Je comprends et vous félicite également d’avoir prévu des travaux en ateliers pour examiner les meilleures méthodes de mobilisation au sein des différentes couches de la jeunesse et du peuple. Ceci constitue l’itinéraire obligatoire pour l’instauration du pouvoir des travailleurs et des peuples. Ceci témoigne de la haute conscience nécessaire de votre part que la Révolution attendue est, si je peux parler ainsi, la vôtre, celle de la Jeunesse. Car c’est seulement la révolution qui peut sauter les obstacles qui obstruent l’avenir et ouvrir la voie avec l’instauration du pouvoir des travailleurs et des peuples, à la formation adéquate, à l’emploi et à l’émancipation de la jeunesse. C’est seulement le renversement révolutionnaire des mafieux qui gèrent et détruisent l’école et les ressources publiques qui offrirait les conditions pour un développement accéléré du pays et le rattrapage des retards d’avec les pays aujourd’hui développés. La victoire de la Révolution attendue marquera ainsi la fin d’une étape et ouvrira une autre. Elle comblerait le rêve des générations du mouvement révolutionnaire dont je me dois de vous retracer les grandes lignes.
L’agression coloniale de nos peuples par l’impérialisme français a abouti à l’imposition (1894- 1900) du soi-disant pacte colonial faisant de nos peuples des esclaves dans leur propre pays. Ce ‘’pacte’’ se décline en les éléments suivants :
- l’imposition de la langue du colonisateur à tous les peuples en tant qu’unique langue d’instruction, d’administration et de justice.
- l’imposition d’une ou plusieurs cultures de rente à produire pour les usines en Métropole avec l’obligation de l’exportation des matières premières et de l’importation des produits manufacturés.
- la main- mise sur les réserves économiques financières et monétaires.
On sait que l’agression coloniale a suscité la résistance des princes d’Abomey et de Tado au Sud. Leur défaite ouvrit la voie à la colonisation. L’oppression et l’exploitation coloniales ne furent jamais acceptées de gré par la population. C’est ainsi qu’à l’occasion des souffrances inouïes imposées par l’effort de guerre entre 1914-1918, éclatèrent les révoltes des Hollis, des Saxwè, de Kaba, de Bio Guerra. L’écrasement sauvage de ces révoltes ne mit pas fin à la résistance à l’ordre colonial. Du rang des premiers lettrés, formés pour servir la cause du colon, sortirent des révolutionnaires (qui ont donc renié la mission voulue par le colon) pour servir la cause populaire. On peut citer ainsi des gens comme Marc Tovalou Quenum, Louis Hounkanrin etc. S’élevant contre le statut d’indigénat, ils réclamaient celui de citoyen à part égale avec les citoyens de la métropole, c’est-à-dire l’assimilation de leur statut avec celui de citoyens français. C’est le mouvement assimilationniste. Bien que limité et ne percevant pas le caractère irréaliste de leurs vues, l’assimilationnisme combattant l’oppression exercée sur l’indigène revêtait un caractère progressif. La répression du mouvement assimilationniste ainsi que le développement de la lutte révolutionnaire avec le mouvement communiste en Union Soviétique et dans les colonies (Chine, Indochine, Inde, Algérie) renforcèrent la revendication d’indépendance des colonies. La seconde guerre mondiale donna un coup de fouet. Après 1945, l’exigence de l’indépendance devenait la revendication essentielle des révolutionnaires dans notre pays.
On peut situer à cette époque l’introduction plus massive des intellectuels au marxisme-léninisme qui inspirait, de la manière la plus ferme et la plus conséquente, la revendication d’indépendance contre les valets hauts-bourgeois formés et entretenus par le pouvoir colonial. Les premiers groupes formels du Dahomey étaient intégrés aux groupes de l’AOF dont le centre politique et intellectuel était DAKAR. La territorialisation du mouvement, c’est-à-dire sa constitution par colonie, permettra autour de 1958 la naissance du premier groupe dahoméen se réclamant du marxisme-léninisme : l’Organisation des Révolutionnaires du Dahomey (ORD) connut ainsi le jour. Bien vite les divergences idéologiques nées du coup d’Etat révisionniste des nouveaux dirigeants du PCUS provoquèrent la scission de l’ORD et la création de l’Organisation des Marxistes-léninistes du Dahomey (OMLD). Outre ces deux groupes, existait dans le même temps, celui dit des FOMARDS ; ainsi appelé parce que les principaux animateurs résidaient à la Résidence des Etudiants dénommé « France d’Outre-Mer » (FOM). De l’OMLD se détachera plus tard le groupe à tendance régionaliste prononcé appelé Fitila. Ces groupes qui animaient les mouvements scolaires et étudiants ont dénoncé le caractère formel des indépendances, caractérisé les régimes mis en place comme néocoloniaux et appelaient à la Révolution nationale, démocratique et populaire. Ils défendaient les libertés sauvages héritées des luttes des métropoles. Ils créèrent et développèrent des organisations de masses de Jeunes (UGEED et FACEEN), et surtout de paysans, pour lutter contre l’oppression et l’exploitation néocoloniales. Mais ces groupes tous clandestins ne voyaient pas la nécessité de créer et de construire le Parti de la classe ouvrière en tant qu’élément essentiel de la Révolution démocratique pour le passage au socialisme. Ces groupes agissaient comme des sectes secrètes. Les organisations de masse étaient privées de la théorie révolutionnaire. Leur mouvement était par conséquent populiste, avec la négation du Parti et du rôle de la classe ouvrière. Les masses en luttes n’avaient pas de ce fait un parrain à leurs luttes.
