GBADJA
Feuilleton littéraire par :
Thomas C. Nouatin
Nous étions en pleine saison sèche, la grande saison sèche. Les chaleurs du mois d’avril avaient installé leur emprise sur la ville. Aux après-midi torrides succédaient des nuits qui loin d’apporter un brin de fraîcheur propice au repos, soumettaient les êtres à un inconfort à la limite du supportable.
Le matin, un soleil déjà incisif perçait les nuages, se projetait en rosaces argentées entre les feuillages du manguier, faisait ricocher ses rayons sur les toits rouillés du coté d’Adogblamè.
Lorsque je m’éveillai ce jour-là, au sortir de la dépendance de ma grand-mère, mes premiers pas me dirigèrent comme à l’accoutumée vers un empilement de parpaings, prémices d’un projet de construction en souffrance. A mon approche, un couple de mange-piments* s’envola en sifflant, décrivit un cercle au dessus de la maison avant de revenir se poser sur une branche basse du manguier. Un escabeau estropié sur lequel je prenais appui me permettait de hisser mon corps au niveau du sommet du tas de briques. Nous les enfants de la maison y avions aligné divers pots de plantes que nous prenions grand plaisir à faire pousser avec un soin méticuleux. Une vieille jarre abandonnée, une boîte de conserve vide, une timbale usagée, faisaient office de réceptacle que nous remplissions avec la terre pleine d’humus récoltée dans la demeure de Maman Sourou la rebouteuse. Un tas d’ordures qui pourrissait à longueur d’année au pied d’un cocotier stérile tout au fond de la cour de Maman Sourou, générait ce précieux compost très prisé dans tout le quartier. C’était chaque fois une joie extrême de s’apercevoir un matin que les graines de maïs, de haricots, de tomates, enfouies quelques jours plus tôt avaient germé au détour d’une nuit, pointant leurs cotylédons au-dessus de la couche de terre. A cet enchantement succédait la satisfaction de regarder les feuilles s’évaser, s’allonger et verdir dans la lumière du jour, récompense insigne aux soins que nous prenions à les arroser chaque matin avec l’eau que nous conservions dans une boîte à moteur ramassée dans la cour ; une de ces pièces mécaniques qui traînaient toujours ça et là, rebuts des dépannages que mon oncle Raji, alors apprenti mécanicien, effectuait à domicile les dimanches pour garnir ses poches de jeune homme.
Alors que j’arrosais des pieds de piment rouge, une voix m’interpella :
-Tunde independanci, Tundé mon petit mari, sur quel pied t’es-tu réveillé aujourd’hui Tundé independanci ?
C’était ma jeune tante Bora qui m’apostrophait ainsi.
Venant de l’arrière cour, une voix lança :
- Tundé independanci ! Tundé independanci !
Ayekoto le perroquet croassait ainsi en s’ébrouant, voltigeant d’une paroi à l’autre de sa cage en bambou accroché au haut d’un mur.
- Bien répondis-je. Pourquoi m’appelez-vous independanci ?
Ma question provoqua son rire. Ce rire qu’elle émettait en renversant la tête en arrière ; un rire qui allumait son regard, perlait ses joues de fossettes en donnant à son visage de jeune femme un charme enfantin que je n’ai vu que chez elle.
- Tu ne te souviens plus donc de rien maintenant ! Hier nuit, lorsque je suis venue te réveiller pour que tu ailles te coucher, tu n’arrêtais pas de murmurer independanci, independanci…
Déjà, elle s’éloignait de ses longues et vives enjambées pour vaquer à ses multiples tâches matinales avant son départ pour l’atelier de couture, me laissant songeur devant le pot où des minuscules boules de piment d’un rouge vif humidifiées par la rosée se paraient de reflets sous la lumière du jour.
Si je ne me souvenais pas d’avoir ainsi monologué la veille comme le prétendait tante Bora, je me rappelais à présent du mot independanci. Comment pourrais-je l’oublier durablement ? Il avait trotté dans mon imagination deux jours plus tôt après le départ des gendarmes. Le commandant Benseni dans son conciliabule de cet après-midi-là avec sa petite troupe sous le manguier n’arrêtait pas de ponctuer ses propos avec ce mot, provoquant après chaque phrase les hochements de tête approbateurs du sergent Bèni assis à sa droite.
