En 1994 Bédié est élu président à l’issue d’une lutte fratricide contre l’autre prétendant à la succession de Houphouët Boigny, Ouattara ; quatre ans après, celui-ci, voyant venir les prochaines élections sans aucune perspective pour sa situation personnelle, manipule des militaires qui renversent Bédié à la veille de Noël. Première violation de la loi de la Côte d'Ivoire
En 2000, Gbagbo est élu de façon « calamiteuse ». Le même Ouattara, refusant d'accepter ce verdict, promet de rendre la Côte d'Ivoire ingouvernable. Sur ces entrefaites, le général Guéi est assassiné, de sorte qu'on puisse imputer la responsabilité du crime au diable désigné par la propagande insidieuse de Ouattara. Quelque temps après, suite à une série de coups et de menaces de coups avortés, avec la mise en scène de quelques petits militaires soi-disant en colère, une rébellion venue du Nord entre en action en 2002. Deuxième violation de la loi de Côte d'Ivoire. Montée, armée par Ouattara et le Burkina Faso de Blaise Compaoré qui lui sert de base arrière, cette rébellion est parrainée en douce par la France. Quelques assassinats s’ensuivirent comme celui du ministre de l’Intérieur, Boga Doudou. Mais la rebellion échoue ce qui donnera lieu au fameux pourparler de Marcoussis.
Ainsi s'administre la méthode politique de Ouattara, dont le mépris des lois de la Côte d'Ivoire donne ironiquement raison aux accusations de ceux qui, à tort ou à raison, le tiennent pour étranger, avatar et représentant de cette cohue bigarrée de populations plus ou moins migrantes venant des régions sahéliennes et trouvant refuge dans une Côte d'Ivoire plus fertile et plus prospère – fertilité et prospérité auxquelles on doit à la vérité de reconnaître leur vaillante contribution. Mais combien de fils de soldats africains morts pour la France, combien des Maliens et Sénégalais immigrés en France réclament d’y avoir un Président de la république à leur image aujourd'hui ? Tout au plus les gratifie-t-on d'une carte de séjour...
Cette méthode fondée sur le mépris des lois de son propre pays, au motif qu’elles seraient injustes, s'accompagne de l'usage de la force que l'on veut faire apparaître comme légitime parce que visant une cause juste. Elle va de pair avec la diabolisation de tous ceux qui font obstacle aux ambitions de Ouattara. C'est ainsi que, sans qu'il soit le moins du monde un ange, Gbagbo est férocement diabolisé ; on lui colle dans le dos des charniers, des assassinats plus ou moins imaginaires, des arrestations arbitraires souvent résultant de provocation délibérées ; tout cela visant à créer une espèce de syndrome révolutionnaire à la Ceausescu. Mais Gbagbo, en politicien habile et malin ne se laisse pas berner.
La guerre fondée sur le non-respect des lois de la Côte d'Ivoire par Ouattara ne lui apporte qu'échec et déconvenue, mais Ouattara n'en tire aucune conclusion sensée et comme une mule fonce tête baissée vers une nouvelle bataille. C'est que le type est plein de haine et d'envie ; cette irrépressible envie d'être président de la Côte d'Ivoire, d'autant plus forte que son appartenance originelle intacte à ce pays est sujette à caution. C'est cette même méthode de non-respect des lois de la Côte d'Ivoire qui éclate en plein jour dans la crise électorale actuelle. En effet, dans tous les pays civilisés du monde, seul le juge électoral dit le droit en matière électorale – et ce quelque reproche de partialité qu'on puisse lui faire à cet égard. Or la cour constitutionnelle de la Côte d'Ivoire déclare un autre que Ouattara vainqueur des élections présidentielles – et au surplus, cet autre est le président sortant – et Ouattara enrage, s’engonce dans le soutien de l'ONU, de la France et de leur « communauté internationale » ; et à nouveau s’en va-t-en-guerre contre les lois de la Côte d'Ivoire et ce avec la bonne conscience manichéenne de celui qui est dans le bon droit : mais quel bon droit ? Le droit de la Côte d'Ivoire ? Ou le droit de la soi-disant « communauté internationale »? Cette question met en relief la constance d'une attitude chez Ouattara qui mérite d'être dénoncée. Au nom d'un préjugé de discrimination ethnique douteux, au nom du fait qu'il y aurait en Côte d'Ivoire la problématique discriminatoire de l'ivoirité, qui dénierait de par ses excès l'exigence et les règles d'un État de droit, Ouattara est résolu à défier l'État et son droit ; depuis une décennie sinon plus il s'est engagé dans une voie de banditisme politique, fondé sur l’usage de la force, le mépris de la loi, le refus de s'y soumettre au motif du juste droit de l'opprimé en lequel il se pose. Cette attitude est pourtant inadmissible dans le fond, dès lors que sa forme apparaît clairement. Le problème n'est pas celui de la régularité des élections dans un contexte africain où ce qui s'est passé en Côte d'Ivoire n'est qu'une banalité. Combien de dirigeants de la CEDEAO sans parler de l'Afrique tout entière, pourraient assurer d'une élection au-dessus de tout soupçon ? Les autocrates qui lèguent le pouvoir à leurs rejetons comme dans une monarchie antique au nez et à la barbe de la communauté internationale ? Non, le problème de Ouattara, la question à laquelle il doit répondre honnêtement est : «Quand se résoudra-t-il enfin à se soumettre ne serait-ce que formellement et en toute sagesse aux lois d’un pays, la Côte d'Ivoire, dont il se dit citoyen au point de vouloir en être le premier magistrat ? »
Aminou Balogoun
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