Même s’il est tôt pour en tirer une conclusion valable, le Président Buhari n’a rendu visite qu’à deux pays sur les quatre francophones qui entourent son pays : le Niger et le Tchad. Après sa victoire électorale, il a reçu des félicitations de la plupart de leurs dirigeants. Celles du Niger, du Tchad, et du Bénin ont été sans ambages et bien retentissantes. On a notamment vu le Président Béninois, M. Yayi aller faire le pitre lors de sa visite de courtoisie et de félicitation au nouveau président élu, et ce avant son investiture. |
Mais on est seulement réduit à imaginer que le Président Paul Biya du Cameroun n’a pas été en reste, car ses manifestations aussi bien avant que pendant l’investiture de Buhari semblent avoir échappé à toute publicité tapageuse. Et pourtant, tout autant sinon plus que les autres pays de la ligne de front, le Cameroun, à l’instar du Nigeria subit les exactions du groupe terroriste Boko haram. Pourquoi Paul Biya ne manifeste-t-il pas ostensiblement une certaine chaleur dans ses relations avec le Nigeria, et plus particulièrement avec son nouveau Président M. Buhari ? On chercherait en vain une image publique de Paul Biya et de Buhari se serrant la main, comme c’est le cas avec les trois autres présidents des pays frontaliers du Nigeria. Manifestement, ce n’est pas la chaleur de l’amitié ou de la fraternité qui étouffe Paul Biya vis à vis du Nigeria. |
On se souvient que l’initiative de conjuguer les efforts sous-régionaux dans la lutte contre Boko haram à laquelle s’est associé le Cameroun avait pris corps sous l’égide de la France, ce qui était déjà une aberration entre pays frères et indépendants. Il semble que la souscription du Cameroun au principe de la coordination régionale dans la lutte contre Boko haram obéisse plus à l’injonction néocoloniale de la France, plutôt qu’à un volontarisme autonome. C’est dire que le Cameroun de Paul Biya a plus d’une raison de se méfier du Nigeria. 1. Il y a la grande taille du Nigeria qui intimide et rend méfiant ; 2 Il y a le précédent de la presqu’île pétrolifère de Bakassi cédée au Cameroun par le Nigeria- cession qui reste en travers de la gorge des Nigérians ; enfin il ne faut pas oublier qu’une partie du Cameroun, celle justement frontalière du Nigeria, est anglophone et entretient avec le Nigeria des liens historiques qui restent sensibles. |
Sur le plan personnel on peut aussi apprécier la réserve réciproque des deux chefs d’État l’un envers l’autre. Muhammadu Buhari est musulman et Paul Biya est chrétien. L’un s’habille en boubou et l’autre en costume trois pièces. Ce n’est pas du tout anecdotique de constater que, de tous les pays frontaliers du Nigeria, le Président Buhari n’a rendu visite qu’à ceux qui sont musulmans ou dont les présidents portent les mêmes boubous que lui... |
Le Président français faisant le lien entre Paul Biya du Cameroun et Goodluck Jonathan du Nigeria. La scène se passe à Paris, lors de la concertation des pays de la ligne de front dans la lutte contre Boko haram. Observez la fierté du Président français, qui a l’air d’un père réunissant ses enfants pour leur dire de s’entendre entre eux… |
Commentaires
Vous pouvez suivre cette conversation en vous abonnant au flux des commentaires de cette note.