Dans notre série "Points de vue" des journalistes africains, l’écrivain ghanéenne et femme politique de l'opposition, Elizabeth Ohene considère que la rupture d'un mariage politique est aussi douloureux que le divorce dans la vie réelle.
Une ancienne première dame du Ghana a clairement perdu une élection le 9 Juillet, le jour même où la nouvelle République du Sud-Soudan naissait..
Alors que les événements survenus à Juba, la capitale du Sud Soudan, ont été une affaire de joie, les événements à Sunyani, la capitale de la région de Brong Ahafo au Ghana, ont été très pénibles à regarder.
Nana Konadu Agyeman Rawlings, épouse de l'ancien président Jerry Rawlings, était en lice à la primaire devant désigner le candidat du Congrès Démocratique National (NDC) au pouvoir, aux élections présidentielles prévues l’année prochaine.
Son adversaire était le président John Atta Mills, qui avait été le protégé de M. Rawlings dont il a bénéficié du soutien ferme pour accéder au pouvoir en 2009.
Les deux événements, à Sunyani et Juba, résultent de relations qui ont mal tourné - histoire de mariage en panne.
Alors que dans toutes les cultures, nous avons élaboré des rites codifiés pour les mariages, le processus de rupture reste essentiellement non structuré et salissant.
Le problème est que souvent il est très rare pour les deux parties dans une relation de conclure dans le même temps que le mariage est irrémédiablement brisé.
L'Union africaine (UA), comme l'Eglise catholique, est résolument contre le divorce.
Ce que Dieu (ou dans le cas de l'Afrique, les puissances coloniales) a mis ensemble, ne doit pas être dissocié.
«Biens matrimoniaux»
La carte de l'Afrique, établie par les puissances coloniales, est sacro-sainte - aussi absurde soit-elle
L'UA, cependant, à contrecœur a approuvé l'indépendance du Sud-Soudan.
Pendant que je regardais la naissance de la nation et la joie sur les visages de la foule, à Juba, mon regard est tombé sur le visage d'Omar el-Béchir, aujourd'hui président d'un demi-Soudan.
Je pourrais dire qu'il se sentait mal. Peut-être, sa tristesse avait quelque chose à voir avec le partage des biens matrimoniaux, la part des revenus du pétrole allant au sud.
Le problème est que même les accords prénuptiaux n’apportent jamais égal réconfort aux partenaires.
Puis, mon esprit est allé à une aube de mai 1994 à Pretoria lors de l'inauguration d'un certain Nelson Mandela.
Ce n’était pas exactement un divorce en l’occurrence mais pas tout à fait un mariage non plus dans la mesure où cette « nouvelle » Afrique du Sud n'avait pas besoin d'un nouveau nom de domaine ou d'une nouvelle équipe de football, contrairement au Sud-Soudan - même s’il est vrai que c'était un nouveau drapeau et un nouvel hymne national .
Cela, aussi, était une relation entre différentes races qui s'était effondrée et devait être reconçue après des années de difficultés.
Nous leur avons tous souhaité bonne chance tout en regardant leurs progrès parfois avec anxiété, mais plus souvent avec beaucoup de fierté.
"Delirant"
Il y a un an ils firent la fierté de l'Afrique en organisant un tournoi mondial de football, la Coupe du Monde, avec succès et l'on a eu l'impression que ce nouveau mariage fonctionnait même si les partenaires en étaient encore à s'adapter à l'évolution du pouvoir.
Mon esprit s'est ensuite tourné vers un pays beaucoup plus proche dun nouvel Etat du Sud-Soudan - l'Erythrée.
Il a divorcé de l'Ethiopie en 1993 après une longue guerre de libération.
Comme les foules à Juba, le 9 Juillet, les Érythréens ont été en délire, mais le divorce a été traumatisant pour les Éthiopiens.
Le partage du butin avait transformé du jour au lendemain l’Ethiopie en un pays enclavé dès lors que le seul port du pays était en Erythrée.
Mais un exemple encore plus intéressant, est celui du Somaliland, qui a rompu avec la Somalie il y a 20 ans.
Ce divorce n'a pas été reconnu par la bureaucratie internationale, mais Somaliland a certainement laissé le mariage et nous attendons la fin des formalités un jour.
Ce qui nous ramène aux événements de Sunyani.
Les vicissitudes entre les Rawlings et leur protégé d’antan- M. Atta-Mills - furent mises en scène devant le public médusé.
Il me semblait que c'était un cas classique d'une relation abusive où le mariage est en panne, et dont un côté s’y agrippe encore.
Je ne me suis pas creusé la tête pour savoir qui a demandé le divorce, mais la vérité est que le mariage est terminé.
M. Atta-Mills a parlé de travailler pour l'unité, mais c’était tout juste un parler vide.
Ce fut un divorce et nous attendons le partage du butin.
Binason Avèkes (traduit par)
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