Cette histoire est une Fiction : Mais toute ressemblance avec des personnes ayant réellement existé ou qui existent ne serait pas purement fortuite …
Par Ahandessi Berlioz
Aujourd’hui, je suis réputé être quelqu’un qui ne raffole pas des téléphones portables. Et c’est vrai que je ne vois pas d’un bon œil ceux qui pour un oui ou un nom, y sont pendus à longueur de temps, notamment lorsque ces personnes sont au volant d’une voiture. Mais parlant de téléphone et de voiture, je me souviens d’une histoire où, rétrospectivement, je peux rendre grâce au téléphone de m’avoir sauvé la vie. L’histoire en question date de quelques années. C’était au moment où les premiers téléphones commençaient à envahir nos habitudes ; et il n’y avait que quelques rares privilégiés qui en possédaient.
En vérité, pour situer les choses dans leur ordre, l’histoire dont je veux parler est plus une histoire de voiture et de chauffeur que de téléphone, une histoire de folie des grandeurs. Et, comme on le verra, il s’agit surtout d’une histoire de famille.
Nous les Mèhou, nous sommes originaires de Tado au Togo. Mes aïeux ont émigré à Grand-Popo où mon grand père a fait fortune dans l’Import-Export. En fait, ce goût des affaires était un legs familial car, paraît-il, un de mes aïeux qui était un ami personnel de Chacha De Souza avait prospéré dans le commerce des esclaves à Agoué. C’est de cette fortune que profita mon grand-père pour se lancer dans les affaires. Pendant une bonne partie de sa vie, les affaires de mon grand-père avaient été florissantes. De tous ses frères et sœurs, mon grand-père fut celui qui sut le mieux gérer son héritage. Ce succès suscitait l’envie voire la jalousie de ses propres frères, bien qu’à terme, tous finissent par dépendre de sa générosité. C’est au milieu des années 1980 que les affaires de mon grand-père périclitèrent, et ce dans le sillage de la conjoncture qui s’était abattue sur tout le pays. Mon grand père, démocrate dans l’âme n’eut d’ailleurs pas la chance de survivre aux événements politiques et économiques qui allaient conduire à la Conférence Nationale. Il décéda d’une crise cardiaque un soir de juin alors qu’il revenait d’un voyage d’affaire au Ghana, un peu après le passage de la frontière d’Aflao. Nestor, le chauffeur qui croyait que Grand-père dormait ne s’est rendu compte de son état critique que plus d’une heure après. Mais, hélas, il était trop tard pour le sauver. A la mort de Grand-père, toutes sortes de rumeurs circulaient sur les responsables probables. A l’intérieur de la famille, les gens s’accusaient les uns les autres. Une discorde vit le jour à ce sujet entre mon père mes oncles et mes tantes. Bien évidemment, cette discorde avait comme toile de fond l’héritage paternel. C’est le lieu de présenter ceux qu’il n’est pas exagéré d’appeler protagonistes d’un drame familial, somme toute ordinaire. Mon grand père était polygame. En raison du fait qu’il avait une succursale dans plusieurs départements, il avait épousé des femmes de différentes régions du pays. Ainsi ma grand-mère Nansi, la mère de mon père était-elle originaire de Tindji près d’Abomey. Nansi mit au monde quatre enfants : Tante Clarisse, Oncle Sévérin, Oncle Lazare, et mon père Nicéphore, qui était l’aîné des quatre. Avant Nansi, mon grand-père avait eu un enfant avec Nangan, sa première femme mère de l’Oncle Bruno, le plus âgé de ses enfants, qui est comptable à Djakotomey. Adjarraton, comme son nom l’indique est originaire d’Adjarra et fut la troisième femme de mon Père. On l’appelle plus communément Adrien-non, du nom de son fils aîné, Adrien. En plus de ces trois épouses légitimes, mon père eut des enfants avec deux femmes dont l’une, relation ancillaire sans suite, fut la mère de l’Oncle Antoine, ingénieur agronome à Ifangnin. Et la dernière épouse, originaire de Parakou, que je ne connais pas de vue, décéda en couche en mettant au monde le dernier fils de mon grand-père, Oncle Boniface, dit tonton Boni… C’est entre tout ce beau monde et bien d’autres que devait se partager l’héritage de Grand-père. On comprend pourquoi l’affaire ne fut pas de tout repos. Après qu’ils eurent partagé entre eux, maisons, terrains boutiques et je ne sais quels autres biens terrestres, mon père, ses frères et ses sœurs eurent l’idée spirituelle de ne pas toucher à la voiture dans laquelle Grand-père avait rendu l’âme. Car, la voiture était considérée par tous comme un souvenir précieux, un bien commun qui n’avait pas de prix.
Et pourtant, une dizaine d’années après, cette voiture, symbole du transit de Grand-père vers sa dernière demeure, avait failli devenir notre propre cercueil.
A suivre…
Par Ahandessi Berlioz
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