Sarkozy : Supermenteur-Superhonnête !
Le paradoxe de l'Agrégateur.
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Nicolas Sarkozy est la synthèse apparente de Jacques Chirac et de Jean Marie Le Pen.
De Chirac, il tient la propension à ne pas se soucier de la véracité de ce qu’il dit. Tout le monde se souvient que le chantre de la "fracture sociale" n’a en rien honoré ce slogan qui lui fut salutaire aux heures difficiles de sa remontée cruciale dans l’opinion, serré qu’il était entre la gauche et les néolibéraux, amis de trente ans qui n’avaient pas hésité à le trahir.
Non seulement Chirac n’a pas donné cher de ce qui n’était qu’un slogan de positionnement mais, une fois devenu Président, il a multiplié à loisir les promesses démagogiques, les belles paroles sur la justice sociale, l’égalité entre les Peuples, discours éminemment lénifiant, sans effet concret et manié avec une délectation cynique. Ensuite, il y a eu toutes les petites opérations politiciennes dont la moindre n’était pas celle qui a conduit à sa réélection face à Le Pen dans des conditions politiques rocambolesques qui portaient au pinacle, avec un cynisme consommé, l’escroquerie machiavélienne qui est un élément dominant de la culture politique de la droite française.
Or de cette propension démagogique à dire aux gens ce qu’ils veulent entendre – ce qui correspond au titre de Supermenteur conféré par les Guignols – et ce cynisme machiavélien Monsieur Sarkozy est l’héritier. En cela il est le fils spirituel de Chirac, et l’incompatibilité de leur caractère, idée fixe et fixée une bonne fois pour toute par les médias, tient pour partie de cela – bien tuer ce qu'on est pour bien être ce qu'on tue – et pour partie d’un roman médiatique au naturalisme douteux.
D’un autre côté Monsieur Sarkozy n’est jamais à l’aise que dans le registre populiste avec des mots crus, cultivant une certaine gouaille, et une rapidité de propos acerbes, mélange d’ironie et de répliques cinglantes. Il ne jure que par la manipulation et s’exprime sur un mode régressif qui fait la part belle à la collusion insidieuse des instincts au détriment de la saine confrontation des idées. Parfois même il joue à être moins intelligent qu’il n’est en réalité, parce qu’obsédé de vaincre son interlocuteur plutôt que de le convaincre. Avec ce mode de communication, il a réussi à se faire une image de – et se fait gloire de passer pour – celui qui n’a pas la langue de bois et dit les choses telles qu’elles sont. Or cette image de celui qui dit tout haut ce que les Français penseraient tout bas est l'image que Le Pen au fil des années a cultivée. C’est celle qui a fait le succès de sa geste politique jusqu’à son apogée en avril 2002. Puisque Sarkozy se donne en homme qui a du franc-parler, on pourrait l'appeler par parodie le Superhonnête.
Fort de cette double réputation, Monsieur Sarkozy joue les agrégateurs de voix. Sans vergogne ni scrupule, il ratisse d'un bord à l'autre de l'échiquier politique national. Ses références historiques allant pêle-mêle de Poujade à Jaurès et de De Gaulle à Léon Blum. Son seul mot clef étant : "gagner les élections." Or là se trouve le paradoxe de l’insertion médiatique de Monsieur Sarkozy : dans le grand écart qui fait de lui à la fois le Supermenteur façon Chirac et le Superhonnête façon Le Pen ! Synthèse apparent, amalgame douteux. Tel est le paradoxe de l'agrégateur qu'il ramasse d'un geste tout et son contraire. Il reste à espérer que les Français ne s'y tromperont pas jusqu'au bout.
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Eloi Goutchili
Copyright, Blaise APLOGAN, 2007
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