Je ne puis dire le contenu exact de leur conversation, qui d’une part se tenait avec un ton de voix retenu et d’autre part se déroulait dans plusieurs langues allant alternativement du Français aux langues du nord en passant par le Fon et le Goun, lesquelles étaient plus intelligibles à mes oreilles. Mais j’avais le souvenir que Benseni en voulait à quelqu’un d’avoir fait de independanci quelque chose qui ne lui plaisait pas du tout à lui Benseni et contre laquelle il exprimait sa colère d’une voix dont il s’efforçait d’abaisser les éclats. La résonance, la cadence tonique et la musicalité de ce mot independanci que j’entendais pour la première fois l’avaient sans aucun doute, gravé dans ma mémoire et bien après la visite des gendarmes, je m’étais surpris plusieurs fois à l’énoncer à haute voix cet après-midi là.
Pendant que j’arrosais les plantes, je pris la résolution de demander à ma mère dès que j’en aurais l’occasion la signification de ce mot independanci. Tante Bora était à présent occupée à laver la vaisselle et des ustensiles de cuisine. Elle s’adonnait à cette tâche debout, le corps courbé en deux, la vaisselle posée sur une maçonnerie qui courait le long des dépendances sous les avancées de toit, faisant office de banc à toute la maisonnée. Elle accompagnait son labeur avec deux ou trois chansons dont l’une, déclamée en langue française avait une musicalité qui plaisait à mes oreilles. Il m’arrivait de fredonner par moments cet air dont je ne connaissais pourtant pas les mots sauf le nom Adèle qui revenait à plusieurs reprises. Alors qu’elle amorçait une envolée finale sur un refrain, la voix de tante Bora baissa soudainement d’un ton puis s’éteignit. Le cliquetis des assiettes émaillées et des fourchettes s’interrompit. Elle redressa le torse, rajusta son pagne à hauteur des seins et marcha en direction de la dépendance de ma grand-mère. C’est que Iyawo heviosso venait d’apparaître sur le pas de sa porte, ses lunettes noires sur les yeux, entamant ainsi sa seconde sortie matinale dans la cour. Tante Bora s’inclina devant elle, le genou droit effleurant le sol. Iyawo heviosso la bénit à voix basse et lui fit signe de se relever. Puis ce fut instantanément un défilé devant elle. De toutes les dépendances sortaient les gens de la maison, petits et grands, leurs pagnes attachés autour du cou, mâchonnant encore un cure-dent qu’ils ôtaient prestement avant de s’incliner devant Iyawo heviosso. Ma cousine Tine m’avait rejoint devant le tas de briques après avoir salué Iyawo heviosso et se mettait en devoir d’arroser ses plantes. Je terminai promptement ma tâche et allai m’incliner à mon tour devant ma grand-mère. Elle ôta ses lunettes, essuya du revers de son pagne indigo une larme qui suintait à son œil, le gauche, celui qui supportait mal les lumières un peu vives.
- Tundé Ahlo, BabaTundé*, Tundé Ahovi* Gomènou*, Tundé Atoé*….
Puis sur un ton plus amusé elle termina son chapelet d’épithètes élogieux à mon endroit:
- Tundé Independanci ! Que veut dire donc independanci, dis moi ? Voilà ce que tu disais hier nuit quand tu sommeillais pendant la séance de contes. Lorsque je te demandais ce qu’il est advenu du jumeau Sagbo, tu me répondais : independanci.
Il en était toujours ainsi pendant les nuits de grande chaleur. Une tante, mais le plus souvent ma grand-mère, nous rassemblait autour d’elle. Assis sur des nattes étendues à même le sol, nous écoutions dans un silence religieux, sa voix douce et grave égrener les récits entrecoupés de chants, fluidifiant l’âpreté des longues nuits de canicule, nous entraînant sur la pente du sommeil avant qu’une mère, une grande sœur ou une tante ne vînt nous emporter dans ses bras vers la couche nocturne. Pour tester l’état de son auditoire, ma grand-mère lançait soudain à l’un d’entre nous une devinette ou une question touchant au conte en cours :
Tine tu m’écoutes ?
- Oui Dada,
- Un jeune homme va s’initier au Fâ* et insulte le Fâtonon* ?
- Il est en bien mauvaise posture pour obtenir le Fâ.