Ainsi les groupes dans notre pays étaient principalement au nombre de quatre : OMLD, ORD, Fitila, Fomards, avec les principaux représentants : Pour l’OMLD nous avons : Fakorédé AZARIA, ADJO Boco Ignace, OKA, SARE Eustache, AKINDES Sylvain, DASSOUNDO Gédéon, HAZOUME Guy, DOSSOU Robert etc. Pour l’ORD : OGOUMA Simon, AZODOGBEHOU François, GADO Guiriguissou, DEGLA Joseph, CAPO-CHICHI T. Gratien etc. Pour les FOMARDS : Bruno AMOUSSOU, MITO-BABA Florentin, LADIKPO Rigobert etc. Pour FITILA : ABDOULAYE ISSA, Roger GARBA, MALAM IDI, Guy BOUKARI etc. auxquels se joindront plus tard les BATOKO Ousmane et autre HOUDOU Ali. Seul l’ORD évolue en un parti de masse avec la création de la LIGUE Nationale de la Jeunesse Patriotique (L.N.J.P.) mais avec une ligne opportuniste.
La forte aspiration à la révolution face à un mouvement révolutionnaire sans parti conséquent aboutit avec le coup d’Etat de Kérékou de 1972 à l’instauration de la pseudo-révolution. Ce mouvement populiste ne peut affronter le nouveau pouvoir. A la répression sauvage des luttes de la jeunesse en 1974, les chefs populistes, abdiquèrent en demandant aux masses de se considérer comme sans père ni mère. Cette défaite du mouvement populiste s’acheva avec la répression par KEREKOU à Cotonou du mouvement insurrectionnel de juin 1975 suite à l’assassinat de Michel AÏKPE. Le mouvement populiste avait ainsi échoué. C’est en tirant leçon de ces mouvements qu’à partir de 1975, s’intensifia, sous la direction de Pascal FANTODJI (PF), les luttes idéologiques pour la nécessité de la création du Parti de la classe ouvrière. Partant d’une cellule qu’il animait, PF œuvra pour le rassemblement des marxistes-léninistes (m.l) pour créer le Parti Communiste et unir le Peuple. Tenant compte de la dispersion des m.l dans des groupes divers, fut créée en juillet 1976, l’Union des Communistes du Dahomey (l’UCD) comme préfiguration du Parti à créer. L’arrestation de ses militants avec les documents précipita la proclamation de l’UCD en septembre 1976. Même à ce niveau, des tergiversations se sont fait jour entre ceux qui pensent qu’il faille d’abord rassembler les moyens et matériaux avant la création du Parti et ceux qui pensent que toute organisation se crée d’en haut, une fois sa ligne (générale et tactique du moment) définie et une direction et un minimum de militants obtenue. La victoire de ces derniers aboutit à la proclamation du Parti Communiste du Dahomey en décembre 1977.
Le Parti était clandestin puisqu’une autocratie sévissait mais pas une secte. Mais il doit s’adresser au peuple. Des papiers, des journaux clandestins, des graffiti étaient effectués, portés et commentés par les militants partout : amphi, écoles, bureaux, ateliers, quartiers et villages. Mais le Parti luttant pour les libertés politiques luttait pour sa légalité en tant que moyen de développer sa propagande. C’est ainsi que le Parti a pu œuvrer à l’éveil de la jeunesse et des peuples, malgré les répressions sauvages : prisons, les tortures, les assassinats. Avec l’aide du PCD (actuellement PCB) les masses se levèrent en 1988-1989 pour abattre l’autocratie ! Elles ont conquis dans la rue le droit de grève, le droit d’expression, le droit de manifestation, de presse, de culte etc. Les masses dans leurs comités d’Action dénonçaient les maires et DG corrompus et en destituaient avec le mot d’ordre de contrôle populaire de la gestion du bien public.
