A force de jouer avec le feu de la communication moderne dont les gadgets et les systèmes sont comme chacun sait de manière léonine dans les mains des seuls Américains ( Google, Youtube, Twitter, Facebook, etc !) nos dirigeants au plus haut niveau qui n’hésitent pas à être dans le vent de la mode, prennent aussi le risque de se brûler les doigts. C’est ce qui est arrivé au Président John Dramani Mahama du Ghana. Le type avait un message à faire passer à son peuple. Dans la manière traditionnelle et respectable d’un message présidentiel, il aurait pu s’exprimer par lettre, par message radiotélévisé ou par discours direct lors d’un meeting. Mais nenni, dans ce siècle de la transe communicationnelle tous azimuts, qu’attendiez-vous qu’il fît ? . John Dramani Mahama, en président moderne du 21ème siècle qui a vu ses pairs occidentaux le faire pour un oui ou pour un non, n’a pas hésité à brandir son twitter et à twitter, comme de bien entendu. Il savait pourtant que le paysan ghanéen du fin fond de la campagne d’Ashanti, de la Volta ou du Brong-Ahafo ne comprend rien au tweet. Mais comme c’est toujours le cas en matière de com. moderne, c’est moins le message incident qui importe que les commentaires et le message réfléchi par les médias conventionnels. On sait très bien qu’en tweetant, le message envoyé finira bien par faire parler de lui à la radio, à la télévision et dans les journaux ; alors pourquoi se gêner ? On fait d’une pierre deux coups : on se la joue branché et moderne, et on parvient à faire parler de soi. Mais on oublie que dans le même temps, en usant d’un médium que vous ne maîtrisez pas, qui ne vous appartient pas, -- Radio-Ghana, n’est pas Tweet-Ghana, car Twitter est un média universel, qui fait du monde, comme tous les autres outils de com. modernes, un village global. -- vous prenez le risque d’avoir des réactions doublement inattendues : inattendues de par leur origine/statut et inattendues de par leur contenu/discours. C’est ce qui est arrivé au tweet du Président Mahama, qui a reçu une réponse cinglante et grinçante mais non moins tweetée de l’ambassade américaine au Ghana. Cette réponse a mis en rogne non seulement le gouvernement ghanéen mais aussi des Ghanéens qui considèrent le tweet de mauvais goût, surtout provenant du compte officiel de l’ambassade des Etats-Unis. Ainsi, Ras Mubarak, le Coordinateur de l’Union Nationale de la Jeunesse du Ghana écrit sur son mur Facebook : « Ceux qui veulent rester à l'écart peuvent rester à l'écart, mais je ne vais jamais rester indifférent quand les États-Unis ou tout autre pays manquent de respect à mon Président, quel que soit son bord politique. » Pour Ras Mubarak, il s’agit d’une bavure consulaire majeure. « Le ministre des Affaires étrangères doit convoquer l'ambassadeur américain à Accra à s’expliquer et présenter des excuses (…) pour avoir la version officielle de la raison pour laquelle le twitter officiel de l’ambassade américaine se permet de répondre à un tweet de notre Président en ces termes impudents et honteux ». L'ambassade américaine à Accra a depuis trouvé une excuse et une explication des circonstances qui ont conduit au triste tweet, avec la promesse d’éviter de récidiver. Non satisfaite de l'explication la ministre des Affaires étrangères ghanéenne, Hannah Tetteh, a répondu au tweet de l’Ambassade américaine. « Le tweet était public et associé à votre compte twitter. Ce n'était pas un compte privé » a-t-elle tweeté. Et pendant que la tweetomachie continue, qui a pris la peine et le temps de se poser la question du premier fautif ? Est-ce qu’il convient que le président d’une République intègre s’adresse à son peuple par des voies et des outils dont d’autres nations détiennent les fils et manipulent à leur guise alors qu’il a d’autres outils plus nationaux à sa disposition ? A vouloir faire le moderne à tout crin, il faut bien être prêt à en supporter les conséquences. Le président Mahama qui passe pour un professionnel de la communication devrait le savoir… Boakye Agyarko |
Commentaires
Vous pouvez suivre cette conversation en vous abonnant au flux des commentaires de cette note.