Depuis 2008, année ou l’actuel régime était pleinement aux commandes, jusqu’à nos jours, la situation des Libertés, et la conformité de la vie sociopolitique du pays aux mœurs démocratiques ont fini par présenter leur visage propre. Ce visage est caractérisé par des avancées symboliques, comme sur le sujet de la peine de mort, mais aussi des reculs ou des persistances comme en ce qui concerne, l’aggravation des conditions carcérales, les violations de la liberté d’expression, la corruption au plus haut sommet de l’Etat, et d’une manière générale l’hégémonie politique du régime qui a fini par réduire l’opposition à la portion congrue. Nous présentons ici l’évolution de la situation des Droits de l’Homme au Bénin, telle qu’auscultée par Amnesty International entre 2008 et 2013. |
2013 Rapport Amnesty International sur le Bénin
Le gouvernement a tenté de réprimer les voix dissidentes tout au long d’une année marquée par des désaccords concernant la gouvernance et un projet de révision constitutionnelle. Le Bénin a ratifié le Deuxième protocole facultatif se rapportant au PIDCP, qui vise à abolir la peine de mort. Liberté d’expression
Conditions carcéralesLes prisons étaient toujours surpeuplées. Dans la prison de Cotonou, le nombre de prisonniers était six fois supérieur à la capacité de l’établissement, d’où des conditions de vie très éprouvantes pour les détenus. Selon les chiffres officiels, 97 % des quelque 2 250 personnes incarcérées se trouvaient en détention provisoire. Peine de mortEn juillet, le Bénin a ratifié le Deuxième protocole facultatif se rapportant au PIDCP, qui vise à abolir la peine de mort. À la fin de l’année, le gouvernement n’avait pas encore promulgué les lois visant à supprimer totalement la peine capitale de la législation nationale. 2012 Rapport Amnesty International sur le Bénin Chef de l’État et du gouvernement Thomas Boni Yayi Peine de mort abolie en pratique Population 9,1 millions Espérance de vie 56,1 ans Mortalité des moins de cinq ans 118 ‰ Taux d’alphabétisation des adultes 41,7 %
Le président Boni Yayi a été réélu en mars, sur fond de contestation par les partis d’opposition de la liste électorale permanente informatisée qui, selon eux, écartait une fraction significative de l’électorat. La hausse des prix des produits de base a généré une certaine agitation sociale. En mai et juin, des fonctionnaires qui réclamaient des augmentations de salaire se sont mis en grève. Répression de la dissidenceEn mars, les forces de sécurité ont dispersé des manifestations organisées par des opposants qui contestaient la réélection du président Boni Yayi. Certains d’entre eux, dont le parlementaire Raphaël Akotègnon, ont fait l’objet d’un bref placement en garde à vue. Peine de mortEn août, le Bénin a franchi une étape importante sur la voie de l’abolition : l’Assemblée nationale a voté en faveur de la ratification du Deuxième Protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits civils et politiques. À la fin de l’année, le processus de ratification était toujours en cours. Conditions carcéralesLes prisons étaient toujours surpeuplées. Dans la prison de Cotonou, le nombre de prisonniers était six fois supérieur à la capacité de l’établissement, d’où des conditions de vie très éprouvantes pour les détenus. D’après les chiffres officiels, 99 % des 2 300 personnes incarcérées étaient en détention provisoire. 2011 Rapport Amnesty International sur le Bénin
Chef de l’État et du gouvernement Thomas Boni Yayi Peine de mort abolie en pratique Population 9,2 millions Espérance de vie 62,3 ans Mortalité des moins de cinq ans (M/F) 123 / 118 ‰ Taux d’alphabétisation des adultes 40,8 % Des restrictions étaient imposées à la liberté d’expression et de réunion. Au moins une condamnation à mort a été prononcée. Les conditions carcérales demeuraient éprouvantes en raison de la surpopulation. Liberté d’expression et de réunionEn octobre, le ministère de l’Intérieur a interdit toutes les manifestations visant à obtenir des informations sur le sort de Pierre Urbain Dangnivo, un fonctionnaire du ministère des Finances disparu au mois d’août. Les soupçons relatifs à une éventuelle implication de responsables gouvernementaux ont déclenché une vague de protestation parmi les journalistes et au sein de la société civile et des partis d’opposition. À la fin de l’année, l’enquête officielle n’avait toujours pas fait la lumière sur cette disparition. De nombreux groupes issus de la société civile, y compris des syndicats, ont dénoncé les restrictions imposées à la liberté d’expression et de réunion. Peine de mortEn mai, la cour d’assises d’Abomey (ville du centre du pays) a condamné Susanne Lanmanchion à mort par contumace pour le meurtre de sa mère. Conditions carcéralesLes prisons étaient toujours surpeuplées. Dans la prison de Cotonou, première ville du pays, le nombre de prisonniers était six fois supérieur à la capacité de l’établissement, d’où des conditions de vie très éprouvantes pour les 2 500 détenus présents. Ces effectifs étaient composés à 80 % de personnes placées en détention provisoire. 2010 Rapport Amnesty International sur le Bénin Chef de l’État et du gouvernement Thomas Boni Yayi Peine de mort abolie en pratique Population 8,9 millions Espérance de vie 61 ans Mortalité des moins de cinq ans (M/F) 123 / 118 ‰ Taux d’alphabétisation des adultes 40,5 % Plusieurs manifestations ont été interdites. Au moins une personne est morte en détention, apparemment à la suite de mauvais traitements. Les conditions carcérales demeuraient éprouvantes en raison de la surpopulation. Au moins cinq personnes ont été condamnées à mort. Liberté de réunionEn mai, les autorités ont invoqué des raisons de sécurité pour interdire tout rassemblement public dans deux départements du nord du pays. En juillet, elles ont prohibé plusieurs manifestations organisées par les syndicats à Cotonou pour dénoncer la corruption et le renchérissement des produits de première nécessité. Torture et autres mauvais traitements – mort en détention
