À condition qu'il y ait la paix, l'urgence de l'Afrique n'est pas la démocratie. Après tout, la Chine, sous nos yeux se développe et devient même la deuxième puissance économique, peut-être bientôt la première sans passer par la démocratie ; ou du moins ce qu'en Occident on appelle démocratie. De même dans les années 70 sous la férule des généraux, la Corée du Sud a pris son envol économique au point de devenir aujourd’hui de nos jours un pays prospère. Tous ces pays et bien d'autres se développent ou se sont développés sans se soucier de la Démocratie. Alors que c'étaient là des sociétés qui ont une longue tradition d'écriture, une culture capable de soutenir la comparaison sinon plus avec l'Occident et qui possède les atouts intégrés qui permettent à une société d'avancer dans la créativité, dans l'intériorisation des savoir-faire, et l'organisation collective pour un progrès durable.
Ceux qui font de la démocratie le critère exclusif et premier de la politique et du développement en Afrique ont seulement trouvé là un beau prétexte pour continuer à l'influencer, la dominer politiquement et surtout l'exploiter comme naguère ce fut le cas lorsqu’on parlait de civiliser l'Afrique, de la coloniser contre elle-même, de l'humaniser etc. Ce qu'il faut en Afrique c'est s'approprier de l'écriture et surtout de nos langues africaines pour les mettre au service du développement culturel et intellectuel du plus grand nombre de façon à ce que les vertus d'unification inhérentes à nos systèmes symboliques portées au niveau de la masse et par la masse puissent se manifester dans l'organisation collective et la capacité de résister aux forces impérialistes de domination qui multiplient toutes sortes d’intrigues, de ruses, de pièges pour tenir la conscience africaine dans l'obscurité. Avec une écriture développée et les langues africaines appropriées, l'Afrique aura la puissance symbolique nécessaire pour avancer dans le développement ; elle acquerra ainsi la discipline de fer pour exécuter les mots d'ordre du développement. Le peuple sera plus éclairé, et comprendra
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les enjeux de la vie politique, qu’ils soient nationaux ou internationaux. Et le développement ainsi enclenché passera par le travail, l'organisation locale active, la décentralisation oui voire une démocratie locale dans une nation dirigée avec force, harmonie et justice. C'est dire que la démocratie n'est pas une urgence d'Afrique et ceux qui s'acharnent à l'imposer ou à en faire un critère absolu sont des intrigants, des marchands d'illusion qui ne cherchent qu'à emberlificoter les Africains pour mieux les dominer. L'Afrique a besoin de lumière ; l'Afrique a besoin de conscience ; l'Afrique a besoin de capacités d'organisation intrinsèque ; elle a besoin de justice : justice à l'intérieur mais avant tout justice dans son rapport avec l'extérieur. Cette justice qui a manqué à travers le sort brutal et le traitement inhumain que l'Occident lui a réservés depuis plusieurs siècles ; cette justice qui continue de manquer à travers la volonté cynique des Occidentaux de continuer à concevoir de l'Afrique le terrain de toutes leurs actions sordides de domination, d'exploitation et d'avilissement de l'homme par l'homme. Par rapport à ce programme et cette orientation nécessaires, le modèle de l'Afrique se trouve plus du côté de la Chine que du côté de l'Occident, dont le système démocratique lui-même reste sujet à caution. Éloi Goutchili
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