D'abord, commençons par expliquer comment :
Sans doute Kérékou est-il le premier homme politique avec lequel Yayi Boni a signé un de ces contrats inauguraux qui ont fait polémique après son élection.
Kérékou a promis de lui laisser le pouvoir à condition qu'il l'épargne et, le cas échéant, qu'il le glorifie et laisse passer sa médiocrité pour du patriotisme et de la capacité à unir les Béninois. Ce que Yayi Boni a accepté. Sans doute a-t-il respecté la première partie du contrat, lorsque son “Changement” n'a pas cru devoir s'élever au niveau moral et politique nécessaire pour demander des comptes à Kérékou sur sa gestion pourtant calamiteuse du pouvoir. Ce respect s'applique à l'abstention de Yayi Boni à publier les résultats des audits sur la gestion passée dans lesquels des dizaines de cadres du régime défunt étaient compromis. Il s’exprime aussi par la récupération de nombreux cadres et figures phares de l’ancien régime dans le nouveau. Enfin, sur instigation du président Kérékou, Yayi Boni a procédé à des arrestations plus ou moins spectaculaires, dont celle de Séfou Fagbohoun – fâché à mort avec Kérékou – est un exemple phare.
La seconde partie du contrat n'a pas été respectée, et pour cause ! Comment peut-on encenser Kérékou et dans le même élan parler de changement ? Cela constitue un paradoxe auquel Yayi Boni a été confronté et qu'il a dû résoudre par quelques subterfuges et simagrées. Le fameux livre de la non moins fameuse Rekya Madougou, publié ( s’il vous plaît… !) à Paris est un de ces coups de griffes nécessaires pour sortir de l'impasse du paradoxe. Par ailleurs, en matière d'encensement, Yayi Boni ne saurait tolérer deux capitaines dans le même bateau. Très narcissique et jaloux de son règne, Yayi Boni se veut le seul beau, le seul génie du moment ; d'où son besoin de jeter, sinon l'opprobre sur Kérékou du moins, un brin d'ombre.
Pourquoi alors Kérékou a-t-il choisi Yayi Boni comme dauphin au lieu d'un autre candidat comme Houngbédji ou Bio Tchané ? Parce que Kérékou tenait Yayi Boni pour un intrus, un novice, un naïf, quelqu'un qui n'était au courant de rien dans l'arène politique ; et donc qu'il pouvait téléguider à sa guise. Ensuite, il ne voulait pas de Houngbédji parce que pour lui le gouvernement du Bénin a toujours rimé avec l'irrationnel et la stupidité, et Me Adrien Houngbédji ne lui paraissait pas le modèle même de l'esprit irrationnel ou stupide. Sans compter que pour lui succéder, Kérékou préférait quelqu'un dont il serait certain qu'il ne compromettrait pas le caractère paisible de sa retraite. Un homme politique chevronné comme Houngbédji pouvait être piqué par la mouche de l'idée éthique et politique de compte rendu ou de responsabilité. Enfin, le dauphinat de Yayi Boni était conditionnel et hautement aléatoire. Kérékou étant aussi parallèlement engagé dans une stratégie subtile de conservation du pouvoir, ou des gens comme Yayi Boni ou Houngbédji faisaient figure à leur corps défendant de potentiel dindon de la farce –l'une des raisons pour lesquelles Kérékou a évité d’attirer dans ce guêpier un homme comme Bio Tchané. Mais la farce a tourné court. L'un des dindons potentiels est devenu lion ; l'autre, patriote et intelligent, n'est pas tombé dans le piège de Kérékou. Il s'est montré plus lièvre que dindon.
Bayo Adébayo
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