Contrairement à l’habitude qu’ont les faux régimes démocratique africains, où les élections sont à la fois une promenade de santé et une représentation théâtrale grandeur nature, les élections nigérianes du 28 mars prochain menacent d’être sans théâtre, et donc de ne pas être une promenade de santé pour le pouvoir en place. C’est pour cela que l’actuel président, Monsieur Goodluck Jonathan et son parti, le PDP, le dos au mur, multiplient les intrigues, et ne sont pas avares d’initiatives plus loufoques les unes que les autres, parfois impensables sous d’autres cieux. Tel a été le cas du report des élections de six semaines à seulement deux semaines de la date initialement prévue. Maintenant, l’une des lubies de Jonathan et de ses apprentis sorciers est de limoger le Président de la Commission électorale, Monsieur Attahiru Jega. Le crime de ce Monsieur ? C’est de vouloir bien faire son travail, afin de minimiser les fraudes. Pour cela, Mr Jega se bat pour que les cartes d’électeurs informatisées introduites cette saison soient effectivement utilisées, conformément à ce qui a été jusque-là le vœu des parties prenantes de l’élection, y compris M Jonathan et les siens. Mais seulement voilà, c’était au temps où Jonathan, sûr de lui, et ne croyant pas qu’un président sortant pourrait être détrôné par un candidat de l’opposition ; temps où il n’avait pas pris la mesure du désir de changement des Nigérians, et de la montée en puissance de l’opposition APC du Général Buhari, alias GMB. Mais le vent électoral ayant tourné en faveur de l’opposition, plus effrayés par le spectre de GMB, chevalier hors pair de la lutte contre la corruption qui est la grosse plaie du Nigeria, que par la perte des élections elles-mêmes, Jonathan et son parti ne veulent plus entendre parler des cartes d'électeur personnelles informatisées. Pourquoi ? eh bien, parce que ces cartes seront un formidable barrage contre l’océan de fraude nécessaire à sa victoire. Du coup, la dimension théâtrale de l’exercice électoral, si caractéristique des fausses démocraties qui pullulent en Afrique, risque d’être hors jeu. Et cela donne l’insomnie à Jonathan et à ses apprentis sorciers. Voici pourquoi, à moins de deux semaines de la date prévue, dos au mur, Jonathan et les siens ont décidé de passer à l’acte d’une menace jusque-là officiellement démentie, y compris par le président de la république lui-même, mais qui revient sans cesse au devant de l’actualité. Selon le plan élaboré pour réaliser ce forfait impensable ailleurs, et qui a été le même ayant servi à opérer le report des élections, des groupes de pression sont en train de voir le jour et continueront de le faire à un rythme croissant un peu partout sur le territoire national, qui a travers manifestations et protestations plus ou moins violentes, demanderont le limogeage de Monsieur Jega. Selon des sources citées par le site Sahara Reporters, la bagatelle de 200 millions de dollars aurait été allouée par Jonathan à chacune des six zones géopolitiques du pays pour organiser ces protestation tarifées. A la suite de quoi, dans quelques jours, faisant mine de répondre démocratiquement à la préoccupation de ces manifestants vertueux, Jonathan leur donnerait raison en limogeant le Président contesté de l’INEC -- on se demande sur quelle base et de quel droit se prévaut cette contestation -- et nommerait un homme à sa botte à la tête de l’INEC qui aura, entre autres choses, pour tâche de renvoyer au musée de la fraude électorale les cartes électorales informatisées qui terrorisent Jonathan et l’empêchent de dormir du sommeil du juste. Ce faisant, il ouvrirait la voie à la résurrection du théâtre électoral sans lequel Jonathan désespérait de réaliser son rêve de réélection, avec la hantise de se voir succéder par l’intransigeant GMB. Tels sont les dernières intrigues du suspense électoral nigérian. Changer l’arbitre à la quasi fin d’un match et le remplacer par un comparse, la chose est impensable, mais fort possible, car nous sommes au Nigeria. La violence électorale, qu’elle soit symbolique ou physique, gagne toujours à être graduelle et graduée ; ainsi parvient-on à la faire accepter par les masses. Gageons que l’intelligence du peuple nigérian saura lui éviter ces manipulations de dernière heure. Alan Basilegpo |
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