- Un vieillard à la barbe d’un blanc immaculé conduit sa pirogue sur le lac Nokoué ?
- La mousse de savon
- Tundé Ahlo dors-tu ?
- Non Dada
- Qu’a fait Sagbo au retour de la maison des Yèhoué
- Il a sûrement regardé en arrière.
- Qu’a-t-il fait d’autre ?
- Il s’est mis à chanter à tue-tête ce qu’il venait de voir dans la maison des Yéhoué
- Chante que nous écoutions :
« Zinsou, Sagbo, Zinsa Eéééh ! J’ai vu quelque chose ! Mange-t-on avec les oreilles ? J’ai vu quelque chose ! Mange-t-on avec le nez ? J’ai vu quelque chose ! Mange-t-on avec les yeux ? J’ai vu quelque chose ! Zinsou, sagbo, Zinsa Eéééh ! J’ai vu quelque chose !... »
- Aurait-t-il dû le faire ?
- Non Dada.
- Pourquoi n’aurait-il pas dû le faire ?
- Parce que son frère jumeau et lui avaient fait la promesse de ne révéler à quiconque ce qu’ils avaient vu et de ne pas regarder en arrière.
- Que lui est-il arrivé ?
- Il a été transformé en citronnier.
- Comment a-t-on su qu’il est devenu un arbre?
- Un chasseur a annoncé au village le soir qu’il a vu dans la forêt un grand citronnier qui n’était pas là le matin à son passage et dans les branches desquelles il a trouvé des habits appartenant à Sagbo.
- Quand Zinsou a-t-il découvert qu’il avait perdu son frère en chemin.
- Seulement à son arrivée au village.
- Pourquoi ne s’en est-il pas aperçu plus tôt ?
- Parce qu’il ne voulait pas regarder en arrière.
- Laure, est-ce que l’on peut encore entendre la chanson de Sagbo aujourd’hui ?
- Oui, par les nuits calmes, le vent, lorsqu’il passe entre les branches du citronnier fait résonner le chant de Sagbo dans le village de Hessa.
- Que nous enseigne ce conte ?
- ……
Souvent c’était le silence qui répondait à Iyawo hêviosso car bien avant de parvenir à ce point de l’interrogatoire, sa voix ne recevait d’autre écho que le ronflement de l’interpellé et les rires amusés d’une dizaine d’enfants assoupis.
***
J’attendis le milieu de la matinée à l’heure où les clients se faisaient rares avant la grande affluence de midi pour questionner ma mère au sujet de Independanci.
- Tundé Etêwutu* ! Toujours entrain de demander pourquoi ceci, pourquoi cela, que veut dire ceci, que veut dire cela. Où as-tu entendu ce mot independanci?
- C’est le commandant qui l’a prononcé hier.
- Independanci ! Tu sais que je n’ai pas été à l’école. Le peu que je connais de Francé Gbé* je l’ai appris par ci par là. Je crois que c’est Ablodé qu’on appelle independanci.
- Ablodé ! Qu’est-ce que c’est ?
- Tu ne connais pas Ablodé ?
- Non.
- Attends midi. Quand l’apprenti de ton oncle ira acheter du pétrole à la station Agip, tu l’accompagneras. Arrivé à Agip, lève la tête et regarde le ciel au-dessus de la maison des gendarmes. Tu apercevras Ablodé.
Mon oncle bijoutier avait l’habitude d’envoyer l’un ou l’autre de ses apprentis approvisionner l’atelier en pétrole lampant pendant la pause du milieu de la journée. C’était l’une des occasions dont je profitais pour découvrir ce côté du quartier. A l’époque. Il m’était formellement interdit de me rendre dans ces parages sans être accompagné par un « grand » à cause de la proximité redoutable de la route goudronnée où circulaient les automobiles et les motocyclettes. Le plus souvent, cette mission incombait à Yéma, le plus jeune des deux apprentis. Yéma était à l’époque un adolescent qui avait l’air d’être toujours perdu dans ses pensées. Il fallait s’y prendre à plusieurs reprises pour capter son attention. Ceux qui ne le connaissaient pas bien pensaient qu’il était mal entendant
Assis à côté de l’étalage de ma mère, je guettai midi avec impatience. Elle s’annonça par la voix de la petite vendeuse de caramels à la noix de coco « Tofi au lait ! Au lait Tofi ! Lait dodo wè* ». Elle venait par la route de la gare, promenant sa marchandise dans un plateau en aluminium tenu en équilibre sur la tête. Elle portait, enroulé autour du bras gauche un spécimen constitué d’un long chapelet de caramels noués dans une bande de film alimentaire. Son arrivée à hauteur du carrefour coïncida avec les carillons de la cathédrale Saint-Joseph, Presque aussitôt comme échappés d’une volière, les enfants de la classe coranique jaillirent de l’atelier de confection de Baba Azouz, maître couturier de son état, grand érudit du livre sacré et père d’Azouz, un petit copain du quartier.
