Union de la Jeunesse Communiste du Bénin (UJCB)
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MANIFESTE DE LA JEUNESSE COMMUNISTE DU BENIN
Réunis en Conseil National à Cotonou les 29 et 30 octobre 2011, les représentants des jeunes communistes des douze départements du Bénin, constatent
1- que quand les travailleurs se mettent en grève pour exiger de meilleurs salaires, le gouvernement répond que leurs revendications sont justes mais qu’il ne peut les satisfaire ; en d’autres termes, les travailleurs ont raison de dire que leurs familles ont faim et qu’ils ne sont pas payés à la hauteur de leur travail mais il n’y a pas suffisamment d’argent dans les caisses de l’Etat pour les satisfaire ; où est passé l’argent ?
2- Les luttes des peuples ont mis à l’ordre du jour des exigences nouvelles pour le progrès de l’humanité :
- un peuple ne produit des génies que lorsque ses enfants sont instruits dans leurs langues maternelles.
- L’école doit être laïque, démocratique, obligatoire et gratuite. La santé pour tous à travers la gratuité des soins de santé primaire.
- L’accès aux nouvelles technologies à tous, à travers les langues maternelles pour une instruction et une communication universelles.
- Les pilleurs des ressources des peuples doivent être jugés et payer, les tortionnaires doivent être jugés et les crimes économiques, de torture, de guerre ou contre l’humanité sont imprescriptibles.
3- A ces exigences des peuples, Boni YAYI et son gouvernement de répondre par des pirouettes.
Ils parlent de bonne gouvernance et de lutte contre la corruption. Mais tout le monde voit au Bénin que les plus gros scandales financiers impliquent toujours des dirigeants politiques du pays.
On a introduit dans les écoles ce qu’on a appelé « Approche par compétence (APC) » et depuis, plus d’une décennie, les échecs scolaires sont plus massifs chaque année. Il paraît qu’on veut faire des enfants du Bénin des chercheurs dès la Maternelle. Mais dans le monde civilisé, l’enfant qui fait des recherches va dans une bibliothèque. Aujourd’hui l’écolier ou l’élève qui fait des recherches le fait via internet ; nos écoles et nos villages sont dépourvus d’internet, parfois même d’électricité. Où est l’APC ? Même au traditionnel, l’enfant qui fait des recherches s’adresse à ses parents ou à ses aînés. Mais chez nous les parents parlent leurs langues maternelles aux enfants à qui le maître demande les résultats des recherches en français ; où est l’APC ?
Ils disent « Introduction des langues nationales dans l’enseignement alors que le budget national n’a rien prévu pour exécuter un tel programme ; ils répètent que l’acquisition des connaissances ne peut se faire dans la langue d’autrui et pourtant ils prétendent sélectionner 4, 8 ou 20 langues à enseigner, oubliant que la langue maternelle de l’autre est une langue d’autrui pour moi. Ils disent que l’école est gratuite alors que dans les écoles primaires et secondaires les « contributions scolaires » grimpent au gré des volontés des directeurs. L’enseignement supérieur est de plus en plus inaccessible aux bacheliers de parents pauvres qui vont chaque jour grossir les rangs des conducteurs des taxis motos.
On fait tous les jours des discours sur la promotion de la jeunesse aujourd’hui et demain mais les jeunes artisans sont au désespoir parce qu’ils n’ont même pas de bois pour sculpter ou construire, pas de coton pour filer ou tisser, pas même de marché pour vendre, parce que la matière première qu’ils doivent utiliser est exportée et le marché national est inondé par l’importation de produits étrangers. Le chômage s’accroît de jour en jour parce que les quelques industries qui existent comme le textile ou l’huilerie ferment faute de matière première parce que nos dirigeants cupides préfèrent vendre les matières premières à l’extérieur et empocher des ristournes. L’armée des zémidjans grossit tous les jours dans toutes les villes du Bénin de diplômés chômeurs.
On augmente tous les jours l’âge de départ à la retraite pour tuer nos parents au travail et nous fermer les portes du marché du travail. Nous sommes juste bons à être recrutés dans la police et l’armée pour apprendre à frapper nos frères et parents grévistes ou manifestants.
