il se trouve malheureusement que ta conception ne va pas dans le sens de la rationalité légale...
–– C’est-à-dire ?
–– Eh bien, les actes que tu as posés depuis 2006 montrent que pour toi l’état est la chose d’un seul homme. Une conception napoléonienne de l’état sans passé ni avenir autre que ceux d’un seul homme. Or la continuité de l’état est l’un des principes de la bonne gouvernance et du fairplay en politique
–– Tu parles de fairplay Bio Tchané, mon cousin, justement, je te prends aux mots. Je pense que le moment du fairplay est venu, et je vais te parler entre quatre yeux. Tu as décidé de faire le jeu de certains hommes qui préfèrent diviser le Nord sous prétexte que certains seraient plus nordiques que d’autres. Je veux parler de gens comme Wallis Zoumarou et d’autres, qui mènent un combat d’arrière garde passablement intégriste ; tous ces gens du G13 qui disent combattre pour des causes nobles...
–– Il n’y a pas de doute les membres du G13 se retrouvent dans le tableau critique que je viens de dresser de ta gouvernance chaotique. Ce sont des gens qui se battent sur des valeurs qui sont celles de la Démocratie, et il est juste de le reconnaître...
–– Ah, mon cher Bio ! Laisse moi-rire ! Des hommes qui se battent sur des valeurs ? Quelles valeurs ? Laissons même de côté les Saley et consorts, sans parler d’un Gbadamassi que je viens d’acheter, tous ces Messieurs dont chacun sait sauf les naïfs qu’ils ne font pas la politique pour les beaux yeux de la République – il n’y a qu’à voir la fixation qu’ils font sur la question de l’escorte des véhicules d’occasion pour s’en convaincre. Non laissons de côté cette coterie d’affairistes patentés qui utilisent la politique comme paravent commode et parlons du plus zélés de tes soutiens politiques dans le Nord. J’ai nommé Wallis Zoumarou. Il était de mes partisans, ce Wallis, il n’y a pas si longtemps que ça, te souviens-tu ? A cause de l’affaire de sa maison incendiée dont il s’attendait à une prise en charge politique de l’indemnisation alors qu’une telle décision ne pouvait que relever de la justice, il a tourné casaque et s’est adressé, si j’ose dire au plus offrant...C’est clair qu’il n’a pas changé de camp pour les beaux yeux de la République, en dépit des belles paroles qu’il répand de-ci de-là... Et il en est de Wallis Zoumarou comme de tous ces soi-disant hommes politiques ou honorables regroupés dans le G 13. Dans cette affaire, il ne fait aucun doute que l’honneur y est pour si peu, crois-moi.
–– Honneur ou pas, les hommes politiques ont le droit de se regrouper comme bon leur semble, telle n’est-elle pas la règle dans toute démocratie digne de ce nom ?
–– Tout à fait, mais à condition de le faire avec intelligence. Ce qui me permet de rebondir sur la question de fairplay. Entre nous, mon cher Bio, que voulez-vous, toi et ta clique du Nord ?
–– Quelle question ?
–– Eh bien, laissons de côté la critique stérile. La politique c’est comme une omelette. De même qu’on ne peut faire d’omelette sans casser des œufs, on ne peut faire de la politique sans passer outre un certain nombre de règles éthiques, pratiques ou légales. C’est comme ça, et la démocratie n’y change rien
–– Enfin, si je comprends bien ta pensée, la fin du pouvoir personnel justifie tous les moyens ?
–– Non, cousin, toi dont la trajectoire ambitionne de suivre la mienne à la trace, au point que tu sembles me marquer à la culotte, fais au moins un effort pour me suivre aussi dans mon raisonnement, au lieu d’avoir un parti pris.
–– Chiche, je ne demande pas mieux, allons-y !
–– Voilà : en te lançant dans la course contre moi, au lieu d’unir tes forces aux miennes, tu ne contribues qu’à diviser le Nord et à laisser le pouvoir passer aux mains d’un homme du Sud. Ce qui est un sacrilège ! Dieu qui aime le Bénin n’a jamais voulu cela. Regarde bien, sur 50 années d’indépendance nous autres du Nord avons Présidé 45 années aux destinées d’un pays où pourtant on ne peut pas dire que nous soyons démographiquement majoritaires. Ça, c’est la Volonté de Dieu et un simple mortel ne peut y contrevenir sans se mettre en travers de Son chemin. Pourquoi voudrais-tu défaire ce que Dieu a fait lui-même ? Ne sais-tu pas qu’il y va de l’intérêt de notre sang ? Réfléchis un peu, mon cousin et frère du Nord, c’est une question de sang autant que d’honneur et d’intérêt.
