Je n’aime pas comparer un petit pays africain comme le Bénin, et un grand pays européen comme la France, comme aiment à le faire avec une certaine frénésie nos amateurs nationaux de comparaison. Ceux-là qui, par exemple, tirant argument du fait que le Sénégal et la Corée du Sud seraient au même niveau économique dans les années 60, s’étonnent du fait qu’aujourd’hui, l’un traîne encore dans les bas-fonds sordides du sous-développement là où l’autre tutoie les grandes économies de ce monde. Des comparaisons superficielles et hâtives de ce genre prouvent si besoin en est l’indigence rationnelle de ceux qui les tiennent. Pour ce qui est de la comparaison de la France et du Bénin en toutes choses comme nos journalistes et commentateurs ne se gênent pas de le faire souvent en vertu du dogme de l’égalité formelle des nations, des États ou des hommes, cela est loin d’être ma tasse de thé : autant comparer le cochon d’Inde et le sanglier géant... Pourtant au hasard de mes lectures de la presse d’ici et d’ailleurs, un sujet a retenu mon attention, il s’agit au Bénin comme en France de la démission d’hommes politiques. Et, avec l’excuse que les considérations avancées ici étaient d’ordre individuel et non collectif, j’ai cédé moi aussi au péché mignon de la comparaison. Au Bénin, on peut lire dans le journal du vaillant Charles Toko la nouvelle de la démission de l’ancien premier Ministre du Bénin, Monsieur Pascal Irenée Koupaki, alias PIK, de son poste de Président de l’UNDB. Parti qui soit dit en passant, lui a servi à faire l’esbroufe ou la diversion pendant que se mijotait le holdup électoral à l’issue duquel, il sera bombardé Premier Ministre, de façon parfaitement non constitutionnelle. Dans sa brève lettre de démission, l’ancien premier ministre disait en substance ceci : « Le 03 octobre 2010, lors du Congrès extraordinaire de l’Union pour le Développement du Bénin Nouveau (UDBN), en acceptant, sur proposition du bureau Exécutif national, d’être le Président du parti, j’avais précisé que « l’Union pour le Développement du Bénin Nouveau ne sera pas un club électoral ou un parti de circonstance. Les alliances politiques de circonstance confortent le débauchage et la transhumance politiques, en même temps qu’elles empêchent Le stabilité politique et institutionnelle nécessaire à la mise en œuvre de qualité, de politiques de développement ». En conséquence de quoi Monsieur PIK donne sa démission de l’UNDB dont il a été jusque-là le Président. De même en France, Monsieur Noel Mamère l’une des vedettes du mouvement écologiste, vient de donner sa démission en tant que membre du Parti EELV (Europe Écologie les Verts). L’ancien Journaliste et actuel maire de Bègles, par ailleurs député à l’Assemblée, justifie sa démission en ces termes : « J'ai décidé de quitter EELV parce que je ne reconnais pas le parti que j'ai représenté à la présidentielle en 2002. Notre parti ne produit plus rien : il est prisonnier de ses calculs et de ses clans. Nous sommes devenus un syndicat d'élus. J'ai l'impression d'un sur-place qui nuit au rôle que nous pouvons jouer dans la société. (…). C'est une page qui se tourne. Je pars sans regret, sans émotion particulière. C'est le résultat d'un constat et d'une analyse. » |
Ce qui saute aux yeux dans les deux arguments de divorce politique c’est le constat fait par ces hommes du fait qu’ils ne se reconnaissaient plus ni dans les idéaux de leur parti encore moins dans sa position, ses actions et ses orientations concrètes. Les deux hommes politiques expriment leur sentiment d’aliénation dans leur propre parti, d’où leur décision logique de le quitter. Mais sous cette apparence de similitude logique il y a une différence de taille entre la situation du Français et du Béninois ; et c’est cette différence qui donna force et motivation à l’idée de comparaison. L’homme politique béninois était le Président de son parti, tandis que le Français, en dépit de sa notoriété, n’avait donné sa démission qu’à titre de simple membre de son parti. Déjà le cas de PIK dont j’ai eu connaissance en premier lieu m’intriguait intérieurement. Et, au risque de dévoiler ma naïveté politique, je dois avouer que je me demandais comment le président d’un parti pouvait, après trois ans d’exercice de son pouvoir constater que la position du parti, son orientation et ses actions ne correspondaient pas à ce qu’il en attendait. En comparant le Président d’un parti à un commandant de navire, je me demandais comment un tel timonier pouvait après une longue navigation découvrir que le plan du voyage qui a dû être concocté sous sa direction et les manœuvres de gouvernail n’ont pas conduit le navire vers le cap souhaité. Les fins connaisseurs du microcosme politique béninois pourront remarquer aussi que la démission de PIK suit de près son limogeage de son poste de premier ministre dont l’exercice a couvert de façon concomitante son séjour à la tête du parti qu’il vient de quitter. Comme si quelque part, les deux rôles et postes étaient liés, se soutenaient l’un l’autre. Dans le cas de Noel Mamère, il n’y a rien de très original ni intriguant dans les raisons avancées pour sa démission, dès lors qu’il n’agit qu’en simple membre de son parti. Et la question que je me pose, entre naïveté et cynisme volontaire est : pourquoi PIK le surdoué, dans son argumentation, n’a pas eu peur d’aller au-devant de la contradiction ?
Akande Bashiri |
Merci pour ce questionnement sur une posture et imposture hilarantes (pour éviter de dire grotesque) . Et dire que Demain, il va prétendre postuler comme candidat à la magistrature suprême...
Rédigé par : Thomas Coffi | 26 septembre 2013 à 22:57