Le véritable problème de l'Afrique n'est pas l'unité. Et, sous ce rapport, et sauf son respect, Kwame Nkrumah qui ordonnait à l'Afrique de s'unir s'est trompé. Le véritable problème de l'Afrique, son problème principal dont tous les autres découlent est le manque d'intelligence. L'Afrique n'est pas intelligente ou, pour le dire de façon plus optimiste et moins brutale, on dira qu'elle ressemble à ces ordinateurs dont n'est utilisée qu'une infime partie des capacités de calcul. Dès lors, l'impératif programmatique de l'Afrique n'est pas : « Africa Must unite ! » mais plutôt : « Africa Must be intelligent ! » L'unité n'est qu'une conséquence de l'intelligence et l'intelligence ou du moins son manque est à la source de tous les maux dont souffre l'Afrique actuellement : la corruption, les guerres, les fraudes électorales, les famines, les dictatures etc. La mesure dans laquelle les dissensions, les déchirures politiques, sociales et ethniques, les guerres et les calamités qui secouent l'Afrique régulièrement sont plus la traduction d’un manque d'intelligence que de l'existence de causes objectives de désunion peut être prouvée de mille manières, notamment de façon comparée. Prenez un pays comme la France ; sa société politique est diversifiée : elle va de l'extrême gauche à l'extrême droite. La France a une longue et grande tradition de contestation et de liberté d'expression. Au regard de cette diversité et de ce droit qui d'ailleurs s'expriment de façon régulière on doit s'attendre à plus de voix discordantes lorsqu'il s'agit par exemple de politique extérieure. En effet ce ne sont pas les sujets de discorde a priori qui manquent au regard de l'activisme criminel de la France sur la scène internationale : du génocide du Rwanda à l'ingérence dans les affaires internes de la Côte d'Ivoire en passant par l'assassinat crapuleux du colonel Kadhafi dans lequel le président Sarkozy s'honore d'avoir joué un rôle décisif. Tous ces faits, tous ces événements qui agitent l’actualité sont suffisamment graves et chargés d'incitations passionnelles pour susciter des réactions dans la société politique française. Mais c'est le calme plat qui y règne. Aucun parti ne réagit ou n'a réagi. Tout le monde fait comme si de rien n'était et les partis politiques dans leur ensemble respectent le dogme de la politique étrangère de la France considérée comme domaine réservé du président de la république. Au-delà du respect de ce dogme, ce qui est en jeu est bien l'intelligence de ses intérêts que manifestent la société politique de France, ainsi que le peuple français qui en l'occurrence est censé ne rien savoir sinon approuver les actions criminelles que commettent régulièrement ses dirigeants sur la scène internationale.
A contrario en Afrique, dans nos pays où la culture intellectuelle a à peine un siècle d'existence, où la totalité des livres ou des documents écrits véhiculant la culture intellectuelle ne dépasse pas celle d'une ville comme Lyon, et où la démocratie est encore dans les limbes, eh bien, dans des circonstances identiques, que de dissensions oiseuses, que de voix discordantes, que d'oppositions aveugles, que de réactions stupides aurait-on enregistrées au nom de la démocratie ou de la liberté d'expression ? Et ceci, diront nos pseudo-intellectuels, nos pseudo-leaders, au nom de principes dont nous n'avons aucune notion précise, aucune intelligence profonde et qui sont à peine acclimatés chez nous. Et l'on va se mettre à s'étriper, à se saigner, à se massacrer sans savoir ce
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qu'être intelligent veut dire. Ce comportement de singes-savants dont font preuve collectivement ou individuellement les Africains, même hélas et surtout les plus instruits et l'Afrique colonisée ou néo-colonisée, ce comportement débile est la meilleure preuve de notre manque d'intelligence. La colonisation a créé les conditions de brouillage de notre capacité d'intelligence. En s'accaparant de nos systèmes symboliques, en les viciant, les détruisant ou en y substituant les siens, elle nous a enfermés dans le piège absurde de l'inopérationalité intellectuelle. Comment le zèbre peut-il véritablement comprendre les lois de la jungle et s’en protéger efficacement si sa représentation du monde de la jungle doit lui être fournie clé en main par le lion ou par la panthère ? 50 ans après l'indépendance, le problème qui aurait dû se poser en Côte d'Ivoire est de savoir comment et quand le grand nombre de Français qui continuent de se prélasser dans ce pays africain comme au temps colonial doivent faire leurs bagages et céder la place. Au lieu de quoi, a été substituée à cette problématique cruciale et légitime une stupide division Nord-Sud ; Ouattara contre Gbagbo ; au point qu'en signe de pied de nez, la France qui devait normalement être en train de trembler devant les effets palpables de l'intelligence unitaire des ivoiriens, impose sa loi, fait la pluie et le beau temps en Côte d'Ivoire, nomme un burkinabé président de ce pays et envoie le président élu devant une soi-disant cour pénale internationale ! En somme, le monde à l'envers ! Oui parce qu'en Afrique tout est à l'envers à commencer par l’intelligence !
Bouabré Anicet, Agrégé de Philosophie
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dans une de ses dernières productions, Le chanteur Béninois Anice Pepe met bien en paroles et musique la pertinence de votre conclusion et mot d'ordre...
Rédigé par : Thomas Coffi | 17 décembre 2011 à 22:10