Pendant ce temps, Boni YAYI et son gouvernement pillent nos ressources, vident les caisses de l’Etat et organisent des élections truquées.
Les scandales financiers et économiques, le bradage des ressources du pays appauvrissent les adultes d’aujourd’hui, affament les enfants et assombrissent l’avenir des jeunes. Ils soulèvent la réprobation populaire et Boni YAYI y répond par la militarisation du pays. Il truque les élections et réprime dans le sang les protestations. Il envoie contre des travailleurs protestataires les chars et encerclent la bourse du Travail à chaque simple meeting. Fort de sa majorité truquée à l’Assemblée Nationale, Boni YAYI introduit une fournée de lois liberticides. Boni YAYI avec des accents guerriers accompagnant des actes de plus en plus attentatoires aux libertés n’a trouvé d’ennemis à combattre que le peuple qui souffre et qui gémit : les douaniers par ici, les syndicats en général par là ; Boni YAYI nous ramène à l’époque de triste mémoire de l’autocrate KEREKOU, son premier conseiller.
Alors, certains de nos parents, se souvenant des époques héroïques sous l’autocratie qui ont vu « la plume vaincre le fusil » s’écrient : « où est passée notre jeunesse ? que fait notre jeunesse ? »
Certains de nos parents, voyant les exploits des révolutions tunisiennes et égyptiennes, ou voyant tout simplement encore les millions « d’indignés » de par le monde avec à leur tête les jeunes de 18 ou 20 ans, s’écrient : « Et la jeunesse de notre pays ? ».
Elle est là, la jeunesse ; elle a entre 16 et 25 ans. Mais en elle, vous avez tué l’esprit de jeunesse.
Vous l’avez tué, vous tous qui :
En 1990, Mgr de SOUZA a dirigé une conférence nationale des forces vives dont on dit qu’elle a instauré la démocratie. Mais personne n’a rendu hommage aux centaines de jeunes qui pendant des années ont appelé à la résistance à l’autocratie, ont écrit sur les murs au risque de se faire tirer dessus, ont distribué les dénonciations, les appels au courage sur les stades, les écoles, les usines, dans les mosquées, dans les églises, les sacristies, etc. Et pourtant, même l’Eglise catholique sait que l’illustration meilleure que l’on donne de l’évangile reste la vie des martyrs d’il y a 1000, 2000 ans que l’on enseigne aux générations successives afin qu’elles les imitent et fassent plus. Mais ces exemples de héros et de martyrs tout proches qui nous ont donné la liberté, on ne nous les a pas seulement cachés, on nous les a présentés comme mauvais, démoniaques. On a comme oublié de nous dire que le patriotisme est beau, que la solidarité est belle, que le martyre est sublime. Au mieux, on nous a dit que tous ces mots dans un monde corrompu, c’est du rêve, c’est de l’utopie. Et on a oublié de nous dire qu’il faut rêver le beau pour construire grand. Et on a laissé le corrompu tout envahir et tout corrompre, tout détruire.
Quand, après la Conférence Nationale, le gouvernement de SOGLO représenté par Paulin HOUNTONDJI a élaboré un règlement intérieur qui interdit les grèves, les associations, les manifestations dans les collèges, vous n’avez rien dit. Contre ce règlement des élèves ont manifesté et ont été réprimés, exclus ; vous n’avez rien dit.
Quand à Djakotomè le jeune Maurice DANSOU dirigeant une grève pacifique des élèves du CEG a été abattu par les gendarmes, vous n’avez rien dit.
Quand à Covè, Zè, Ségbana, des jeunes paysans se sont levés contre la taxe civique et les autres brimades contre la paysannerie pauvre et ont été arrêtés, torturés et tués pour certains, vous n’avez rien dit.
Quand Véronique AHOYO et Nicéphore SOGLO ont interdit dans les entreprises et administration les comités d’action au sein desquels les travailleurs ont lutté pour les libertés, vous n’avez rien dit.
Quand à la chute de l’autocratie, l’Etat n’a rien fait pour mettre à l’école les orphelins des martyrs morts sous la torture ou fusillés, quand rien n’a été fait pour réhabiliter et réinsérer les jeunes qui ont sacrifié leur jeunesse, leurs études, leur emploi pour conquérir pour tous la liberté, vous n’avez rien dit.
