Béninoises, Béninois, Mes chers compatriotes,
A l’heure où j’ai décidé de reprendre contact avec vous en cette nouvelle année, je confesse publiquement qu’II m’est extrêmement pénible de vous formuler mes meilleurs vœux, alors même que je suis conscient du fait que vous vivez tous dans une précarité inégalée jusqu’alors.
Le Bénin, pays que nous chérissons tous pourtant, s’est enraciné depuis plusieurs années dans une situation de crises sociale, morale et politique.
Je suis encore tourmenté par l’interpellation laconique mais extrêmement inquiétante du Conseil National du Patronat du Bénin à l’adresse de tous, s’agissant des actes posés par le Gouvernement dans la désormais fameuse affaire du PVI. «Ces actes». écrivait-il, «améliorent-ils l’environnement des affaires au Bénin, et quelle connotation induisent-ils sur le rang qu’occupe le Bénin dans le classement Doing Business établi par la banque mondiale?
Notre pays régresse…
Pour rappel, sur 183 Pays entrepris dans le classement mondial du Doing Business, le Bénin est classé au 175ème rang sur 183, qu’au sein de l’espace CEDEAO le Bénin est 13ème sur 16, et au sein de l’espace UEMOA le Bénin est répertorié au 7ème rang sur 8. Ainsi, et de notoriété publique le Bénin est le dernier de la classe ....»
Cette situation qui serait reconnue par le Chef de l’Etat lui-même si l’on en croit la livraison du journal «Fraternité» N°3129 du 09 juillet 2012 rapporté par la Croix du Bénin N° 1154 du 13 Juillet 2012, l’aurait humilié et fait boire la honte jusqu’à la lie selon ses propres «aveux» toujours rapportés.
Or, loin de s’améliorer, elle s’est dégradée à un tel point, qu’à la période consacrée des fêtes de fin d’année, la ménagère n’a pu que constater avec un certain désarroi que son panier était toujours aussi vide.
Dans ces conditions, comment aurais-je eu le courage de vous formuler mes meilleurs vœux, sans une once de cynisme?
…Et la bonne moralité déserte le forum !
S’agissant du volet moral, il nous semble inopportun de réciter la litanie de comportements totalement immoraux, voire très souvent amoraux à laquelle nous sommes confrontés aujourd’hui, d’autant plus que ce fait de société ne semble plus choquer grand monde.
Ainsi, les jeunes dans leur grande majorité, de plus en plus désœuvrés, viennent tous les ans gonfler les rangs des chômeurs endémiques dans l’indifférence de nos dirigeants, alors même que le «printemps arabe» nous a enseignés qu’une telle situation est assurément annonciatrice d’évènements peu souhaitables.
Une corruption galopante
Dans ce contexte singulier, la corruption tisse lentement mais sûrement sa toile, les crimes économiques foisonnent à profusion, engendrés par la cupidité de groupes d’hommes et de femmes sans foi ni loi, qui n’hésitent pas à dépouiller la plus grande masse de leurs compatriotes.
Nul doute à ce propos, qu’annoncer d’un ton péremptoire que les Béninois n’auront de cesse d’être confrontés aux scandales à répétition, serait comparable aux vérités de la Palisse, exercice auquel je me refuse à prêter le moindre concours.
«Ô rage, ô désespoir, ô mal gouvernance ennemie » comme dirait l’autre: où sont donc passés les justes de notre Cité? Ces glorieux ainés auxquels nous devons tant de combats épiques, notamment la Conférence nationale des forces vives de la nation, même si aujourd’hui ses acquis s’étiolent et s’érodent lentement au fil du temps, consécutivement aux innombrables coups de boutoir qu’ils subissent constamment.
Et les aînés se claquemurent dans le silence
Force est de constater que lesdits ainés se murent tous dans une conspiration du silence; qui, parce que devenus encore plus veules avec le temps; qui, parce que bénéficiant d’avantages substantiels, préfèrent camper le rôle «d’hommes lièges» ; qui, simplement parce qu’ils ont peur de mesures de rétorsion qui n’en disent pas leur nom.
Un ange passa les ailes chargées de wagons d’actes de répressions.
Silence, on musèle la presse; l’intolérance est de mise; on corrompt à tout va; les institutions de contre - pouvoir ne font même plus illusion; quant aux opposants politiques, ils sont devenus une denrée tellement rare que même notre jeune démocratie semble ne plus s’en émouvoir. Et dans cette société totalement «matée», seuls les syndicalistes tentent encore de résister aux nombreuses atteintes aux libertés publiques.
Le Bénin des coups tordus et des coups bas aux fins politiques…
Alors, plutôt que de porter des solutions aux cohortes de maux dont souffrent les Béninois, et ayant pour corolaire notamment la mal gouvernance, nos dirigeants préfèrent fomenter des coups tordus contre leurs amis d’hier, et monter force procès politiques, dont certains travestis en procès en diffamation et en offense, ne bernent en réalité aucun Béninois.
Et, sans pudeur ni retenue aucune, ils se vantent sur la place publique et dans les cercles concentriques, de l’assurance qu’ils ont de la condamnation certaine du supposé prévenu, poussant l’outrecuidance jusqu’à préciser les peines qui seront prononcées.
En fait pour parvenir à leur fin, ils n’éprouveront ni honte ni remords à se servir du support «audio-visuel» du point de presse du mardi 18 septembre 2012 de votre humble serviteur, qu’ils ont bien entendu pris le soin au préalable de tronquer, de traficoter, l’expurgeant d’éléments essentiels à sa compréhension, oubliant toutefois qu’un tel montage est répréhensible au plan pénal et ne saurait rester sans suite.
Un drôle de pays où la justice et la presse sont muselées
Confronté à cette situation, le Béninois «lambda» assiste impuissant aux multiples violations des droits de l’homme et de la défense. Un drôle de pays qu’est devenu le Bénin, champion toutes catégories de coups fourrés, où les jugements de cour sont connus à l’avance et ne reflètent que la volonté du prince, qui, paradoxe délicieux, n’hésite pas à citer l’institution judiciaire au nombre de toutes celles qui seraient «mouillées».
Alors en vérité je vous le demande, comment aurais-je pu dans un tel contexte vous formuler avec sincérité mes meilleurs vœux?
Malgré ce tableau peu réjouissant mes chers compatriotes, je vous exhorte à ne jamais baisser les bras et vous laisser submerger par un afro-pessimisme de quelque nature que ce soit. Vivez dans l’espérance de jours meilleurs, car je suis convaincu que le Seigneur TOUT PUISSANT dans sa grande mansuétude, nous comblera tous d’aise en cette nouvelle année 2013.
Mais ayez gravé dans votre esprit comme sur du marbre, que les plus grandes victoires ne s’obtiennent qu’au prix de sacrifices douloureux.
Me Lionel AGBO
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