ou l’Essence de la Vie Politique au Quartier Latin de l’Afrique
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Un exemple caractéristique est donné par l’essence de la vie politique. Considérez les noms des hommes politiques du Bénin notamment du sud. Vous avez des gens comme Yayi, Houssou-Guèdè, Gnonlofoun, Gbota, Tchékessi, Kolawole, Fikara, Fassassi, Dossou, Amoussou, Tévoédjrè, Soumanou, Ajavon, Talon, etc. Mais aussi des Soglo, des Aho, des Houngbédji, Glèlè, etc. Très peu de ces noms proviennent des anciennes familles aristocratiques précoloniales. Et très peu proviennent de la région la plus aristocratique du sud qu’était Abomey. Le royaume le plus puissant du Bénin étant un pays d'esclavage où se faisait le sacrifice humain, il y avait des groupes ethniques dominants comme ceux des Fon, et des groupes ethniques dominés victimes de ces pratiques qui n'étaient pas seulement les Nago. À un moment donné, même le royaume de Porto-Novo dont les rois étaient cousins de ceux d'Abomey s'était senti comme menacé par ce statut de dominé, raison pour laquelle il a recherché avec passion le parapluie politique des Européens : les Anglais puis les Français. Donc la conquête française, la colonisation, puis l'instauration d'une république après l'indépendance a libéré beaucoup de peuples de l’actuel territoire du Bénin de leur angoisse de dominés. Ces personnes que le grand chanteur et philosophe Adjahoui appelait des mεtata. Leur libération a conduit au besoin de revanche des mεtata contre ceux que l'on pourrait appeler des mεdaho, ou des mεjomε. La grande majorité de ceux qui font la politique aujourd'hui au Bénin, leur motivation et la manière dont ils la font sont plus ou moins consciemment déterminés par ces rapports hérités du passé. Ces mêmes rapports déterminent les sensibilités et les représentations réciproques des Béninois. Pourquoi un Dossou, un Tévoédjrè, ou un Houssou-Guèdè sont prêts à pactiser avec un Yayi Boni ou un Kérékou prétendument originaires du Nord plutôt qu'avec un Soglo du sud en dépit du régionalisme triomphant ? Pourquoi un Soglo est-il prêt à trahir un Houngbédji sans sourciller ? Tout le drame politique d'aujourd'hui provient de la persistance inconsciente de ces rapports du passé dont nous tous nous gagnerions à être conscients pour les dépasser et entrer de plain-pied dans un climat d’unité nationale sain propice au développement. Prof. Cossi Bio Ossè |
D'une manière générale, le Bénin a besoin d'un éveil intellectuel qui soit à la hauteur des nombreux défis que posent les transformations du tissu social, mais aussi l'ignorance du passé. L'ignorance du passé est la matrice générale de l'ignorance du présent. Il faut faire quelque chose. A défaut de voir bouger aussi vite qu'il ne le faudrait les instances et institutions motrices de ce mouvement intellectuel que nous appelons de tous nos vœux, peut-être qu'à l'instar de certaines révolutions intellectuelles qui ont laissé leurs marques dans l'histoire de l'humanité, des individus ou des groupes isolés devraient commencer à agir à leur niveau modeste, quitte à prendre le risque de prêcher dans le désert. Qu'est-ce que l'histoire générale du Bénin que suggère avec pertinence le Professeur Z. Dramani-Issoufou sinon la somme des histoires particulières abordées dans une optique systématique ? A défaut de faire bouger la masse des institutions et instances concernées, ne pouvons-nous appliquer la fameuse théorie consistant à réfléchir globalement et agir localement...?
Rédigé par : Cossi Bio Ossè | 29 octobre 2014 à 20:12
Le commentaire du prof. Z. Dramani-Issifou en dépassant le champ politique pointe en filigrane le doigt sur un des problèmes majeurs auxquels notre société est confrontée dans la mesure où les mutations qui accompagnent ces circulations bouleversent rapidement les rapports à la production de couches sociales à la base majoritairement agro-pastorales sans qu'il y ait une compensation appropriée par le développement de secteurs d'activité idoines.
Rédigé par : Thomas Coffi | 29 octobre 2014 à 18:33
Bien vu cher collègue; la situation est identique au nord de notre pays avec, en plus complexe, la fonction "shaker" des villes qui nivellent les couches sociales; de sorte qu'en moins d'une génération, l'"homme de la campagne" devenu citadin, adopte des attitudes ultra-urbaines avec les exigences et prétentions idoines.Le "chef-lieu" de la Donga en est une parfaite illustration.
Une histoire générale du Bénin est d'une grande urgence, je le crie depuis des lustres; il y a des pourtant des compétences disponibles pour entreprendre cette tache d'intérêt national. Mais cela est une autre paire de manche!
Rédigé par : Prof. Zakari Dramani-Issifou | 28 octobre 2014 à 11:23