Dans une démarche de subversion heuristique, on peut naïvement assimiler les pays francophones africains aux DOM-TOM français. L'argument essentiel résidant dans l'influence asphyxiante de la France incarnée par ce qu'on appelle la Françafrique. Cette assimilation vient de ce que tout le monde sent à travers le système néocolonial, que nous ne sommes pas nous-mêmes, nous ne nous appartenons pas tout à fait, nous ne sommes pas dans notre assiette mentale ni politique. Alors on se dit que finalement un Sénégal, une Côte d'Ivoire ou un Bénin c'est un peu comme la Martinique, la Nouvelle-Calédonie ou Wallis-et-Futuna, à la différence près que les uns seraient représentés à l'ONU et les autres pas ; ou des artéfacts différentiels du même ordre. C'est vrai que, comme on le vit de façon plausible actuellement en Côte d'Ivoire, les blancs décident de la pluie et du beau temps chez nous. Ils nomment nos présidents et animent en coulisse nos gouvernements comme des marionnettistes animent un théâtre d'ombres chinoises. Sur cette question de l'indépendance en trompe-l’œil, il est important de rappeler que cette réalité ne date pas d'aujourd'hui ni de ce qu'on a appelé la fin de la colonisation. En Afrique, l'aliénation politique se situe en fait en amont et en aval de la période coloniale proprement dite. Les blancs manipulaient et contrôlaient subtilement les royaumes de nos ancêtres d'avant la colonisation. C'est cela qui leur permettait de faire guerroyer ces royaumes les uns contre les autres pour récolter le maximum d'esclaves pour les négriers. Ils avaient amassé sur chacun de ces royaumes suffisamment d'informations et disposaient de suffisamment de moyens techniques, savants, militaires et financiers pour dicter en cas de besoin leur volonté à chacun de ces royaumes. Et c'est la même chose qui a repris après la soi-disant fin de la colonisation, où ils ont redéployé le jeu de leur ascendance sur nous en se rengorgeant naturellement dans leur paternalisme historique. Et, mort aux dirigeants africains qui ne l'entendraient pas de cette oreille : Béhanzin ou Gbagbo, Samory Touré ou Sankara en ont eu pour leurs frais de part et d'autre de la période coloniale. Tout cela étant dit, en quoi l’assimilation de nos pays africains aux DOM-TOM français est-elle erronée ? Cette assimilation est trompeuse en ce que le critère de la dépendance seule ne suffit pas. La grande différence entre les pays africains francophones et les DOM-TOM réside dans le fait que c'est la France qui finance les DOM-TOM tandis que, pour aller
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vite, ce sont les pays africains francophones qui financent la France.
La fonction politique, géopolitique et économique des pays africains néo-colonisés est de servir de vache à lait au système économique français. Sans cet appendice multiforme qui constitue à la fois une source de débouchés mais aussi de ponction-pillage des ressources et matières premières, l'économie française sinon la France elle-même serait déjà à bout de souffle depuis des décennies. C'est donc avec l'institution continue d'un tel rapport de dépendance et de domination que les Français décident de tout ce qui se passe chez nous dans leur seul intérêt. Comme les forts et comptoirs du temps de l'esclavage, nos soi-disant nations ou pays sont des établissements d'expansion de la rapine et du capitalisme raciste français. Par la domination politique historiquement structurée, les entreprises françaises dirigent tout, décident de tout, possèdent tout et laissent tout au plus des miettes à la bourgeoisie nationale compradore qui leur sert de marchepied et de faire-valoir. Cette bourgeoisie est si rompue à l'idéologie du pillage que la joie de sa position servile constitue en dernier ressort le principe même de l'automatisme destructeur du néocolonialisme. En conclusion, l'assimilation entre DOM-TOM et pays africains francophones qui se voulait une subversion heuristique, un raccourci pour mieux faire comprendre notre tragédie, contient en elle une erreur d'appréciation sinon de jugement. La métaphore tourne court. Car à l’instar de la période d’avant la colonisations, nos pays ne sont au mieux que des TOM-DOM, c’est-à-dire des Territoires Occupés, Manipulés et Dominés. De ce fait mieux vaut être Wallis-et-Futuna que Sénégal, DOM-TOM que TOM-DOM !
Éloi Goutchili
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Si je comprends bien, et je me demande si nous Africains en sommes bien conscients, ce qu'on appelle le néocolonialisme ce n'est en fait que du Précolonialisme... Le néo-colonialisme est un oxymore, car il n'a rien de néo,et tout y est arkhè ou anté... On devrait plutôt dire Antécolonialisme
Rédigé par : Toglossou Antoine | 23 août 2012 à 12:28