Yayi Boni et les siens ont pêché par excès de zèle et de prévoyance dans l'organisation du hold-up électoral aux termes duquel ils ont conservé le pouvoir. En effet, une certaine aile messianique dans la mouvance de M. Albert Tévoédjrè et consorts prétendument intellectuels et sages, ont de façon anticipée, à travers une campagne subtile, commencé à entonner très tôt la berceuse de la paix avant même les élections. Pourquoi parlaient-ils de paix alors que c'est eux-mêmes qui organisaient les élections ? Parce qu'ils savaient que quelque chose de compromettant pour la paix allait se passer ? Le Bénin n'en était pourtant pas à sa première élection présidentielle depuis le Renouveau démocratique. Mais nos comparses avaient embouché la trompette de la paix et, aidés en douce par la propagande du régime, ils serinaient l'idée dans l'esprit du peuple. Ils espéraient ce faisant préparer le peuple à accepter l'inacceptable. À lui faire violence dans le silence. Et les élections ont eu lieu. Et en effet, miraculeusement, il n'y a pas eu de violence significative au regard de l'injustice infligée au peuple. Alors que d'un côté les manigances du pouvoir étaient apparues aux yeux de tous dans leurs aspects grotesque et sordides ; alors que de mémoire de fraudes et de supercherie électorales, le peuple n'avait jamais vu ou jamais subi d'aussi grossières opérations de tromperie, de l'autre côté, le peuple resta inerte, sans voix et sans réaction. Comme si c'était lui-même qui était K.-O., c'est-à-dire sonné. Et ce silence, cette déconnexion est devenue soudain révélateur du malaise du pouvoir. Plus que toutes les guerres, et les violences, ce silence montre la grossièreté du hold-up, son absurdité, sa folie et son horreur morale.
La propagande subtile des mercenaires de la paix a fait mouche plus que le pouvoir ne l'espérait. En définitive une guerre légitime ayant pour foyer la région de l’Ouémé aurait été une aubaine pour le pouvoir. S'étalant sur plusieurs semaines d'échauffourées, de violence, de dégradation de biens, de destruction en tout genre, de perturbation de l'ordre social, de calamités, de blessés voire même de morts si possible quelques dizaines ; une telle guerre aurait occupé le pouvoir. Celui-ci aurait alors une tâche d'État urgente à remplir. Il s'occuperait à mater la révolte, et montrerait du doigt l'opposition. Les révoltés bien que l'étant en toute légitimité seraient apparus comme des malfrats, des hooligans, des délinquants et des criminels. Et bien évidemment, celui au nom duquel ils se révolteraient-Me Adrien Houngbédji -serait tenu pour un irresponsable, un va-t-en-guerre, un homme qui n'hésite pas à faire couler le sang de ses concitoyens par frustration politique. Et par vertu automatique, son plus grand opposant M. Yayi Boni revêtirait la tunique de l'homme sage, responsable qui veille au bien-être du peuple. Le régime aurait pris l'opinion nationale et internationale à témoin. Puis, travaillant avec astuce il aurait œuvré à séparer dans l'opposition le bon grain de l'ivraie. Les collaborateurs de l’UN ou de l'opposition, contre quelques strapontins-comme on a déjà pu en voir ou entendre les échos-désavoueraient publiquement M. Houngbédji que le pouvoir diaboliserait avec force. On parviendrait à faire de lui, dans un renversement subtil la véritable cause de la guerre. Par l'effet d'une ruse savamment conçue, la victime deviendrait coupable et le coupable innocent et encensé. Alors que la guerre si elle avait eu lieu n'aurait été que la réaction normale et saine à l'acte anormal et malsain qu'a constitué l'usurpation violent du pouvoir par M. Yayi !
Ce succès inespéré des mercenaires de la paix au départ mandaté par M. Yayi et sa clique est pour le moins paradoxal. Car ils sont parvenus à un résultat contraire à celui qui était visé. Certes, il faut signaler à leur décharge qu’ils ont affaire à un peuple dont on dit qu'il est attaché à la paix. Quelle que soit la réalité de cet attachement et quelle que soit l'explication des ressorts culturels, sociologiques, et mentaux de la passivité du peuple béninois à la violence symbolique qu'il a subie, force est de constater que le plus grand perdant dans les effets inattendus de ce pacifisme de mauvais aloi est le pouvoir lui-même. Monsieur Yayi Boni n'a plus aucun masque entre lui et son crime. Et le temps et l'histoire se chargeront de l'exposer davantage au sileil implacable de la vérité !
Akadiri Bankolé
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