–– Je vois là où tu veux en venir mon cousin, mais si le Nord a toujours dirigé ce pays et si Dieu l’a voulu ainsi alors Il confirmera le bien fondé de ma démarche. Quant à la frontière entre le Nord et le sud, bien malin qui pourrait le savoir...
–– Mais regarde un peu les choses en face, et ne prends pas le risque de la division du Nord
–– Ne préjugeons pas des diverses possibilités qu’offrent l’opportunité heureuse de ma prochaine candidature
–– Ah, tu parles de diverses possibilités ! Quelles sont-elles ?
–– Eh bien voilà : il y a trois possibilités décisives auxquelles correspondent des choix propres.
–– Les quelles ?
–– Possibilité n°1 : Yayi 2ème /Bio Tchané 1er / Houngbédji 3ème
–– Possibilité n°2 ?
–– Yayi 1er /Bio Tchané 2ème / Hougbédji 3ème
–– Possibilité n°3 ?
–– Yayi 2ème / Biao Tchané 3ème / Houngbédji 1er
–– Alors comment réagirais-tu dans chacune de ces possibilités ?
–– Eh bien mon cher cousin, c’est simple : dans les deux premiers cas, je ferai tout pour convaincre les sudistes –que je serai leur homme et bien meilleur Président. Et comme ils se sont opposés à toi depuis des années, ils seront mis en face de la cohérence de leur posture politique. Cons comme ils sont depuis 50 ans que nous autres Nordiques nous exerçons la présidence, je ne doute pas qu’ils mordront facilement à l’hameçon, et c’en sera fait de toi, et de ton obsession de réélection comme ce fut le cas pour Soglo, ton mentor...
–– Et quelle sera ta position dans le cas n°3, dis-moi cher cousin
–– Oui, dans ce cas, le Nordique en moi s’éveillera à nouveau, et en toute discipline consanguine, j’unirai mes efforts aux tiens pour que tu aies toutes les chances d’être réélu afin que le Nord garde le pouvoir. De toutes les façons, comme tu le vois, dans cette affaire, toute question de personnes mise à part, le Nord part déjà avec 2 chances sur 3 d’être sérieusement représenté au plus haut niveau... Ne blâme donc pas ma démarche et ne me tiens pas pour l’empêcheur du Nord de Présider en rond le Bénin que je ne suis pas. A certains égards, je me considère comme l’optimiseur alternatif des chances du Nord de conserver la présidence au détriment du sud. Telle est la seule promesse que je peux te faire, et j’espère que tu me crois et que le moment venu, tu ne seras pas surpris que je la tienne...
–– Je vois que ta position ne manque ni de bon sens ni de raison, mais j’espère que tu tiendras ta promesse, telle que tu l’as dit...
–– Bien sûr, cousin, tu peux me faire confiance ; la politique a beau être impitoyable, il y a des limites à ne pas dépasser, en tout cas pour un homme du Nord...Et Kérékou, sous l’arbitrage éclairé duquel ce contrat se réalisera m’est témoin; car sa volonté ne se fixe pas à tel ou tel, mais ne vise que l’intérêt du Nord
–– Très bien, cousin, j’en prends acte, mais c’est aussi du donnant donnant
–– Quoi, il faut que je te fasse aussi une promesse ?
–– Promesse n’est pas le mot exact, disons simplement faveur
–– Et quelle est cette faveur ?
–– Eh bien, tout à l’heure dans ton speech liminaire tu m’as traité de suiveur n’est-ce pas ?
–– Oui, force est de le constater, cousin, tu m’as suivi de a à z et tu n’es pas fatigué de le faire
–– Or depuis quelque temps il semble que celui qui suit l’autre n’est plus celui que l’on croit
–– Comment ça, je copie ce que tu fais ?
–– Est-ce que tu peux me le promettre ?
–– Oui, à condition que tu m’indiques – et cela m’étonnerait – une seule chose où il est clair que c’est moi qui t’ai imité...
–– Si je te le dis, et si tu es convaincu, tu tiendras ta promesse ?
–– Il n’y a pas de raison
–– La dernière fois j’étais allé à Grand-Popo lors des festivités du Nonvitcha,
–– Oui...
–– Or quelques jours seulement après voilà que, fidèle à ton tempérament prompt à la précipitation, tu te rues sur Grand-Popo, une ville que tu n’as jamais daigné honorer de ta présence en trois ans de présidence...Dans cette affaire qui suit qui ?
–– humm, c’est-à-dire que... Bon, bon je l’avoue, c’est moi...
–– Alors tu promets, cher cousin ?
–– Oui, Promis, juré, Parole de Nordique...
Binason Avèkes
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