Sur le site du journal le Monde, le Monde. fr, on peut lire que « la communauté internationale a salué la mort du dictateur » [ libyen] ! Mais dans quel monde sommes-nous pour qu'une communauté dite internationale se réjouisse de la mort d'un homme que des puissances occidentales ont guerroyé, déjà affaibli et chassé du pouvoir avec le prétexte commode d'une opposition locale en révolte ? Cette communauté internationale dont parle le journal contient-elle les pays africains, qui soit dit en passant, ont été privés de leurs mots dans cette affaire ? Et si oui quels sont les pays africains qui se réjouissent de la mort de l'un des leurs ? Peut-être la venimeuse engeance des dictateurs, heureux élus qui bien qu’affamant, opprimant et acculant plus leur peuple à la misère et à la souffrance que ne l’a fait le dirigeant libyen --dont le peuple malgré tout est l'un des plus prospères d'Afrique-- ont la chance miraculeuse, mystérieusement décrétée par l'Occident de continuer leur sale boulot sans être inquiétés ; sans avoir une opposition qui les guerroie avec l'appui aérien de l'Occident : les dictateurs africains béni-oui-oui qui peuvent dormir sur leurs deux oreilles.
Dans cette affaire de la Libye et du colonel Kadhafi que de manipulation ! Que de duperie honteuse et de désinformation abjecte ! Après avoir défendu son pouvoir jusqu'à la dernière énergie avec des forces injustement inégales, Kadhafi, le dernier héros d'Afrique, Kadhafi qui avait dit qu'il ne se rendrait jamais parce qu'il n'était pas une femme, Kadhafi est tombé en homme l'arme à la main. Il n'était peut-être pas un saint mais l'Afrique contient-il des dirigeants que l'on peut qualifier de saint ? Il aurait pu avoir le même sort qu’un Pinochet à la différence près que Pinochet était un dictateur à la solde de l'Occident chrétien. Mais l’Occident ne hait rien tant que des dictateurs autonomes. Et l'Afrique n'est pas l'Argentine, un peuple qui a le sens de lui-même et ne tombe pas en-deçà de la limite de l'honneur, de la dignité et de l'intelligence collective. Avec l'Afrique tout est possible ; cette limite est vite franchie. Il en a été ainsi du temps de l'esclavage où c'était nous-mêmes qui nous vendions aux blancs ; il en a été ainsi du temps de la colonisation, et de la néo-colonisation où une harde de représentants de l'ordre capitaliste colonial s'est substituée aux anciens gouverneurs pour continuer en pire ce que faisaient les blancs. De tous les dirigeants africains, Kadhafi est le seul de toute l'histoire de la politique en Afrique à allier à sa connaissance profonde du parti pris occidental de mépris, de domination raciste et d'exploitation implacable de l'Afrique, une haine et un mépris viscéraux de cet ordre historique, philosophique et politique. Cette façon que les occidentaux ont de ne pas tolérer la haine et le mépris inverses de ceux qu'ils haïssent et méprisent ; cette façon qu'ils ont de haïr ceux qui connaissent les dessous profonds de leurs intentions, de leur histoire maléfique, cette façon disons-nous de s’arroger le monopole de la haine et du mépris vient de triompher. Le dernier combattant radical de la domination du continent africain par l'Occident chrétien capitaliste vient de mourir les armes à la main. Au-delà de la pseudo joie que le système médiatique occidental prétend, dans «sa communauté internationale», accueillir cette mort, le temps et l'histoire jugeront de l'intelligence et de la responsabilité de ceux qui s'honorent en Afrique de cette mort.
L'homme qui mettait en garde les Africains contre la deuxième colonisation de leur continent et son deuxième esclavage vient de mourir. L'Occident capitaliste est libéré du “dictateur” Kadhafi. L'Afrique est-elle pour autant libérée de l'Occident ?
Aminou Balogoun
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