Mon Idéo va, court, vole et tombe sur...:
Fraudes et violences électorales en Afrique
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Quand on observe ce qui se passe au Nigeria, avec des élections hantées par des violences à répétition, des tueries à la pelle, et une furia irrésistible de la fraude, on s'interroge sur le sens de l’option démocratique. C’est comme si des gens choisissaient délibérément un théâtre où la pièce implique de vrais meurtres auxquels on sacrifie ; acteurs et spectateurs entrant dans le jeu barbare avec passion, et prenant la chose au premier degré. Et pourtant – spectateurs et acteurs – nul n’a été forcé à choisir cette pièce insolite !
La politique a un rapport intime avec le théâtre, l’art de donner à croire, de produire des apparences trompeuses. Dans l’histoire des Etats africains on a connu cette déclinaison théâtrale de l’ordre politique, qui sous les dehors d’un changement radical d’époque a substitué le même au même en plus subtil et parfois plus violent. Ainsi en est-il de la
colonisation et de l’indépendance. Le soleil des indépendances est un astre de représentation. Au lever du rideau apparaît le néo-colonialisme. L’ordre politique et les rapports de force ont toujours cherché à persévérer dans leur être. C’est ce qui se passe aujourd’hui avec la démocratie. En principe, la démocratie est le contraire de l'autocratie ou de la confiscation ethnocentrique du pouvoir. Mais en Afrique, on sait concilier les deux. Au moyen du théâtre. A coup de milliards, on met en branle une machine électorale coûteuse, on installe le décor démocratique, on convoque tout un parterre d’institutions, mais tout cela sur fond de fraude massive, et on aboutit à des élections plus ou moins savamment truquées. Bref, on emprunte à la démocratie son décorum et son apparence, mais on garde l’arme fatale des autocraties. A quoi ça sert sous nos tristes tropiques où manquent l’eau, l'électricité et de quoi vivre décemment de dépenser tant d'argent pour le théâtre ? Est-ce une manière de mettre la culture au service du développement ?
Si la démocratisation en Afrique visait à enrayer les violences inhérentes aux coups d’Etat qui étaient la voie royale d’accès au pouvoir, et à assurer l’alternance politique en toute équité, on ne peut pas dire que ces buts soient atteints. La fraude qui caractérise les élections génère tout autant de la violence. Quant à l’alternance, elle est sérieusement mise à mal par le but même des fraudes qui est la confiscation du pouvoir. La démocratisation voulait faire oublier le spectre désastreux des coups d’Etat, hélas, par le détour perfide des fraudes électorales, elle s’enlise dans l’ère du coup d’Etat permanent. Pendant combien de temps encore y resterait-elle piégée ?
Au Bénin, pays où la démocratie avance dans une paix relative, nul ne peut mettre la main au feu quant à l’honnêteté absolue des élections. Dans l’ère du Renouveau démocratique, des soupçons de fraude avérées ont marqué les élections ; certaines ayant même un caractère massif et organisé. Le seul Président au-dessus de tout soupçon sous le rapport de la fraude électorale est peut-être le Président Soglo. Rare Président à avoir organisé et perdu une élection. Combien de ses pairs africains... ou béninois peuvent en dire autant ?
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Eloi Goutchili
Copyight, Blaise APLOGAN, 2007
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