Conditions carcéralesLes prisons continuaient d’être surpeuplées. Dans celle d’Abomey, située dans le centre du pays, le nombre de prisonniers était apparemment six fois supérieur à la capacité de l’établissement, d’où des conditions de vie très éprouvantes pour les détenus. Peine de mortAu moins cinq personnes ont été condamnées à mort par contumace, en novembre et en décembre, par la cour d’appel de Parakou. La dernière exécution remonterait à 1987. 2009 Rapport Amnesty International sur le Bénin Chef de l’État et du gouvernement Thomas Boni Yayi Les conditions carcérales étaient très éprouvantes et ne satisfaisaient pas aux normes internationales. Des membres des forces de sécurité responsables de recours excessif à la force jouissaient toujours de l’impunité. ContextePlusieurs manifestations contre le coût élevé de la vie au Bénin ont eu lieu pendant l’année. Les manifestants protestaient contre l’augmentation du prix de produits de première nécessité comme le maïs, le riz, l’huile et le ciment. Conditions carcéralesDans plusieurs établissements pénitentiaires, la forte surpopulation, en grande partie due au grand nombre de détenus en attente de procès depuis des années, rendait les conditions carcérales très éprouvantes. Celles-ci ne satisfaisaient pas aux normes internationales et plusieurs centaines d’enfants étaient détenus avec des adultes. ImpunitéLes membres de la garde présidentielle auteurs présumés des coups de feu qui ont tué deux personnes et blessé au moins cinq autres en mai 2007 à Ouidah, à 35 kilomètres à l’ouest de Cotonou, la capitale, n’avaient toujours pas été jugés fin 2008. Une enquête a été ouverte sur cette affaire mais ses résultats n’ont pas été rendus publics. Peine de mortEn mai, le Bénin a été soumis à l’examen périodique universel (EPU) des Nations unies et s’est engagé à appliquer un moratoire sur les exécutions. Le Groupe de travail de l’EPU a recommandé au Bénin de ratifier le deuxième Protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits civils et politiques, visant à abolir la peine de mort. Visites d’Amnesty InternationalUn représentant d’Amnesty International s’est rendu au Bénin en novembre.
2008 Rapport Amnesty International sur le Bénin Chef de l'État et du gouvernement : Thomas Boni Yayi Des membres de la garde présidentielle ont ouvert le feu sur une foule, en mai, faisant deux morts. La surpopulation chronique constituait un problème dans plusieurs prisons. ContexteEn mars, des hommes armés ont fait feu sur le cortège du président Thomas Boni Yayi, blessant au moins quatre de ses gardes du corps. L'entourage du président – qui n'a pas été blessé – a qualifié cette attaque de tentative d'assassinat et l'a attribuée à des assaillants opposés à sa campagne de lutte contre la corruption. Selon d'autres sources, les auteurs n'étaient que des bandits ordinaires. Sept personnes ont par la suite été arrêtées ; à la fin de l'année, elles étaient toujours détenues sans avoir été jugées. Au mois de mars, la coalition du président a remporté les élections législatives. Police et forces de sécurité – recours abusif à la forceEn mai, des membres de la garde présidentielle ont tué deux personnes et blessé cinq autres au moins à Ouidah, à 35 kilomètres à l'ouest de Cotonou, la plus grande ville du pays. Les gardes ont tiré sur un groupe de personnes qui protestaient, semble-t-il, parce qu'une route était restée bloquée après le passage de la voiture du président. Edgar Alia, alors ministre de la Sécurité publique, a annoncé qu'une enquête avait été ouverte sur ces coups de feu. À la fin de l'année cependant, les résultats des investigations n'avaient pas été rendus publics. Conditions carcéralesDans plusieurs établissements pénitentiaires, la forte surpopulation rendait les conditions carcérales particulièrement éprouvantes. Ainsi les prisons de Cotonou et d'Abomey, dans le centre du pays, abritaient jusqu'à six fois le nombre de détenus pour lequel elles avaient été construites. |
Au total, au vu de ce rapide survol de la situation des Droits de l’Homme au Bénin, telle qu’elle a été auscultée pat Amnesty International, le mot qui vient à l’esprit en ce qui concerne l’expérience démocratique du Bénin est le mot Recul. Ce recul signe la mise en danger des acquis du Renouveau Démocratique, et met en lumière l’affaiblissement ou la récupération politique -- ce qui revient au même -- de la Société Civile, et d’une partie des ONG locales de surveillance des Droits de l’Homme. Le procédé devenu classique qui consiste a créer de toute pièce des Organisations civiles fantoches ou des Syndicats dits « patriotes » pour contrer les justes revendications des travailleurs et des syndicats établis participe de cette logique de consensus frauduleux et de déni de liberté propre au régime. Ce constat est d’autant plus grave qu’il ne découle pas de la seule suivie d’une seule ONG Internationale, aussi importante soit-elle, mais est le résultat convergent de différents palmarès de mesure des Libertés Fondamentales et de suivi de la Rationalité légale au Bénin. En espérant qu’il n’est pas encore trop tard pour redresser la barre, il est temps que le peuple du Bénin, la Société Civile et tous les hommes de Bonne Volonté unissent leurs efforts pour redonner à l’expérience Démocratique du Bénin son lustre d’antan, et la place de choix qu’elle occupait naguère non seulement en Afrique mais dans le monde. Binason Avèkes |
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