Le riz est l’une des sources d’alimentation quotidienne au Nigeria, et l’organisation de sa mise à disposition, de la culture jusque dans l’assiette du consommateur, est régie par une filière socialement, économiquement, et surtout politiquement sensible. Le jeudi 22 avril, la Nouvelle Tribune a fait état du “Blocage des exportations du riz vers le Nigeria” à partir du Bénin, et de ce que “ Le Gouvernement [béninois prenait]le dossier en main” C’est dire aussi la sensibilité économique et politique inverse que soulève la question du côté béninois. Dans un point d’opinion en réaction à la manière dont le gouvernement béninois a pris les choses en main, et publié dans le même journal, Denis Hodonou, Président du PRPB, critique la méthode Yayi de gestion du dossier ; notamment par le non-respect des procédures administratives, techniques et politiques consacrées. Ce que met en lumière la critique fort pertinente de Denis Hodonou c’est l’irrationalité de la réaction du gouvernement béninois, et in fine la précipitation politique qui, comme toujours chez Yayi Boni, a pris le dessus sur la sérénité technique et rationnelle requise. Au chapitre de cette sérénité et pour la bonne information des Béninois, il est donc utile de faire la lumière sur les raisons qui ont conduit le Nigeria à mettre un coup d’arrêt à cette importation du riz, côté béninois. En clair : Pourquoi le Nigeria Refuse de faire entrer le Riz importé du Bénin ? Cette question, nous l’espérons, peut permettre d’envisager les chances de succès des négociations politiques bilatérales et intergouvernementales susceptibles de débloquer la situation, ; une situation dont le caractère politique de part et d’autres des frontières, faut-il le rappeler, n’est pas de nature à faciliter les choses.
Lagos - Le président de l’Association nigériane des importateurs et distributeurs de riz (RIDAN), Gbadamassi Mouftaou a fait état de ce que la contrebande effrénée de marchandises à travers les frontières du Nigéria, conjuguée à l'augmentation récente de l'indice de référence pour l'importation de riz met en péril leur entreprise.
Dans une déclaration à l’Agence Nigériane de Presse (NAN) la semaine dernière, Monsieur Mouftaou a déclaré que ces facteurs sont susceptibles de conduire les importateurs à la faillite, tout comme ils risquent de mettre à mal le plan du gouvernement fédéral visant à améliorer le secteur. Le gouvernement fédéral avait proposé l'an dernier de mettre en place 17 usines de moulin à riz dans certains États de la fédération.
Il convient de rappeler que le gouvernement fédéral a récemment augmenté le niveau de référence pour l'importation de riz de 590 $, soit environ N88, 500 à 640 $ (N96, 000) tandis que les droits exigibles ont augmenté de 32%. Cela s'ajoute à l'augmentation des activités de contrebande qui menacent de freiner l'économie du pays.
Le patron de la RIDAN, a déclaré à NAN que 560, 000 tonnes de riz étuvé importés en République du Bénin en 2009 se sont retrouvés sur les marchés nigérians, ce qui a abouti à la perte de plus de 16, 3 milliards de nairas.
Selon Monsieur Mouftaou Gbadamassi, la quantité de riz de contrebande introduit au Nigeria ne cesse de croître, car rappelle-t-il, la contrebande, qui a commencé depuis 2005 a continué d'augmenter de façon astronomique.
"Aller à Sèmè et à la frontière d’Idiroko, vous pourrez voir le fourmillement d'activités de chargement de norias de véhicules avec divers produits destinés au Nigeria. C'est une économie dont tirent profit quelques personnes sur le dos des importateurs du Nigeria, et au risque de leur survie. Si les activités des contrebandiers devaient continuer sans désemparer, elles paralyseraient les activités des importateurs et conduiraient à une véritable mise à sac d’une main-d'œuvre de plus d'un million de personnes.
Une telle situation, a dit le Président de la RIDAN, pourrait entraîner une augmentation des taux de criminalité. Son association a-t-il ajouté, avait écrit aux ministères concernés, mais la situation est restée inchangée.
«Avec ces augmentations, les importateurs paient actuellement 205 $ (N30, 750) contre 190 $ (N28, 500) par tonnes plus la taxe de référence de 640 $ (N96, 000) sans oublier l’augmentation du coût du frêt et d'autres charges portuaires", a dit Monsieur Gbadamassi.
Le Président de la RIDAN a exhorté le gouvernement fédéral à harmoniser les droits sur le riz avec les pays voisins afin de décourager la contrebande. «Vous avez dû remarquer que toute augmentation des droits, droits de douane, prélèvements et taxes de référence entraîne l’augmentation de l'importation de ces produits par les ports de la République du Bénin et du Togo dans l'intention de les faire passer en contrebande sur les marchés du Nigeria, a-t-il dit.
Selon Mr Gbadamassi, une telle incohérence dans la politique crée un espace pour la fraude et donne l'occasion aux agences de sécurité de tirer indûment profit de la situation pour s'enrichir.
Une enquête sur différents marchés du riz dans la métropole de l'État de Lagos a montré que les importateurs légaux de riz ploient sous les activités illicites des trafiquants. Cette enquête montre également que les principaux marchés de daleko, Iddo et Ebuti Ero à Lagos sont plus friands du riz de contrebande de différentes marques.
A en croire le patron de la RIDAN "les contrebandiers ont presque poussé les importateurs légaux à l'extinction parce qu'ils éludent les droits et taxes et vendent à meilleur prix." Vous savez que la marge sur un sac de riz est très faible, un maximum de 150 nairas par sac. Pour ceux d'entre nous qui importent dans le pays par les ports maritimes et payent les droits, taxes et salaires, il est facile de voir que les contrebandiers sont en train de saboter l'économie.
Binason Avèkes
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Merci pour cette clarification. La question n'est pas nouvelle. Plutôt récurrente il faut dire. Obasanjo avait essayé dans le temps lors d'une épisode de baisser la tension en faisant une distinction entre les produits cultivés, fabriqués au Bénin et ceux introduits au Nigeria à travers le port Béninois. Les premiers sont censés bénéficier d'un traitement de faveur de la part du grand voisin en tout cas selon la bonne intention exprimée par le leader de l'époque. On voit qu'en filigrane, le "conflit" soulève au moins deux questions notamment, primo la nécessité d'une intégration effective du marché sous-régional (CDEAO) et deuxio l'urgence d'appeler à consommer ce que nous produisons et produire ce que nous consommons plutôt que de s'en remettre à l'exportation du pétrole ou du coton pour se nourrir...
Thomas Coffi
Rédigé par : Thomas coffi | 27 avril 2010 à 19:03