Depuis le Renouveau Démocratique, que nous a-t-on appris ? IL FAUT SE SAUVER SEUL. On est allé jusqu’à nous parler d’auto-emploi pour justifier le sabotage de la production nationale et de la création de grandes entreprises. Alors qu’entre 1975 et 1989, tout le peuple, du Nord au Sud, s’est regroupé et uni dans les combats autour des mots d’ordre du Parti Communiste du Dahomey, on nous sérine maintenant tous les jours que l’homme béninois est mauvais et indigne de confiance ; qu’il n’y a de salut que par soi-même. Les librairies regorgent de livres sur le développement personnel nourrissant séminaire après séminaire (payants naturellement). Et quoi y lit ou entend-on ? Devenez riche en quelques semaines ? Comment devenir rapidement l’homme le plus riche du monde ? Développez votre puissance personnelle. Apprenez à influencer les autres. Tous ceux qui se sont sacrifiés pour les libertés ou qui refusent de s’enrichir en pillant les ressources nationales sont devenus les exemples négatifs. Les exemples positifs sont ceux qui se sont enrichis en volant et en détournant les biens publics, en escroquant et en ruinant les pauvres. Ceux-là sont devenus les modèles que l’on nous cite parce qu’ils viennent souiller les mosquées et les églises avec leurs aumônes. On nous a inventé des ennemis nouveaux et terribles : les sorciers. Echouez vous à l’école dans des classes de plus de cent élèves rassemblés sous des arbres devant un seul maître ou dans des facultés surpeuplées et sans matériel, c’est la faute aux sorciers. Votre salaire ne suffit plus à couvrir vos besoins, ce sont les sorciers qui volent votre argent à votre insu. Dans les prêches dans les églises et temples, à la radio ou à la télé, les prières et les talismans sont vendus pour combattre les sorciers. Et comme ils sont insaisissables, le combat est sans fin. Pendant ce temps, des ennemis bien réels, vivants et visibles ceux-là nous volent tous les jours, organisent les échecs massifs dans nos écoles et nous rendent malades à force de misère dans nos maisons et dans nos hôpitaux.
Dans ces conditions, faut-il s’étonner que tout s’effondre, faute de valeur morale ?
Seul le Parti Communiste du Bénin nous enseigne à la jeunesse qu’il faut aimer son pays et, au besoin, mourir pour lui ; qu’être pauvre mais travailleur et honnête est beau, qu’il faut avoir de l’ambition pour son pays, que l’on ne peut réussir et s’en sortir seul. Et alors, la vie devient pour nous une torture parce qu’à la maison, à l’école, à l’église, on nous enseigne le contraire ; nous voyons le contraire triompher et rigoler. Nous n’avons pas eu les cours d’instruction civique et l’on nous plaint pour cela, mais les détourneurs de deniers publics se recrutent par centaines parmi ceux qui sont passés par là.
Alors, qu’on nous laisse l’esprit libre, tel est notre manifeste. Qu’on nous enlève les chaînes de la couardise, de l’hypocrisie, de l’avidité et qu’on les remplace par les ailes de l’ambition, de l’audace. Si personne ne nous les enlève, nous les enlèverons nous-mêmes. Comme les jeunesses de Tunisie et d’Egypte en 2011 ; comme les jeunesses du Bénin en 1989, en 1985, en 1979, en 1974, etc.
Oui, nous refusons la soumission et la mendicité.
Oui, nous proclamons le droit inaliénable de tous les peuples de s’insurger contre un pouvoir qui l’opprime et qui ruine son pays ;
Oui, nous affirmons le droit de tout peuple de se doter du régime de son choix et notre conviction qu’un bon gouvernement est celui qui met en œuvre les revendications des peuples et se considère comme le serviteur de son peuple ;
Oui, nous travaillerons avec nos parents probes et intègres pour instaurer dans ce pays un gouvernement des travailleurs et des peuples ;
Oui, nous affirmons que la jeunesse communiste du Bénin sera comme hier et toujours l’avant-garde de toute la jeunesse pour faire de ce pays une terre de liberté et de prospérité.
