Dans le communiqué comminatoire de la Présidence du Bénin enjoignant les enseignants de reprendre le travail, ou plus exactement informant la population du passage d’un nuage radioactif d’émissaires dans les communes pour une campagne d'intoxication à destination de la galaxie de ses obligés, exécutants, laquais, commis, soldats et autres personnalités stipendiées, outre le fait de révéler sa conception autocratique de la représentation du peuple, la Présidence, en invoquant la « rigueur des lois de la République » fait assaut de légalisme républicain. Elle affirme que nous sommes dans un État de droit, qu'il y a des lois et que le Bénin est une République. Rappelons tout de même l'origine du mot République : res publica, qui veut dire la chose du peuple. Ainsi entendu, la chose du peuple n'est pas la chose du peuple à géométrie variable ; elle n'est pas la chose du peuple à la merci du bon vouloir d’un homme. En effet, quelle est cette République qui n'est pas la chose du peuple le matin et se veut la chose du peuple le soir ? Cette République dont on menace les enseignants de la rigueur des lois elle a commencé quand ? Après le hold-up électoral ? Avant ? Pendant ? En attendant le prochain ? Quel est son rapport avec les milliards qui sont détournés de-ci de-là dans toutes sortes d'affaires sans suite qui ont agité les médias puis donné place à un silence de mort ? Quel est son rapport avec tous ces crimes d'État jamais élucidés ? Quel est son rapport avec l'impunité superbe des dirigeants ? Quel est son rapport avec la gestion patrimoniale des biens de l'État ? Quel est son rapport avec la confection d’une assemblée de complaisance ? Quel est son rapport avec la négation des droits de l’opposition ? Quel est son rapport avec la répression fantaisiste de la liberté de presse ? etc. Ces questions sont sérieuses et méritent réponse. Sinon, nous serions dans la tyrannie de la farce, celle d'un légalisme théâtral, opportuniste et fantaisiste. N'importe qui veut sévir dira qu'il sévit au nom de la République. Mais avant de sévir au nom de la République, il faut la servir, et non l'asservir. Avant d'en appeler à la République et à la rigueur de ses lois, il faut d'abord respecter cette République et ne pas la découvrir après coup. Car si la République était à ce point une sacralité dont les lois doivent faire rigueur à tous, elles doivent commencer à faire rigueur à celui qui s’en prétend leur garant. Et il ne doit pas découvrir épisodiquement cette rigueur au gré de ses besoins. |
La République n'est pas un fantasme que l'on anime à dessein. La République n’est pas un ours que l’on fait danser quand on veut, la République n’est pas un tchitchavi ! Par exemple, vous ne pouvez pas avoir blackboulé tout un peuple lors des élections où plus du tiers des citoyens ont été arbitrairement privés du droit de vote, puis sans vergogne ni scrupule, sans crier gare, faire assaut de République, vouloir invoquer la République ! La République est une et indivisible : elle l’est dans le temps, elle l’est dans l'espace. Ses lois ne sont pas une génération spontanée que l'on découvre à dessein et que l'on s'approprie pour faire violence au peuple. En volant des élections, en étant à la tête d’une maffia corrompue qui brade le patrimoine du pays aux étrangers, on est disqualifié pour invoquer la République. Quand on est un tyran, un voleur d'élections, quand règne autour de soi, de par sa gouvernance irrationnelle, un fumet de corruption et d'impunité, quand on gouverne sans partage, sans transparence et sans équité, quant on a cyniquement instrumentalisé toutes ses institutions, il faut avoir la décence de ne pas parler de République. Il faut opprimer sans excuse, sans prétexte, sans paravent. Et ce faisant, on endosse son identité, on l’assume, comme Idi Amin Dada ! Pas la peine d'évoquer le nom sacré de la République à moins bien sûr que ce soit la République bananière ou la République marécageuse des ananas… Aminou Balogun |
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