Les enfants se dispersèrent dans les diverses directions qui partaient de la place. Une bonne vingtaine d’entre eux s’agglutinèrent autour de la petite vendeuse de toffies tel un essaim autour d’une ruche, tendant des pièces de monnaie et criant à qui mieux , mieux : « Vends-moi du toffie, vends-moi du toffie,»
N’était-ce la crainte de manquer le départ de Yebou pour Agip, j’aurais certainement approché Dame initiée pour solliciter une pièce de cinq francs qui m’aurait permis de me jeter dans la mêlée afin de m’offrir ces bonbons concoctés à la noix de coco dont les deux variétés nous soumettaient à un dilemme lorsqu’il s’agissait de faire un choix ; l’une était tendre, onctueuse, crémeuse, fondante sous la langue, l’autre plus friable, plus sèche, s’effritait délicieusement sous le palais.
Yéma sortit peu après de la maison et obliqua en direction de la route de la gendarmerie. Je me levai d’un bond et lui emboîtai le pas à son grand étonnement. « Je t’accompagne à Agip pour voir independanci. Ma mère m’a dit que c’est Ablodé que l’on appelle independanci » lui dis-je.
« Tu sais ce qu’est Ablodé toi ? Moi je ne sais pas »
« Bien sûr que je connais Ablodé, je le vois tous les jours » répondit Yéma.
Nous croisâmes sur le chemin des files d’élèves en tenue kaki qui revenaient au logis pour la pause de la mi-journée.
Yéma me désigna discrètement du doigt deux jeunes collégiennes qui cheminaient, entourées d’une demi-douzaine de garçons et me murmura à l’oreille :
- Voilà les filles à la peau de lune qui rentrent chez elles
- Pourquoi les appelle-t-on filles à la peau de lune ?
- Ce sont les garçons de El-hadj Bakar qui les ont surnommées ainsi
- Fofo* Raji et tonton* Ballot les appellent aussi filles à la peau de lune.
- Mais pourquoi peau de lune ?
- Ils disent que lorsqu’elles sortent le jour, le soleil disparaît. Ils ne le voient plus. C’est pour cela qu’on les appelle aussi Ton bonou houé chi*.
Plus d’une fois j’avais entendu mes jeunes oncles évoquer ces deux adolescentes dans leurs conversations. L’une d’entre elles était presque aussi grande que Tante Bora, avec le visage arborant un sourire épanoui. L’autre n’était en vérité pas de petite taille, mais à côté de sa compagne, elle paraissait en comparaison plus courte. Son visage avait une expression plus sévère, presque hermétique.
Midi amenait sur l’esplanade de la station Agip un afflux d’automobiles et de motos vrombissant et dégazant une fumée suffocante. Surchauffé par le soleil, le macadam qui recouvrait l’esplanade me brûlait la plante des pieds. Nous nous dirigeâmes vers une colonne à pétrole. Tournant le regard vers l’espace au-dessus de l’enceinte de la gendarmerie, j’aperçus une espèce de pieu peint en blanc qui s’élevait vers le ciel. Il était semblable à celui à l’extrémité duquel l’acrobate Sèvè exécutait ces prouesses sur la place de la gare les dimanches de fête. A son sommet, flottait un tissu ou se juxtaposaient les teintes légume cru, œuf de poule et rouge.
- C’est ça independanci m’exclamai-je en désignant la toile multicolore dansant au vent.
Yéma semblait ne pas m’entendre.
- Est-ce ce tissu là-haut qu’on appelle Independanci ? C’est avec lui que des gens font quelque chose qui fâche le commandant Benseni ?criai-je.
- Hein ! Que dis-tu ? ça c’est Ablodé.
- Ma mère m’a dit qu’on l’appelle aussi independanci.
