Ne trouvez-vous pas bizarre ce fait ? Le Mali était en proie au nord à un groupe de « rebelles » lié à AQMI, conséquence, entre autres choses du désordre instauré en Libye par l'Occident chrétien capitaliste. Et personne, surtout pas la CEDEAO, n'a levé le petit doigt pour voler au secours de ce pays africain. Or, voilà que le gouvernement en place fait l'objet d'un coup d'État, et la même CEDEAO menace les putschistes d’intervention. Il y a eu d'abord le concert bien-pensant de condamnations rituelles par les Occidentaux, qui eux aussi ne disaient rien quant à l'agression des rebelles dans le nord du Mali, et qui se réveillent tout à coup parce qu'il y aurait coup d'état. Conformément au mythe-prétexte de la vigilance démocratique, il n'y a donc que les coups d'État qui intéressent les nations occidentales. Et pourtant, peut-on vraiment dire qu’elles n’y sont pour rien dans la guerre déclarée au nord du Mali ? Au-delà de l'utilisation de la guerre comme moyen de pression néocolonialiste, et nonobstant la dimension islamiste du conflit, les occidentaux ne peuvent être considérés comme en reste dès lors qu'ils sont les premiers producteurs et pourvoyeurs des armes de guerre en circulation en Afrique. Et, partout où la guerre éclate, c'est toujours du bien qu'elle fait à leur économie. La guerre au nord du Mali n'est pas pour eux un casus belli ; tandis que le coup d'État est une raison d'inquiétude. Le tollé africain quant à lui se comprend lorsqu'on élargit la problématique sous l'angle de la fraternité interafricaine. Comment se fait-il qu'il n'y ait pas le même concert de menaces d'intervention contre les rebelles du Nord, comme si leurs actions étaient normales, inscrites dans le cours régulier des choses ; et puis tout à coup on veut intervenir au Mali parce qu'il y a coup d'État ? Dans cette surenchère interventionniste, chacun a pourtant ses raisons et ses intérêts bien compris. Le Bénin qui est aussi à la tête de l'Union Africaine actuellement, par la voix de son président, se fait le chantre zélé de l'intervention dans une logique de va-t-en-guerre pour le moins irresponsable. Pourquoi ? Tout simplement parce que, dans la droite ligne de la démocratie théâtrale en vigueur en Afrique, le président de ce pays s'est fait réélire, il n’y a du reste pas si longtemps que ça, à coups de fraude, de trucage sur fond de mépris de la volonté populaire. Le coup d'État du Mali est vécu par les faiseurs de holdup électoral de Cotonou comme un avertissement, une menace à la solidité de leur règne. Si les soldats maliens sont capables de renverser un régime considéré par tous comme démocratique, qu'en serait-il d'un régime béninois fondé sur la fraude électorale, l'arbitraire, le mépris de la volonté et des droits démocratiques du peuple ? C'est de crainte que le cas malien ne fasse école et boule de neige que le président Béninois joue les va-t-en-guerre. Et non pas pour je ne sais quel attachement à je ne sais quelle démocratie dont toute sa démarche, son éthique, son tempérament et ses manières de faire au Bénin prouvent tout le contraire. C'est dans ce même esprit d'intérêt personnel qu'il faut comprendre les gesticulations de M. Ouattara, l'homme qui préside de façon honteuse aux destinées de la Côte d'Ivoire sans se soucier du fait qu'il est le vil instrument que les Blancs ont choisi en cette terre africaine pour continuer de narguer les Noirs, les mépriser, les dominer et les exploiter. Le fait que Ouattara soit leur boy ne le dérange pas, dès lors que la joie du Burkinabé présumé d'être imposé président de la Côte d'Ivoire l'emporte sur tout autre considération ou scrupule moral. La vie n'est-elle pas ce qui arrive et non ce qui doit arriver, ou est recommandable devant l’histoire ?
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La vie--surtout la vie politique n’est-elle pas le règne du fait accompli ? Et rien ne cèderait devant cette vérité, pas même la honte d'avoir aidé l'étranger à humilier sa propre race dans son frère au seul motif que celui-ci serait un ennemi. Ce que recherche Ouattara dans son zèle interventionniste au Mali --tout au moins dans les rodomontades--c'est faire oublier qu'il est lui-même le fils d’un coup d'État et de la veulerie occidentale. C'est le coup d'État perpétré par la bande à Soro et d'autres--qu'on a d'ailleurs très vite fait d'éliminer aussitôt venu au pouvoir et ce dans le silence assourdissant d'un Occident d’habitude si féru de droits de l'homme--qui a été à l'origine des perturbations, prétexte saisi par la France pour réaffirmer son droit de propriété historique en Côte d'Ivoire. En jouant les amis de la démocratie au Mali, M. Ouattara veut faire oublier tout le sang versé dans les coups d'État successifs et la guerre qu’il a menée pour rendre la Côte d'Ivoire de Gbagbo, comme il a promis lui-même, ingouvernable. Anadoji Bôdugbè |
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