Goodluck Jonathan était visiblement sous le choc quand l’ancien vice-président Atiku Abubakar et sept gouverneurs d'Etat ont récemment claqué la porte du PDP, le parti au pouvoir (PDP) en rébellion ouverte contre son leadership. Le PDP a remporté toutes les élections depuis qu'il a pris le pouvoir à la fin du régime militaire en 1998. Mais il est profondément divisé quant à savoir si M. Jonathan devrait briguer un second mandat complet en 2015. En conséquence, il y a une chance, et la plupart des analystes là-dessus hésitent à s’y avancer, que si M. Jonathan reste ou non à sa tête le PDP court le risque de perdre le pouvoir. Et cela pourrait bouleverser la vie politique nigériane. M. Abubakar et les gouverneurs rebelles ont dans la foulée crée un " nouveau PDP ". « Nous avons pris sur nous de sauver le parti de son leadership dictatorial », a dit Kawu Baraje, le président de la nouvelle faction, qui a accusé M. Jonathan et le président du PDP, M. Bamanga Tukur, de permettre « la répression politique, les restrictions de la liberté d' association et la suspension arbitraire de ses membres. » La faction dissidente a un relent nordique. 5 des sept gouverneurs rebelles sont du Nord et l’un est à cheval entre le nord et l’ouest yoruba (Kwara). Un seul des gouverneurs rebelles, Rotimi Amaechi, est du sud, plus précisément de l'Etat de Rivers. M. Amaechi, dont on dit qu'il guigne la vice-présidence en 2015, a maille à partir avec M. Jonathan et son épouse. En mai M. Amaechi a été élu président du puissant Forum des gouverneurs du Nigeria, en battant le candidat favori du président, Jonah Jang de l’Etat du Plateau, une défaite embarrassante pour M. Jonathan. Le forum est divisé, avec 19 gouverneurs soutenant le gouverneur rebelle et 16 autres rangés derrière le candidat du Président . «Je suis inquiet pour ma sécurité », explique M. Amaechi, qui a apparemment pris l’habitude de se déplacer au volant de sa propre voiture banalisée pour raison de discrétion. Le 1er Septembre, 57 membres PDP sur 360 de la Chambre basse du parlement fédéral ont promis leur loyauté envers le PDP rebelle ; 22 des 50 membres PDP du Sénat qui en compte 109 leur ont emboîté le pas. Plusieurs autres sont en train de vaciller. La faction rebelle connue sous le nom de G7, est peut-être capable de faire basculer les voix des délégués de leurs États au primaire PDP de l'année prochaine, lorsque le parti voudra choisir ses candidats à la présidence et à la vice-présidence du pays. Le G7 regroupe les gouverneurs de Kano et de Rivers, deux des États les plus peuplés. Faute d’éliminer la rébellion au sein de son parti, Jonathan court le risque de perdre la primaire. Dans un effort pour reprendre l'initiative, le président a limogé neuf de ses ministres. Ce n'est pas un hasard si quatre d’entre eux sont originaires des États dont les gouverneurs ont fait défection, tandis que deux autres ont été initialement désignés par le toujours puissant à défaut d’être tout-puissant Obasanjo, qui soit dit en passant a aidé à hisser Jonathan au sommet de l’État mais œuvre en sous main depuis quelque temps pour lui nuire. Selon un initié PDP, l’ambiance au sein du parti est de plus en plus à la paranoïa alors que les figures de proue cherchent à esquiver la hache de M. Jonathan. M. Jonathan peut désormais mettre ses proches alliés à des postes ministériels pour limiter l'influence des gouverneurs rebelles, en particulier dans des États comme Kano et Rivers. Le 16 Septembre, un croupion du PDP a annoncé que Mohammed Abacha, le fils de feu général Sani Abacha, avait été ramené du parti de l'opposition. Il se murmure que M. Abacha, qui est lui-même très riche, peut briguer le poste de gouverneur de Kano en 2015 sous les auspices de l'ancien PDP. Il est également possible que M. Jonathan obtienne de la Commission des crimes économiques et financiers (EFCC ), un organisme censé juguler la corruption, d’aller enquêter chez les transfuges du PDP, dont certains ont déjà été ciblés par elle. Un sénateur rebelle de poids, Bukola Saraki, de l’État de Kwara majoritairement yoruba a déjà été interrogé par l'EFCC dans sa petite maison à Abuja, la capitale avant la tenue des réunions de la faction rebelle. « Jonathan va tout faire pour gagner, a dit un homme du PDP, mais il aura du mal dans le nord où l'ambiance est très anti- Jonathan et anti- PDP. » Une conséquence des luttes intestines au sein du parti au pouvoir est que la dynamique des réformes économiques, déjà essoufflée a encore ralenti. Peu de gens s'attendent maintenant à ce que le Projet de loi sur l’Industrie Pétrolière longtemps gelé, qui est destiné à apporter plus de clarté dans l'industrie pétrolière du Nigeria, puisse passer. La fracture interne au PDP n’aide pas non plus le président à mettre fin aux violences et au sabotage dont est l’objet le riche delta du Niger où des milliards de dollars de l'argent du pétrole tombent dans les mains de criminels et des politiciens corrompus, encore moins à gagner la campagne contre les terroristes dans le nord. Le 28 septembre des militants de Boko Haram ont tué environ 50 élèves dans un collège agricole de l'État de Yobe. Les factions ennemies du PDP doivent se réunir pour discuter le 7 Octobre. M. Jonathan et ses alliés du PDP peuvent avoir assez d'argent du pétrole pour se tirer d’ennui. Mais pour l'instant, la balance penche du côté des rebelles PDP. Par ailleurs, l'opposition classique se frotte les mains avec l’APC, (All Progressive Congrès) une coalition récemment formée des trois principaux partis, s'organise et va sûrement essayer d'attirer une partie des rebelles du PDP de son côté. Le président, qui sur la scène nationale semble toujours tirer un mauvais lièvre de son chapeau (même s’il est rarement sans chapeau ), a du pain sur la planche pour conserver son poste. Le 1er Octobre, il a remis des certificats de licence à 14 entreprises privées qui ont été autorisées à acheter des morceaux de la NEPA, la mastodonte nationale d'électricité d’une incompétence légendaire. Si beaucoup plus de gens avaient l'électricité fiable d'ici 2015, cela pourrait lui faire gagner des voix cruciales.
Amené et Trad. par Binason Avèkes
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