Pour pronostiquer ce qui va se passer bientôt au Nigeria, le premier principe d’analyse c’est que le président en exercice en Afrique ne perd jamais les élections. Donc, à l'instar de l'évangéliste Yayi Boni qu’il était venu soutenir en 2011 lors du holdup électoral de triste mémoire, en enjoignant aux Béninois de rester cois sous prétexte qu'il ne voulait pas de guerre aux portes de son pays, Jonathan va s'appliquer le principe ci-dessus énoncé, au mépris de la vérité des urnes. En effet, comme au Bénin en 2011, la volonté du peuple nigérian va majoritairement du côté du changement. Les Nigérians aspirent à tourner la page Jonathan, caractérisée par la corruption l'impunité, la misère et l'insécurité. La manipulation et le mensonge ont aussi le vent en poupe. Car le pouvoir à coups de milliards de dollars, corrompt, et diffuse toutes sortes de mensonges et d’inepties, et se moque du bon sens du citoyen moyen. Il manipule sans vergogne les émotions religieuses, et les considérations religieuses se substituent au débat d’idées. Les Nigérians sont invités à se nourrir du rang de première économie de l'Afrique, rang obtenu par contorsion des chiffres, et qui ne dit rien de la grande majorité qui, selon un rapport de la banque mondiale, vit dans la misère. |
Donc, comme en 2011 au Bénin, malgré le fait que l'opposition a fait un sans-faute pour optimiser ses chances d'émerger en tête du choix des électeurs nigérians, malgré le poids des évidences qui accablent Jonathan--pauvreté, électricité plus que jamais épileptique, insécurité à tous les étages, terrorisme, kidnapping, Boko haram, etc.,--eh bien il y a de fortes chances que le président sortant, loin de sortir, fasse un passage en force comme naguère son collègue et coreligionnaire Yayi le fit en mars 2011 au Bénin. Ce qu'on a appelé le hold-up électoral de ce temps-là. Le principe du hold-up à venir de Jonathan se veut ostensiblement basé sur le clash idéologique de la double opposition régionale et religieuse : les sudistes contre les nordistes, les chrétiens contre les musulmans. Même si tous les sudistes--loin s'en faut--ne sont pas dans son bateau, même si tous les chrétiens ne sont pas sudistes, Jonathan s'en moque comme d'une guigne. Comme dans tous les passages en force, il a seulement besoin de la façade du discours et des rapports apparents. Au total, Jonathan va donc passer en force, parce qu’un Président africain sortant ne perd pas les élections. Et parce qu’en tant que représentant de ce sud-sud pétrolier, il n’entend pas évacuer le plancher sans que les siens aient le sentiment de satiété politique et matériel du pouvoir détenu par l’un des leurs. Et en raison de ce parti-pris aveugle, les Nigérians notamment les nordiques vont entrer en révolte comme ce fut le cas quatre ans auparavant avec on s'en souvient hélas plus de 800 morts. Cette fois-ci, les morts risquent de se compter par milliers, et les dégâts matériels en milliards de nairas. Mais l'ambiance infernale de morts, de tueries et de dégâts matériels ne dépareillera pas dans le chaos actuel instauré par Boko haram. L'un des usages du laisser-aller du pouvoir à l'égard de ce groupe terroriste ne réside-t-il pas dans la volonté subtile d'utiliser le climat chaotique régnant dans le pays depuis plusieurs mois pour amortir le grand carnage à venir des élections, de manière à le relativiser ? Et au bout du compte, les dirigeants de l'opposition APC, et plus particulièrement les nordistes auront à choisir entre les échos funèbres dont la propagande du pouvoir les tiendrait responsables, et la menace de sécession, c'est-à-dire la disparition de la poule aux œufs noires comme le pétrole du delta du Niger, qui est un élément majeur au cœur des passions. Adenifuja Bolaji |
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