Pour autant, la capacité et la chance d'accéder au pouvoir ainsi ouvertes à l’APC ne signifient pas forcément que le nouveau parti à la solution infuse des nombreux problèmes qui accablent notre grand voisin—mais chut… ne le dites surtout pas aux millions de Nigérians qui caressent le rêve de l'alternance au sommet pour un mieux-être --ni que ce parti soit au-dessus de tout soupçon. Alors que le PDP a prouvé dans les faits sa volonté d'être un parti national marqué par l'ouverture régionale et religieuse--de leurs rangs, on a vu tour à tour l'élection à la tête du pays d'un chrétien Yoruba, d'un Haussa musulman du Nord, puis d'un chrétien du grand sud—l’APC, en dépit des proclamations et des belles promesses, apparaît à la fois comme un parti nordique et musulman. Ses gros aspirants à la course présidentielle sont des musulmans du Nord. L'organisation du parti est centrée sur la référence historique et culturelle au Nord musulman même si des hommes liges du sud servant de caution sont mis en avant souvent de façon ostentatoire. La tête de pont politique de ce parti pour gagner les voix du sud, les Yoruba, en dit long sur son identité, dans la mesure où la moitié d'entre eux sont musulmans. Cet aperçu rapide étant fait, comment comprendre le document vidéo ci-joint ? Pour comprendre la vidéo, il faut retenir, comme cela a été dit plus haut, que le PDP, tremble à la perspective de se voir détrôné par l’APC, de même que Jonathan lui-même a peur de perdre les élections si elles devaient être transparentes et justes, exemptes de fraudes. L'autre chose c’est que, depuis la création de l’APC, l'un des sports politiques nationaux du Nigéria consiste au ping-pong de la transhumance ou des défections croisées d'un parti vers l'autre. Le coup d'envoi de ce sport a été donné par l’APC qui a érigé la transhumance en support publicitaire. Coup sur coup, ce nouveau parti plein d'espoir a happé et phagocyté une belle brochette de gouverneurs PDP tous des états Nord musulmans. De plus, l’APC a exploité les luttes fratricides dans le sud où M. Jonathan et le gouverneur de l'État de Rivers sont à couteaux tirés pour raison d'immixtion de l’épouse du Président dans les affaires de cet État. Le gouverneur Amaechi, n'en pouvant plus de subir le mépris, les menaces et les harcèlements du pouvoir, a quitté le PDP pour faire cause commune avec l’APC dont il est devenu l'une des plus célèbres cautions du sud chrétien.
Pour répondre du berger à la bergère, Jonathan et son parti ont pris l'habitude de lancer régulièrement et à coups de milliards de nairas des impeachment de gouverneurs et des offensives de défection de sénateurs ou de députés APC, tous personnages politiques qui ne sont pas toujours des menu fretins. Ces opérations ont connu des succès mitigés, et en tout état de cause, limités. L’APC quant à lui est souvent bien plus chanceux dans ses opérations de défection spectaculaire. La dernière en date qui fait grand bruit est celle du président de l'Assemblée, M. Tambuwal qui, il y a encore trois semaines, était officiellement membre du PDP. Du jour au lendemain, sa défection a fait l'effet d'une bombe et a été vécue comme un choc par la direction du PDP. M. Tambuwal est passé avec armes et bagages à l'ennemi et cela n'est pas du goût de Jonathan, loin s'en faut. Furieux, le président nigérian s'est lancé dans une série de représailles politiques, médiatiques et judiciaires contre l’impertinent speaker, qui continue toujours d’occuper son poste. Au nombre de ces représailles, la garde personnelle de M. Tambuwal lui a été retirée sans ménagement, et une tractation judiciaire est lancée contre lui afin de le forcer à démissionner de la tête de l'Assemblée, poste qu’il doit au PDP. Les juges devaient d'ailleurs rejeter la requête du pouvoir. Mais, entre-temps, le pouvoir, abusant de son autorité, a interdit ce jour-là aux députés et au président de l'Assemblée d'entrer au parlement. Alors que les élus APC protestaient de leur bon droit, ils ont eu droit à une répression de la police qui a fait usage de gaz lacrymogènes. C'est dans les échauffourées de cette confrontation que les députés APC, décidés à ne pas se laisser usurper leurs droits, face au blocage du parlement par la police, ont eu recours à l'escalade des murs de leur honorable institution pour rejoindre leurs sièges d'élus. C'est ce moment d’assaut très musclé et sportif que décrit le document vidéo que voici.
Ayodele Bolakale, Correspondant à Abuja
|
|
|
Commentaires
Vous pouvez suivre cette conversation en vous abonnant au flux des commentaires de cette note.