Loin de se justifier par les raisons officielles avancées, le report des élections au Nigeria n’était ni un hasard ni dénué d’arrière pensées politiciennes. En vérité, Jonathan et les siens vivent dans la hantise de se voir succéder par le Général Buhari. Passe encore pour eux l’idée de céder le pouvoir mais il ont une sainte horreur de le céder au Général Buhari, qui a la réputation d’être un intraitable chevalier de la lutte contre la corruption. Mais Jonathan, et son entourage, notamment la Ministre du Pétrole, sont à l’origine de détournement du denier public portant sur des centaines de millions de dollars de l’argent du pétrole. Une bonne partie de cette cagnotte est en train d’être utilisée actuellement pour corrompre à tout va, acheter des consciences et organiser la fraude électorale. C’est à court de temps dans cette organisation, et dans la hantise d’une victoire annoncée du Général Buhari aux élections initialement prévues pour le 14 février, que le pouvoir a tourné casaque et ferraillé pour obtenir le report des élections, report qu’il a ensuite mis au compte de l’impréparation de l’INEC ainsi que du problème de sécurité que pose le groupe terroriste Boko haram.
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Au fur et à mesure que la date fatidique du 28 mars approche, un coin de voile se lève sur les intrigues multiples de Jonathan et de son équipe restreinte pour ne pas laisser le pouvoir au Général Buhari, érigée en bête noire de son régime. Deux options complémentaires sont en concurrence. La première est de frauder les élections « de manière décente», comme l’expression en découle de l’entourage même de Jonathan. Cela veut dire mettre en place un système de fraude et de légitimation sociopolitique qui passe la rampe et apparaisse un tant soi peu crédible. La méthode a été appliquée dans l’élection du gouverneur PDP de l’Etat d’Ekiti en novembre dernier. Or quelques semaines avant les élections présidentielle du 14 février, la fraude d’Ekiti a été révélée par la presse, à la fois dans ses méthodes et dans ses instigateurs. Cette malversation locale qui devait servir de modèle à la fraude électorale à l’échelle nationale a terminé en eau de boudin, et le pouvoir pris au dépourvu a été obligé de changer son fusil d’épaule. D’où le report en catastrophe des élections. Le temps de revoir la machinerie de la fraude, et de mettre au point de nouvelles méthodes qui abuseront la vigilance de l’opposition et de la société civile. Dans la mesure où dans le fond, c’est moins le départ du pouvoir qui taraude Jonathan que l’idée de le remettre aux mains du Général Buhari qui a promis de faire rendre gorge aux voleurs de la nation qui sont légion dans son gouvernement, Jonathan privilégie une deuxième option de sortie dite l’option « d’atterrissement en douceur. » Il s’agit de la formation d’un gouvernement intérimaire. Le motif d’un tel gouvernement est que le Nigeria ne serait pas en mesure d’organiser une élection présidentielle actuellement en raison de déflagration nationale que cela pourrait causer au regard de la situation aggravante de la menace sécuritaire posée par le groupe terroriste Boko haram. A cet effet, Jonathan a essayé de gagner à son idée quelques figures régionales du pays. Il a d’abord pris langue avec l’ancien dictateur, le Général Ibrahim Babanguida, avec lequel il est coauteur de l’idée du gouvernement national intérimaire. Bien qu’étant et peut-être parce qu’étant du Nord, le Général Ibrahim Badamosi Babanguida dit IBB qui est considéré comme l’un des dirigeants les plus corrompus de l’histoire du pays, a de bonnes raisons de se méfier de l’éventuelle arrivée au pouvoir du Général Buhari. Outre la question de la corruption qui n’apporte pas de paix à sa conscience, il y a aussi le fait que ce fut lui qui renversa le Général Buhari dans un coup d’Etat mémorable, pour lequel il craint le cas échéant une vengeance de son frère d’arme du Nord dont il est tout le contraire éthique et politique. IBB, en intelligence avec Jonathan a approché par deux fois le leader national de l’opposition l’ex-gouverneur de l’État de Lagos, Monsieur Bola Tinubu. Pour le corrompre, le retourner, lui faire avaler ses vomissures, comme les politiciens indûment et scandaleusement enrichis prennent un malin plaisir à le faire faire à leurs semblables. Mais Monsieur Tinubu, scandalisé a rejeté l’offre. La scène se passait à Lagos avant le report. Après le report, une autre rencontre eut lieu entre IBB et Tinubu a Abuja cette fois-ci, sur le même thème. Et, alors même que la présence de Jonathan n’était pas prévue, celui-ci aboula en pleine nuit pour appuyer à coup de promesse de centaine de millions de dollars et de la proposition du poste de Vice président dans le gouvernement intérimaire auquel le duo corrupteur appelait de tous ses vœux. La présidence de ce gouvernement devant, comme de bien entendu, échoir à une personnalité nordique en vue. Mais Tinubu tint bon, et rejeta ce sordide marché. Raison pour laquelle le pouvoir a lancé une campagne de dénigrement à son encontre, l’accusant de tous les noms et de toutes sortes de plans machiavéliques sans consistance légale, comme par exemple le fait qu’il aurait passé un pacte avec le candidat à la vice présidence de son parti, M Yemi Osinbajo, pour que celui-ci se retirât en sa faveur si l’APC remportait les élections. L’option du gouvernement intérimaire peut aussi faire place à une transmission du pouvoir à une tierce autorité dans l’hypothèses d’une crise ou de troubles collatéraux plus ou moins provoqués. Un schéma qui ne manque pas de précédent dans l’histoire du Nigeria. Tel fut le cas en effet dans la Première République quand le pouvoir fut dévolu au sénateur Nwafor Orizu en l'absence de l'ancien président Nnamdi Azikiwe. Dans ce scénario, en 1966, les dirigeants civils élus ont dû remettre volontairement le pouvoir à l'armée. Le refus de Monsieur Bola Tinubu de jouer le sale jeu que lui proposait Jonathan et ses comparses a visiblement provoqué la mise en veilleuse de l’option du gouvernement d’Intérim National. Pour lors, l’attention de Jonathan s’est portée à nouveau sur l’option de la fraude décente aux élections. Raison pour laquelle, le PDP remue ciel et terre pour faire partir le Président de l’INEC, le Professeur Attahiru Jega, jugé trop honnête pour jouer le jeu de la fraude. Alan Basilegpo
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