Psaume 12.
Au secours,Yahvé ! il n’y a plus d’hommes fidèles ;
La loyauté a disparu d’entre les fils d’Adam.
On ne fait que mentir, chacun à son prochain,
Lèvres trompeuses, langue d’un cœur double.
Que Yahvé retranche toute lèvre trompeuse,
La langue qui fait de grandes phrases,
Ceux qui disent : « La langue est notre fort,
Nos lèvres sont pour nous, qui serait notre maître ?»
À cause du pauvre qu’on dépouille, du malheureux qui gémit,
Maintenant je me dresse, déclare Yahvé :
J’assurerai le salut à ceux qui y aspirent.
Les paroles de Yahvé sont des paroles sincères,
Argent natif qui sort de terre,sept fois épuré ;
Toi, Yahvé,tu y veilleras.
Tu le protègeras d’une telle engeance à jamais.
De tous côtés les impies s’agitent,
La corruption grandit chez les fils d’Adam.
*
Psaume 14
L’insensé dit en son cœur :
« Non, plus de Dieu ! »
Corrompues, abominables leurs actions ;
Personne n’agit bien.
Des cieux Yahvé se penche
Vers les fils d’Adam,
Pour voir s’il en est un de sensé,
un qui cherche Dieu.
Tous ils sont dévoyés,
ensemble pervertis.
Non, personne n’agit bien,
non, pas un seul.
Ne le savent-ils pas, tous les malfaisants ?
Ils mangent mon peuple,
voilà le pain qu’ils mangent,
ils n’invoquent pas Yahvé.
Là, ils se sont mis à trembler,
car Dieu est pour la race du juste :
vous bafouez la révolte du pauvre,
mais Yahvé est son abri.
Qui donnera de Sion le salut à Israël ?
Lorsque Yahvé ramènera les captifs de son peuple,
allégresse en Jacob et joie pour Israël !
*
Dieu doit bien rire si ceux qui, comme avant J.C, crient aujourd’hui au secours attendent, opportunistes inspirés, bras croisés, profil bas, l’opportunité de créneaux où ils ramperont s’insérer ; aujourd’hui plus qu’au 20è siècle sont d’actualité les prédictions d’Emmanuel MOUNIER[] écrivant à son ami Alioune DIOP, semblait déjà pointer du doigt l’élite et l’intelligentsia du Dahomey qu’il considérait comme le Quartier latin de l’A O F, et non d’Afrique.
LETTRE A UN AMI AFRICAIN
« Il ne faut pas cacher sa vérité a votre génération, a la première génération de cadres africains. Elle ne sera pas une génération triomphante, elle est et restera une génération déchirée. Vous êtes Africains dans votre chair vive, par votre enfance, par votre éducation, par le milieu ou vous avez longtemps vécu. Et vous êtes Européens par une autre partie de vous-même, par cette langue que vous avez apprise et qui vous informe à votre insu, par tout ce que l'Europe a déjà introduit en Afrique de ses techniques et de sa culture, par ce que vous êtes allés, quelques-uns, puiser en Europe même. La civilisation eurafricaine, dont vous êtes les pionniers, n’a pas encore trouvé ses structures. Provisoirement, vous devez porter en vous ces deux sollicitations, sans pouvoir, en l’espace d’une vie, en faire la jonction, moins encore la synthèse.
C’est ici que vous menace la tentation de sortir du déchirement par n’importe quel moyen, de refuser la tension féconde et douloureuse pour le compromis ou l’évasion. Je vois deux routes dangereuses.
Plusieurs d’entre vous sont enclins à mépriser cette Afrique qui les tire en arrière, comme ces jeunes Européens issus de milieux simples, qui, découvrant la culture ou le luxe, deviennent ennemis de leur propre passé. Ils embrassent plus ou moins explicitement le mépris de certains blancs pour les choses africaines. Ils se font ainsi complices du dédain racial, croyant s’en libérer par cette sorte de reniement inconscient. Or vous savez bien qu’on ne se débarrasse pas de l’Afrique, pas plus que personne, des racines qui le portent et de l’air qu’il respire. Ces renégats n’arriveront qu’a produire, dans l’écume de quelques grandes villes, de faux Européens, des Européens en contre-plaqué, qui ne seront ni d’Europe, ni d’Afrique, mais de la patrie lamentable des ratés et des pantins. »
[1] cf. La Bible de Jérusalem, édits Cerf, Paris.
[2] Philosophe personnaliste, fondateur de la revue Esprit ; l’extrait de sa lettre cité ici est du n° 1 de la revue Présence Africaine ; je précise que dans Années du Bac de Kouglo, mon vrai premier roman, le personnage évoque Emmanuel Mounier : il était à Saint-Germain des Prés quand tomba, en 1950, la nouvelle du décès du philosophe.
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