Dès lors, le problème qui se posait était celui : Quel pouvoir pour garantir ces droits, et instaurer le respect du bien public ? Seul le pouvoir des travailleurs et des peuples, le pouvait et c’est ce qu’a défendu le PCD (PCB). C’est alors qu’à la faveur de la situation internationale d’alors, caractérisée par une contre-révolution mondiale conjuguée à une faible conscience anti-impérialiste des travailleurs et de la jeunesse, l’impérialisme français rassembla tous les hauts-bourgeois qui avaient dirigé et détruit le pays depuis 1960 pour organiser le marché de dupes qu’est la Conférence nationale de février 1990. La conférence consacra les semi-libertés mais rejeta le jugement des tortionnaires et des pilleurs, octroya une immunité personnelle à leur chef : Mathieu Kérékou. La Conférence nationale consacra ainsi l’impunité des crimes politiques et économiques, autorisant le pillage qui s’est amplifié au fil du temps depuis 1990. Comme le montrent aujourd’hui les révolutions en Tunisie et en Egypte, un dictateur déchu doit être dégagé du pouvoir, jugé et châtié. C’est le minimum pour construire le nouveau. Chez nous, Kérékou a obtenu une immunité personnelle et a pu ainsi revenir au pouvoir, détruire le pays pendant 10 ans et nous filer son protégé YAYI Boni qui œuvra à reprendre les droits conquis de hautes luttes par le peuple.
Vingt ans après, tout le monde reconnait que le PCD (PCB) avait raison, que la conférence nationale a été un marché de dupes. Vingt ans après, la situation internationale a évolué. La crise financière mondiale a montré la faillite des promesses faites par les impérialistes aux ouvriers et au peuple. L’éthique universelle a progressé et les mots de transparence dans la gestion, de contrôle populaire sont devenus légitimes ; l’insurrection contre un dictateur sans attendre une échéance électorale est reconnue comme un droit légitime et souverain du peuple. C’est dire que l’évolution donne entièrement raison au PCB. Mais pour vaincre, il ne suffit pas seulement d’avoir raison, il faut se battre, rassembler un rapport de forces afin d’écraser l’ennemi et prendre le pouvoir.
Chers jeunes amis.
Vous ne devez pas suivre ces communications comme des leçons débitées du haut de la chaire d’amphithéâtre par un professeur et qu’on oublie dès sortie des cours. Ce que vous aurez entendu et appris lors de ce séminaire doit être mis en application. C’est cette application qui déterminera le sort de la jeunesse aujourd’hui en déshérence et en souffrance. C’est la mise en œuvre de ces thèmes qui décidera de l’avenir heureux de notre pays, le Bénin par l’accomplissement de la révolution appelée.
Pour cela, je me dois de vous dire ceci : l’histoire nous enseigne que rien de grand et de beau ne se fait sans passion et sans sacrifice. Ceci tant dans les domaines de la recherche, de la production que de la lutte de classes. Cette vérité s’affirme tous les jours sous nos yeux. Les jeunes Tunisiens nous en offrent l’exemple, les jeunes Egyptiens poursuivent aujourd’hui dans cette voie. Des générations passées de combattants révolutionnaires de notre pays ont assumé cette vérité. Sans les sacrifices de vos devanciers dans le Parti (dont en particulier Pascal FANTODJI et ses disciples que nous sommes –encore vivants- sans les sacrifices de ceux qui ont donné leur vie, je veux citer AKPOKPO GLELE Rémy, Luc TOGBADJA, MAMA Yari Moussa, Dansou Maurice, KPOMASSI Sègla, OROU GBEA SIANIN, SOUATINKI etc. il n’y aurait pas la demi-révolution de 1989-1990 et que l’on nomme Renouveau Démocratique. Il n’y aurait pas les semi-libertés actuelles. C’est pourquoi, je vous dis : « Jeunes de mon pays ! Et plus particulièrement Jeunes communistes ! Battez-vous avec la détermination du lion pour libérer notre pays des griffes des vandales qui le détruisent ! Parcourez monts et vallées ! N’ayez cure des ronces, des pluies et forêts pour assumer votre mission historique. Alors vous mériterez de nos fiers Aïeux qui nous ont légué le présent ! » C’est sur ces mots que je souhaite pleins succès à vos travaux.
A Bas le Pouvoir mafieux et tyrannique de Boni YAYI
Vive le Pouvoir des Travailleurs et des peuples
Vive le PCB
Cotonou, le 23 juillet 2013
Philippe NOUDJENOUME
1e secrétaire du PCB
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