Le pompiste qui finissait de remplir le bidon de pétrole émit un rire et dit:
- Non ! ça c’est le drapeau que tu vois là-haut.
Sa réponse me rendit perplexe. Je ne savais plus où j’en étais avec ce mot independanci. Nous reprîmes le chemin du retour.
- Pourquoi Ablodé porte-il ces trois couleurs m’enquis-je auprès de Yéma?
- …
- Pourquoi Ablodé porte-il ces trois couleurs ? criai-je.
- Hein ? Ah ! je ne sais pas. Quand j’avais ton âge, il avait d’autres couleurs. Je me souviens qu’il y avait du blanc dedans.
- Les couleurs vont-elles encore changer un jour ?
- Je ne sais pas. Elles peuvent changer comme elles peuvent ne pas changer. Qui sait ?
A cette heure-là de la journée, l’étalage de Dame initiée était pris d’assaut par une clientèle composée d’élèves, d’ouvriers, de maçons œuvrant sur les chantiers du quartier, tous venant acquérir le nécessaire pour leur repas de midi.
Je profitai d’un moment de répit entre le passage de deux chalands pour faire à ma mère le compte rendu de ma petite expédition.
- J’ai vu Ablodé. Celui qui vend du pétrole m’a dit que c’est le drapeau et non independanci.
- Tunde Etêwutu ! Je ne sais quoi te dire d’autre. Tu sais que je connais très peu Francé gbé*. Tu questionneras ton oncle Robert à son retour du lycée Ballot à la fin de la semaine.
Mon oncle Robert que nous nommions encore Tonton Ballot était interne au lycée situé non loin de la gare ferroviaire.
- Cela fait longtemps à attendre avant de savoir, me lamentai-je, désappointé.
Dame initiée ne m’écoutait plus, absorbée par le service d’un groupe d’apprentis mécaniciens couverts de cambouis.
Quelques instants plus tard, ma cousine Tine de retour de l’école enfantine vint saluer ma mère avant de rentrer à la maison. Comme si elle venait de réaliser soudain qu’elle n’avait pas fourni de réponse à ma dernière observation, ma mère, songeuse suivit un instant des yeux Tine qui s’éloignait en direction du portail d’entrée. Elle se tourna vers moi et dit :
- Tundé, aimerais-tu accompagner Tine chez Papa Rey cet après-midi ? Là-bas le maître te dira ce qu’est independanci.
Cette proposition souleva d’emblée en moi un enthousiasme débordant et j’acquiesçai sans hésiter.
- Dans ce cas, poursuivit ma mère, rentre à la maison demander à manger à Dada et ne traîne pas le repas en longueur comme tu en as l’habitude. Après tu changes tes habits et tu partiras avec Tine chez Papa Rey.
- Pourquoi appelle-t-on l’école de Tine Chez Papa Rey ?
- Parce que c’est Papa Rey qui l’a construite sur un terrain lui appartenant en face de son habitation.
- J’entends aussi les grandes personnes appeler l’école de Tine Tron Houé gbé ma gbo djè. Quelle est la raison de cette appellation ?
- Tu veux en connaître la raison ? Tu pourras aussi questionner le maître à ce sujet cet après-midi. Va vite manger si tu veux accompagner Tine à l’école à deux heures répondit ma mère en riant.
BabaTunde : prénom donné à un enfant que les oracles ont révélé comme étant la réincarnation d’un aïeul.
Ahovi : prince
Ahlo : Dynamique, déluré
Gomènou : originaire de Gomè, région du Sud-ouest du Bénin, lieu d’origine de plusieurs clans royaux du sud du Bénin.
Etêwutu : Pourquoi
Fofo : désignation de respect d’un grand-frère, d’un aîné mâle
Tonton : Désgnation affectueuse de l’oncle
Ton bonou houé chi* : phénomène dont l’apparition éclipse le soleil.
Fa : oracle qui renseigne sur le destin
Fatonon : prêtre du Fa.
Tofi : caramel fait à partir de noix de coco
Francé Gbé : Langue française
Lait dodo wè : Plein de lait, rien que du lait
Tron Houé gbé ma gbo djè : Sors de la maison afin que je me repose
Thomas C. Nouatin
Copyright, Blaise APLOGAN, 2007, © Bienvenu sur Babilown
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