La Théorie des Trois Docteurs Ou Comment fabrique-t-on un Président Béninois.
Par Binason Avèkes |
Critique de la bonne volonté sociologique Depuis le 1er août 1960 jusqu’à nos jours, le Dahomey puis le Bénin a connu un nombre relativement élevé de Présidents. Avec des retours et des durées variables, 13 hommes ont présidé ou tenté de présider aux destinées du pays. Ce sont : Hubert MAGA, Sourou MIGAN APYTHY, Justin AHOMADEGBE, Christophe SOGLO, Tahirou CONGACOU, Iropa Maurice KOUANDETE, Alphonse ALLEY, Emile Derlin ZINSOU, Paul-Émile de SOUZA, Mathieu KEREKOU, Nicéphore SOGLO, Thomas Boni YAYI. De ce fourmillement d’hommes politiques au sommet de l’état, s’est dégagé peu à peu le type de Président politiquement agréable pour l’électeur béninois. Tributaire des valeurs élitistes enracinées dans l’imaginaire national, ce type traduit aussi la part fondamentale et active que prend dans la politique le facteur intellectuel. L’homme d’état politiquement rassurant pour le Béninois apparaît donc sous la figure du Docteur, qui n’est que l’un des déterminants de son type. C’est l’examen critique et analytique de ce type qui fait l’objet de la présente étude. I. Le Vrai Docteur A. Histoire et acteurs de la Présidence. Marquée pendant une première période par l’instabilité chronique, la Présidence béninoise a connu pendant douze ans des formes variées. Ainsi à sa naissance en tant que nation indépendante, le Dahomey a-t-il connu un régime démocratique de type présidentiel, avec un Président démocratiquement élu, un Vice-président nommé, face à une Assemblée nationale tout aussi démocratiquement élue. Mais ce bel édifice ne tardera pas à vaciller sous les coups de boutoirs des intrigues tribalistes, des logiques régionalistes et des ambitions personnelles, source de discorde dans une nation jeune qui n’avait pas reçu l’unité en héritage. Dans son noyau interne, la Présidence était exposée à de vives tensions personnelles et politiques. La Vice-présidence devint itinérante en 1963 avec la nomination de Sourou MIGAN APITHY dont le poste n’était pourtant pas déclaré vacant comme Ambassadeur du Dahomey en France. Cette mise à l’écart n’empêcha pas la présidence d’être exposée à de nouveaux soubresauts. La Présidence devint militaire pour la première fois avec l’accession au pouvoir du Chef d’Etat-major de l’Armée, le colonel Christophe Soglo. Mais cette présidence s’est voulue provisoire, et en 1964, fut remplacée par une Présidence à nouveau démocratique, en la personne de Monsieur APYTHY. Il y avait aussi un Vice-président en la personne de Monsieur Justin AHOMADEGBE, qui était aussi chef du gouvernement. Mais le 17 novembre 1965, par un coup de poker pseudo-populaire, et anticonstitutionnel, la présidence fut accaparée par le Vice-président, Monsieur Justin AHOMADEGBE. Cette saisie fit long feu. Sous la pression de l’Armée, le noyau présidentiel en conflit fut dynamité : Président et Vice-président durent rendre leur tablier, en une démission âprement négociée. La Présidence devint alors intérimaire le 29 novembre 1965 en la personne de M. Taïrou CONGACOU qui jusque-là était Président de l’Assemblée nationale. Mais le 22 décembre 1965, même et peut-être parce qu’intérimaire, la Présidence fut acculée à la démission par des forces politiques hostiles, manipulées dans l’ombre par des hommes obsédés d’exercer la fonction, et qui étaient prêts à tout pour atteindre leur but. Dans ces conditions, la Présidence devint militaire derechef, le 22 décembre 1965, sous la houlette bien pensante du Général Christophe |
Commentaires
Vous pouvez suivre cette conversation en vous abonnant au flux des commentaires de cette note.