Il y a une chose qu’il faut dire, et qui est vrai au-delà de tout doute raisonnable ou de toute critique consacrée de la Françafrique. C’est qu’il y a une Françafrique de gauche et une Françafrique de droite ; celle-ci a à son actif par exemple la mise hors jeu politique de M. Laurent Gbagbo en Côte d’Ivoire, et à la disposition de la CPI ; ainsi que la contribution active au renversement du Colonel Kadhafi, préalable à son assassinat en Libye. Quant à la Françafrique de gauche, on peut la créditer, et elle peut se prévaloir d’avoir « sauvé » le Mali de la menace islamiste -- même si ce fut en grande partie au titre de la correction des erreurs antérieures de la Françafrique elle-même -- et d’avoir ôté de l’œil de la France la grosse poutre que constituait le dictateur Blaise Compaoré, qui s’apprêtait, à travers intrigues et aveugle entêtement, à ouvrir une nouvelle veine de perpétuation de son règne de plusieurs décennies à la tête du Burkina Faso. L’éviction de Blaise Compaoré du pouvoir n’était pas pour déplaire à François Hollande, qui pourrait s’honorer de n’avoir pas donné son blanc seing durant son mandat à des manœuvres de perpétuation au pouvoir d’un autocrate francophone ; manœuvres sur lesquelles la France est stigmatisée d’avoir souvent fermé les yeux si elle ne les a pas en sous-main encouragées à son profit néocolonial. Si François Hollande n’a pas donné un coup de pouce à la Révolution burkinabè, on ne peut pas dire que la France ait contribué en quoi que ce soit à sauvegarder le fauteuil de son antique valet néocolonial. En revanche, en reconnaissance des services rendus par Blaise Compaoré, et en anticipation de l’éventualité du processus d’holocauste qui a coûté la vie à Kadhafi, François Hollande a donné toute instruction aux services compétents pour exfiltrer un brave serviteur néocolonial qui de la Côte d’Ivoire au Mali, est considéré comme un interlocuteur et un intermédiaire privilégiés. Loin de la posture immorale de la géopolitique néocolonialiste d’un Général de Gaulle qui considérait que la France n’a pas d’amis mais que des intérêts, François Hollande en sauvant le tête de Blaise Compaoré au sens propre du terme-- bien qu’il s’est refusé de sauver celle-ci au sens figuré -- a voulu marquer d’une empreinte éthique sa gestion d’une Françafrique vivace. A défaut de signer son arrêt de mort comme il l’avait promis à son arrivée au pouvoir, François Hollande nous donne à voir une survivance de la Françafrique qui porte sa marque et qu’on pourrait appeler une Françafrique éthique, ou de gauche. Soit dit en passant, pour un président dont l’identité de gauche est sujette à caution sinon mise en cause at home on comprend que l’Afrique puisse être mise à contribution pour affirmer et illustrer ses convictions. Mais quoi qu’il en soit, les deux Françafrique, ne sont pas différentes de nature, seulement de style. Elles doivent être stigmatisées et combattues car elles ressortissent de la même essence néocolonialiste dont l’Afrique n’a que faire. Adenifuja Balogun |
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