Les développements qui affectent le paysage politique nigérian ces dernières semaines donnent de plus en plus de sueur froide à M. Jonathan. Et la panique gagne les rangs de son parti ou ce qu'il en reste, ainsi que son état-major. Au nombre de ces événements, il faut signaler la création, il y a quelques mois, de l’APC, une fusion de grands partis de l'opposition qui est un peu pour le parti au pouvoir au Nigéria ce que fut l’UN pour la FCBE et M. Yayi entre 2009 et 2011 : une union de tous les opposants principaux et une alternative politique crédible. Deuxième évolution, la fronde d'une partie des gouverneurs PDP en majorité originaires du Nord. Les frondeurs, animés par de potentiels candidats nordistes à l'élection présidentielle, sont fâchés contre ce qu’ils considèrent comme la violation par M. Jonathan d’un accord de non candidature, conformément à une interprétation contestée du principe tacite de rotation régionale (zoning). Troisième évolution non moins importante et qui aggrave l'espérance électorale de M. Jonathan, le groupe des frondeurs nommé new-PDP qui jusque-là cherchait ses marques, se tâtait et vivait surtout de rodomontades, menaçant entre deux négociations de rompre les amarres, non seulement vient de mettre ses menaces à exécution mais l'a fait de la façon la plus ruineuse pour M. Jonathan. En effet, cinq de ces mousquetaires originaires du Nord sont allés grossir les rangs de l’APC, un parti qui en a profité pour refaire son retard en nombre de gouverneurs, et qui de ce fait apparaît plus que jamais comme un redoutable concurrent du PDP aux prochaines élections présidentielles. Du coup, la panique gagne les rangs du PDP. Et toutes sortes d'idées biscornues sont avancées pour sauver le navire électoral du parti pour 2015. Parmi ces idées, le vice président du sénat, le sénateur Ike Ekweremadu, vient de proposer que le Parlement vote une loi de prolongation éventuelle de deux ans des mandats du président de la république et des gouverneurs principaux, dans l'hypothèse d'une stabilisation politique du pays au cas où les prochaines élections mettraient le pays à feu et à sang ! Proposition circulairement vicieuse, qui ressemble un peu à une pétition de principe. Son extravagance antidémocratique n'a pas manqué de soulever le tollé dans l'opposition qui crie à une lubie de dépossession du peuple de sa souveraineté. Le parallèle avec le Bénin saute aux yeux ; la révision de la constitution est pour Yayi Boni ce que la prolongation préventive biscornue proposée par le sénateur Ike est pour M. Jonathan : une bouée de sauvetage d’un président qui ne veut pas partir, ou qui n'est pas sûr de sa réélection. Cette extravagance constitutionnelle qui est la dernière trouvaille de Jonathan et de ses amis défraient la chronique politique au Nigéria…Elle montre en tout cas l’inconfort des dirigeants africains à envisager la fin de leur règne, qui pour eux doit être à vie. En ce moment où Nelson Mandela vient de nous quitter, -- may his soul rest in peace --lui qui n’a pas conçu du pouvoir une maladive fixation, doit ruminer l’amertume que son exemple personnel d’abnégation n’a pas fait tâche d’huile sur le continent.
Adewale Bakanan, en correspondance depuis Lagos
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