C'est par pur ethnocentrisme, une approche essentialiste d'événements a priori spécifiques, généralisation idéologique et manichéenne de faits ou d'événements singuliers, que la presse occidentale a décrété que le soulèvement de la Tunisie, contenait en germe ce qu'elle allait qualifier de « Révolution arabe ». En lui conférant ainsi ce que les linguistes appellent un effet performatif. Quitte à ce que les pays occidentaux, avec leur monture de domination politique nommée ONU, accompagnent le mouvement, et dans la même frénésie ethnocentriste, lui fasse mériter son nom arbitraire. Actuellement, c'est le même sinistre ethnocentrisme qui préside à la censure qui plane sur le bilan humain de la guerre en Libye, et la mort silencieuse de plus de 100 mille libyens sous les bombes de l'OTAN.
Si la révolution est arabe comme l'a dit la presse et les milieux diplomatico-politiques occidentaux, et pour l’être véritablement, elle doit, partie de Tunisie, embraser l'Égypte et consumer aussi le régime libyen. C'était le moins que pouvait faire un mouvement qualifié a priori d'arabe sur la base d'un manichéisme douteux.
On comprend alors la volonté occidentale qui a suivi. L’énorme pression américaine et européenne sur le Raïs égyptien Moubarak, auquel l’Occident sut gré de s'effacer après plusieurs mois d’un bras de fer tendu. On comprend, dans le même ordre d'idées, l'acharnement contre le colonel Kadhafi, un dirigeant dont les concitoyens n’étaient pourtant pas, contrairement aux autres pays arabes, à l'article de la misère, et dont la soif légitime de liberté n'avait pas besoin d'être étanchée à coups de bombes de l'OTAN au point d'occasionner plus de 100 000 morts ! Une guerre logistiquement assistée par l'Occident chrétien en sous-main. Une guerre à laquelle au fond, légitimement, le colonel Kadhafi a réagi en homme d'État responsable. C'est parce qu'on a nommé « révolution arabe » le vent de liberté qui a fait tomber tour à tour les régimes tunisiens et égyptiens qu'on a trouvé inacceptable que le colonel Kadhafi s'acharne à jouer les intrus, les résistants, l’exception à une règle que l'on a décrétée absolue, en dépit du bon sens. Voilà comment les délires ethnocentriste bon teint peuvent se faire bonne conscience. Allons donc ! Ce qui a marché en Tunisie et en Égypte ce n'est pas en Libye que cela va échouer ! Cette révolution arabe, depuis qu'elle consumait des régimes en Afrique du Nord n'a jamais échoué à atteindre ses objectifs. Et pour cela, l'Occident impérialiste qui nomme toutes choses en ce monde, comme s'il était le secrétaire de Dieu, ferait tout pour faire mériter son nom à cette fameuse « révolution arabe ».
À coups de bombes de l'OTAN, la frénésie d'un Sarkozy qui a trouvé là une occasion illusoire de décoller des pâquerettes de la vulgarité et de l'agitation permanente, à coups de d’instrumentalisation honteuse d'une résolution de l'ONU cyniquement dévoyée de ses objectifs primordiaux, on a détrôné puis assassiné froidement un dirigeant africain en l'occurrence le colonel Kadhafi de Libye. Et Dieu peut alors dire : « que la révolution arabe soit ! »
Mais petit détail qui a son importance : pourquoi la révolution arabe ignore-t-elle tranquillement l'Algérie et le Maroc qui ne sont pas des modèles de démocratie en Afrique ? Ou alors l'Algérie et le Maroc ne sont peut-être pas des pays arabes ? Partout où la soi-disant « révolution arabe » risquait d'avoir des effets collatéraux incontrôlables sur la paix sociale en Occident comme en France, un pays où la mémoire collective de la guerre d'Algérie est encore vivace et qui abrite sur son sol un nombre non négligeable d'Algériens et de Marocains, partout où l'Occident n'y a pas intérêt eh bien la révolution arabe miraculeusement s'essouffle si jamais elle prend naissance, elle devient aveugle et sourde à la quête de liberté des mêmes peuples arabes ; elle cesse d’être arabe.
Et à étendre le renouveau de folie colonisatrice de l'Occident sur l'Afrique tout entière, il est curieux de constater qu'une révolution sous l'égide triomphante de la France à chassé un autre « dictateur » en Afrique Noire en la personne de M. Gbagbo, président légitime de la Côte d'Ivoire. En Libye comme en Côte d’Ivoire l’objectif et les intérêts néocoloniaux de l’Occident ainsi que l’implication française ont un air de famille indéniable. À l'échelle africaine et d'une manière rétrospective, on peut dire que si c'est le même vent de révolution qui a soufflé en Tunisie, en Égypte et en Libye, alors c'est aussi le même vent qui a déraciné Kadhafi qui a aussi eu raison de M. Gbagbo, président légitime de Côte d'Ivoire. On aboutit alors à un curieux paradoxe : rétrospectivement, à s'en tenir rigoureusement au regard ethnocentriste qui affecte les évènements politiques en cours en Afrique, la Côte d'Ivoire apparaît comme étant plus arabe que l'Algérie ou le Maroc…
Aminou Balogoun
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C'est le lieu de rappeler que le gouvernement Français en la voix de Marie Alliot avait offert ses compétences pour mater les révolutionnaires tunisiens...Cynisme, duplicité,...Voilà comment l'on enfonce l'esprit d'une nation dans la fange...Est-ce que les Français peuvent encore se regarder dans la glace...Rien de nouveau sous le soleil en fait...
Rédigé par : Thomas Coffi | 12 novembre 2011 à 11:03