Lettre à Pancrace sur PIK et Roger Gbégnonvi, le Fayawɔ de la Nouvelle Conscience |
Au Bénin par exemple, nombre de ces causeurs excités, se refroidiraient illico si le bon sens venait à imposer, au lieu de la langue du Blanc où chacun joue à faire son petit numéro à la noix, nos langues nationales telles que le yoruba, le bô, le bariba ou le fon, qui deviendraient alors nos véhicules d'écriture et de pensée. Alors on verra comment le nombre de ces causeurs se réduirait comme peau de chagrin ; on verra qui veut bien parler et pour dire quoi ; on verra, pour parler comme Bourdieu, ce que parler veut dire… Au contraire, mon cher Pancrace, cette problématique de la responsabilité me donne l'occasion de rebondir au-delà de ta boutade sur les manies de nos chroniqueurs patentés. Et là-dessus une question s'impose. Pourquoi, dans sa dernière chronique Roger Gbégnonvi donne le bon Dieu sans confession à Pascal Irénée Koupaki en faisant passer en contrebande sont fumeux concept de « Nouvelle conscience » ? La manœuvre est d'autant plus grossière que tout le propos de la chronique est construit autour de la critique diabolisante de Yayi Boni. Or sur 10 ans de pouvoir de Yayi Boni, de sa victoire plébiscite de 2006 jusqu’au holdup électoral crapuleux de 2011 et au-delà, le ci-devant Pascal Irénée Koupaki aura servi constamment et assidûment son maître durant huit ans bien sonnés. Comme il vient de le faire dans une interview sur une chaîne de télévision de la place de Cotonou, l'ancien « premier ministre », sortant de son silence de mort dans une esquisse préparatoire à sa candidature à l’élection présidentielle, peut se livrer à une litanie de dénégations de ses responsabilités dans la série impressionnante de scandales qui ont secoué le gouvernement dont il était l'un des acteurs clés ; sa stratégie de « n'avouez-jamais » peut bien avoir été servie par l'apparence de sérénité et de sérieux qui caractérisent son style et son langage gestuel. Mais le peuple béninois n'est ni dupe ni amnésique ; et il sait la fidélité indéfectible de Pascal Irénée Koupaki à l’égard de Yayi Boni ; il sait qu'il y a quelque chose en politique qu’on appelle solidarité gouvernementale, qui lui impose d'assumer les responsabilités des faits et méfaits du gouvernement dont il fut le premier ministre. Si Pascal Irénée Koupaki n'a rien à se reprocher et peut, comme il le fait, argumenter son innocence, qu'est-ce qui empêche Yayi Boni de faire valoir la même protestation d’innocence avec les mêmes arguments bateaux ? À terme, comme c'est souvent le cas au Bénin, nous aurons des crimes constatables, mais aucun criminel. La nouvelle conscience de Pascal Irénée Koupaki l'exonère-t-il de sa responsabilité dans la pourriture du poisson que stigmatise Roger Gbégnonvi ? Pourquoi assumer ses responsabilités est-il si pénible au Béninois, qui préfère volontiers adopter la tactique du chat qui recouvre instinctivement son excrément de litière pour ne pas avoir à en sentir l'odeur ? Pourquoi quand vient l'heure d'assumer ses responsabilités, l'arène politique béninoise des acteurs et profiteurs en tous genres devient-elle tout à coup si déserte ? Et ce vice malheureusement n'est l'apanage d'aucune catégorie ; il est la seconde nature de tous : intellectuels plus ou moins douteux, politiques infâmes, c'est-à-dire une venimeuse engeance de laveurs de chèque, de flibustiers sans foi ni loi qui abusent des faiblesses de l'État simiesque hérité du colonialisme dont nous n'avons aucune idée de l'essence. Comme tu le vois, mon cher Pancrace, à l’instar de tes questions sérieuses, même une boutade de ta part est susceptible de donner lieu à une prise de conscience des tares et travers du système politique béninois et de ses acteurs. On ne stigmatisera jamais assez toutes les voies nombreuses et variées que prend chez le Béninois le refus cynique de faire face à sa responsabilité et de l’assumer comme cela se doit. Cette ligne de force est sans concession car il n’y a pas d’avancée sans mémoire ni responsabilité. On ne peut pas se remettre à bâtir à l’identique une maison qui s’est écroulée si on ne fait pas l’inventaire des failles et points faibles qui sont à l’origine de son écroulement. A moins de prendre le parti stupide de tourner en rond. Mais, comme tu en conviens, cher ami, le peuple de notre pays le Bénin a trop souffert pour se payer le luxe de décennie en décennie de se faire tourner en bourrique par une poignée de profiteurs héréditaires qui font bombance sur son dos. Cher ami, merci pour ta savoureuse boutade qui n’est pas tombée dans l ‘oreille d’un sourd, et plein succès à ta mission à New Dehli ! Toute mon amitié Binason Avèkes |
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