Les personnages publics japonais ayant commis des fautes ou des erreurs sont amenés selon les exigences de la culture, à présenter publiquement des excuses. Ce qui suppose de reconnaître sa culpabilité, et d’assumer sa responsabilité. « Je suis devenu membre de l'assemblée ... (pleurs)... je ne pensais qu'à changer la société". (cris) ... Ce Japon ! ... (pleurs) ...j'ai risqué ma vie (pleurs et cris) vous comprenez ??!". » Ainsi s’exprimait, contrit et accablé de remords, M. Ryutaro Nonomura, élu d’une circonscription de l’ouest du Japon. Le député est apparu mardi 2 juillet en conférence de presse à Kobe, pour s'expliquer sur des détournements de fonds présumés, environ 30.000 euros pour des voyages divers et de multiples séjours dans des établissements de bains. Le tout sans factures. Normalement, l'exercice est empreint de solennité, de retenue, le pénitent souvent en strict costume sombre s'inclinant à angle droit devant les médias en signe de repentance. "En général, ce sont des personnages publics pris la main dans le sac qui sont plus ou moins contraints à se livrer à une séance d’excuses publiques", explique Pierre Souyri, professeur à l’université de Genève, spécialiste du Japon. "Ces excuses sont beaucoup plus fortes qu’un simple communiqué de presse par exemple, car les coupables se trouvent non seulement face aux personnes qu'ils ont lésées, mais aussi de la presse, qui ne les loupe pas. La pression médiatique est telle que la séance peut durer un moment. Certains finissent par craquer", détaille-t-il. La culture japonaise insiste sur le fait de s’excuser, même dans les rapports privés. Quand on a blessé quelqu’un, même quand on estime être dans son bon droit, on s’excuse d’abord et on discute ensuite", indique Pierre Souyri.Récemment, un autre élu, Akihiro Suzuki a reconnu publiquement lors d'une conférence de presse avoir apostrophé sa collègue,Ayaka Shiomura, sur le fait qu'elle était toujours célibataire. Après avoir présenté sa démission au Parti libéral-démocrate (PLD), il s’est confronté à Ayaka Shiomura et lui a présenté ses excuses en se courbant devant elle, mitraillé par les caméras et appareils photo. En mars dernier, Mamoru Samuragochi, surnommé le "Beethoven japonais", a reconnu lors d’une conférence de presse qui a duré près de 3 heures qu’il n’était pas en réalité atteint de surdité depuis l’âge de 35 ans et qu’il avait travaillé pendant des années avec un "nègre" de la composition, Takashi Niigaki. Le faux « Beethoven japonais » présente ses... par lemondefr Cette culture de la responsabilité est un héritage du néo-confucianisme qui plaçait son idéal dans la responsabilité individuelle et le respect de l’autorité. Institutionnalisée au XIXe siècle comme socle de l’éducation, cette éthique guerrière a été généralisée pour modeler l’âme japonaise et renforcer la cohésion nationale. Un état d’esprit qui renvoie au bushido, l'un des codes moraux des samouraïs japonais exigeant la loyauté et l'honneur. Si un samouraï échouait à garder son honneur, il pouvait le regagner en commettant le "seppuku", que l'on connaît mieux en Occident sous le terme de "hara-kiri". En Europe, l’attitude classique consiste à refuser de reconnaître sa faute, à nier, à n’être jamais coupable. La règle du “pas vu pas pris” ou même celle du “n’avouez jamais !” est de rigueur. En Afrique, il n’est pas sûr que, considérée dans sa réalité originelle l’aveu public de la culpabilité ne fasse pas partie de nos valeurs. Mais avec l’influence occidentale et la colonisation les Africains n’ayant pris chez les Blancs que leurs travers et défauts à l’exclusion de leur qualités, nous faisons pire que les Occidentaux en matière de refus de reconnaître notre responsabilité. Et cette indignité généralisée qui se manifeste surtout au sommet de l’Etat rend raison en grande partie de nos tares sociales et politiques, sources de tous nos maux. Ah, si nos dirigeants, à l’instar de leurs homologues japonais pouvaient faire leur l’éthique de la contrition et de la responsabilité, beaucoup de choses tourneraient bien plus rond en Afrique ! |
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