Parce qu’aujourd’hui encore, dans ces difficultés immenses, nous osons rêver.
Nous rêvons d’écoles bien bâties, d’enseignants bien formés, de facultés modernes et spacieuses, de laboratoires de bibliothèques ; et nous y travaillerons.
Nous rêvons de manufactures et de belles vitrines pour nos créations d’artisans, d’industries de transformation de nos richesses ; et nous y travaillerons ;
Nous rêvons de conservatoires de danses et de musique, de théâtre et de dessin, de peinture et de sculpture ; et nous y travaillerons ;
Nous rêvons d’un pays d’où auront disparu les inondations cycliques non maîtrisées, les centres de santé sans médecins, les médecins sans labos ni matériels, les classes d’écoles installées sous les arbres, les villages sans lumière, les usines sans matières premières ; et nous y travaillerons.
Nous rêvons de lois qui nous donnent des dirigeants qui ont pour vocation de garantir à leurs peuples les libertés de produire, d’aller et de venir et d’être maître chez eux ; et nous y travaillerons.
Nous rêvons d’un pays où les malfaiteurs sont en prison et les probes et travailleurs honnêtes décorés. Nous y travaillerons.
Oui, c’est un défi ; nous le relèverons. Nous honorerons la mémoire de tous les martyrs, y compris celui du jeune Fawaz ALADZI FAROUK, tué par les sbires de Boni YAYI à Natitingou.
Nous mettrons partout sur pied des cellules de la jeunesse communiste. Nous aiderons partout les jeunes du Bénin à se débarrasser de la crasse de couardise, d’individualisme, de cupidité et d’apatridie dont on les a recouverts et ensemble nous irons à l’assaut de la nouvelle autocratie. Comme nos aînés l’ont fait ; mieux qu’ils n’ont fait.
A tous nos parents, nous disons :
A la jeunesse, parlez de ceux que vous avez connus et qui se sont battus pour que nous ayons quelque liberté aujourd’hui. Parlez leur de l’UGEED, du FACEEN, de la JUB. Si vous les avez connus, parlez leur de Innocent HOUNYOVI, Rémi AKPOKPO GLELE, Luc TOGBADJA, OROU GBEA SIANIN. Parlez leur de Issifou ALLASSANE, Denis SINDETE, Thérèse WAOUNWA, Osséni AGBETOU… Magnifiez leur sacrifice et parlez à la jeunesse de combien ils étaient adulés et entourés du peuple quand ils étaient porte-flambeaux du combat pour les libertés. Dites à la jeunesse que ceux-là sont devenus un patrimoine national car chaque fois que les temps sont durs pour les libertés, le peuple se souvient d’eux. Et si vous en connaissez qui sont passés de l’autre côté aujourd’hui, ne dites pas qu’ils « sont devenus sages », qu’ils « ont compris ». Non ! Regardez les jeunes dans les yeux et dites leur la vérité ; dites leur que ceux qui sont passés de l’autre côté ont trahi. Dites aux jeunes que vous avez connu, il y a plus de quarante ans, Fidèle QUENUM se battant pour les libertés et la justice et pour la liberté de qui le peuple s’est battu quand il a été incarcéré. Dites leur comment tous les murs de Cotonou et de Porto-Novo étaient couverts de « Libérez Fidèle Quenum » parce qu’il était devenu le héros de la jeunesse. Et s’ils vous demandent où il est aujourd’hui, dites leur qu’il est toujours sur les rangs, se battant pour les libertés et le progrès. Comme Pascal FANTODJI qui jusqu’à sa mort a tout sacrifié pour son pays.
A tous les religieux, quelle que soit la confession : c’est maintenant qu’il faut dire à la jeunesse : chacun perdrait son âme à vouloir la sauver seul, mais ensemble nous gagnerons le Bénin en nous oubliant.
Quant aux dictateurs, aux pilleurs et leurs soutiens, nous leur disons : Dégagez ! Les peuples arrivent; avec leurs jeunesses !
Cotonou, le 30 octobre 2011
Le Conseil National
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