De plus, à l’instar du chef de l’Etat qui en donne crânement l’exemple au sommet, ils s’accaparent sans états d’âme des biens et institutions publics qu’ils utilisent comme un apanage, un patrimoine, et dont il excluent de la jouissance ceux qui ne sont pas de leur cour ou de leur discours et qui bien souvent se trouvent appartenir non seulement aux partis opposés mais aussi -- et c’est là le plus grave -- aux régions ou ethnies stigmatisées comme opposées aux leurs. Mais cette habitude qui est devenue une seconde nature de la vie politique nationale, l’essence de sa motivation, est scandaleuse, déviante et criminelle ; l’impunité qui la sous-tend est la raison de sa pérennité et de sa naturalisation. Elle est définitivement dangereuse parce que tout le monde a fini par comprendre que tel est l’enjeu exclusif de l’accession au pouvoir, telle est la motivation de l’engagement en politique : la politique sous nos cieux est l’engagement dans le vol sécurisé, léonin, l’insolence kleptocratique. L’éloge royal du crime social et économique. Et tout le monde court vers ce but infâme. Même ceux qui critiquent les voleurs au pouvoir ne le font pas en tout bien tout honneur mais parce qu’ils piaffent et bavent d’impatience de leur emboiter le pas, de prendre leur place pour faire la même chose : voler, piller et s’accaparer des ressources nationales comme d’un patrimoine familial. C’est de là que vient la corruption dans toute la société. Car les pouvoirs publics et ceux qui en sont garants au sommet de l’État sont, par vocation sacrée, censés donner le bon exemple pour la multitude. Au lieu de quoi, ils détournent, s’accaparent des biens publics, pillent, violent et volent en toute insolence et impunité. Comment veut-on après qu’un petit policier ou un douanier perdu quelque part sur une route frontalière ne profite lui aussi de sa situation pour se garnir les poches ? Comment veut-on qu’un chef de service n’embauche pas sur la base de concours frauduleux ? Comment veut-on qu’un comptable d’une société ne disparaisse pas avec la caisse de sa société ? Comment veut-on qu’un caissier du trésor ne falsifie les souches du carnet de caisse pour détourner des millions ? Comment veut-on qu’un enseignant ou un instituteur dévoyé ne couche pas avec son élève adolescente ou son étudiante afin d’assurer son passage ? Voilà là où nous en sommes. Et telle est l’origine de la Corruption chez nous. La disposition à voler, à détourner, à faire ce qu’on appelle en fon ahizi n’est pas l’apanage des Africains. Mais la particularité africaine est que cette disposition trouve un terrain fertile d’enracinement qui est la royale impunité dans laquelle elle s’épanouit. Tout le monde sait que les moutons broutent de l’herbe. Mais si la pelouse de la place publique doit être préservée et que le berger lui-même se permet de la sarcler, comment veut-on que les moutons n’en broutent pas l’herbe ? Dr. Zéphyrin Aklassato |
Commentaires
Vous pouvez suivre cette conversation en vous abonnant au flux des commentaires de cette note.