Ce que fait Yayi Boni au Bénin touchant aux atteintes quotidiennes à la liberté de la presse, au droit à l'expression libre dans une démocratie ; la répression qu'il fait abattre sur la liberté d'expression d'une main de fer n'est ni plus ni moins que du terrorisme. Il s'agit de faire peur aux divers acteurs de la vie publique, afin de verrouiller l'opinion sur le seul culte de sa personnalité, de sa médiocrité et de ses injustices politiques, passées, présentes et à venir !
Ces actions se traduisent au niveau des acteurs directs de la presse et des médias, c'est-à-dire des journalistes et des directeurs d’organe de presse par une pression sévère exercée par la toute-puissance d'un organisme, la HAAC. Cet organisme, dans son essence, était conçu pour être le régulateur de l'audiovisuel et de la presse en même temps que le médiateur du marché de l'opinion, mais en un tournemain despotique, il est devenu le mirador politique du pouvoir en matière de presse et d'audiovisuel. Récupérée par le gouvernement, la HAAC, est instrumentalisée pour faire peur aux acteurs et organisations du milieu médiatique : journalistes, organes de presse, association etc. Pour un oui ou pour un non, cette Haute Autorité, devenue pour le coup très basse dans ses œuvres, réprime à tour de bras selon le bon vouloir du gouvernement. Parce qu'une virgule a été de trop dans un article sur le pouvoir, ou parce que tel opposant a pu faire entendre sa voix en dépit de l'oppression médiatique à laquelle est astreinte l'opposition, ou ce qu'il en reste, le pouvoir sévit sans pitié. Les journaux sont fermés, les journalistes poursuivis en justice, traqués, certains sont obligés de fuir le pays et de quitter leur famille ; d’autres sont massacrés dans des crimes présentés comme crapuleux mais dont les réels motivations politiques ne font l'ombre d'aucun doute. Des organes de presse sont fermés ou interdits d'exercer, de parution ou de diffusion pendant des délais souvent préjudiciables à leurs affaires, sinon à leur survie. Tout cela pour restaurer le réflexe de l'autocensure et du respect du climat de la pensée unique dans le pays. Et si cette pensée unique était seulement salutaire ou de qualité, façon despotisme éclairé, on pourrait encore en comprendre le bien-fondé et en accepter le sacrifice ; mais hélas, comme toutes les pensées uniques, elle a le relent infect de la médiocrité, de l’obscurantisme, du coup de force, de la barbarie et de la corruption. La presse et ses acteurs ne sont pas les seuls à subir la violence autocratique et pour tout dire dictatoriale du pouvoir en place. Les hommes politiques ou publics sont aussi traqués dès lors qu'ils essayent de faire tout simplement ce qui est sain en toute démocratie : exprimer son opinion. Lorsque celle-ci critique ou accuse le gouvernement, au lieu que celui-ci intervienne en donnant son point de vue preuves à l'appui, il lance tambour battant la meute répressive aux trousses de l'impertinent en le poursuivant devant la justice--ce qui d'une certaine manière est aussi prévu par la loi, même si d'un point de vue éthique et sociopolitique, il s'agit déjà d'une descente d'une escalade préjudiciable à la cohésion nationale. Mais, ce qui est pire--et c'est d'ailleurs pour cela que le gouvernement préfère le procès au débat d’idées et au droit de réponse--c'est que, à l'instar de toutes les institutions de la république qui sont instrumentalisés, la justice obéit au doigt et à l'œil du pouvoir, et les procès ne sont qu’une formalisation et une mise en scène honteuses du diktat de sa volonté. On a décidé que tel homme public qui a eu le toupet de faire des déclarations publiques déviantes par rapport à la norme du conditionnement de l'opinion doit écoper d'une punition carcérale de six mois ou un an. Et les juges à la solde du pouvoir, au mépris du droit, traduisent ce décret du prince dans des décisions iniques d'une justice parodique devenue l’ombre honteuse d’elle-même. Le ressort de cette répression autocratique de la liberté d’expression est psychologique. Il s'agit de faire peur aux journalistes--peur physique et morale pour eux-mêmes et leurs familles, peur pour leurs emplois et leur sécurité personnelle. Peur de mettre la clé sous le paillasson à force de subir chicanes, vexations et interdictions d'exercer son métier... À l'homme politique épris de liberté, et qui fait partie des quelques rares à résister aux contrats, chantages et promesses politiques qui font taire nombre d'entre eux depuis le hold-up de mars 2011, on a recours au procès pour l'humilier, l’abaisser, le faire souffrir physiquement et moralement, marquer au fer rouge le rapport de force comme si on croyait que le peuple avait pris son parti de la sentence de La Fontaine voulant que la raison du plus fort soit toujours la meilleure ; comme si le peuple croirait que celui qui a connu l'humiliation de l’emprisonnement injuste par un pouvoir illégitime n'est pas celui qui avait raison.
Infantilisation, diktat, humiliation, contraintes physiques et morales lorsqu'ils proviennent du sommet de l'État, par ceux-là mêmes qui sont garants de la cohésion nationale, de la liberté des individus, ne sont rien moins que du terrorisme d'État à usage politique. Et en tant que tel, comme la guerre du Mali contre les terroristes, il mérite d'être combattu hic et nunc.
Adenifuja Bolaji
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