Mon Idéo Va, Court, Vole et Tombe sur…:
Le Culte du 2ème Mandat
Beaucoup de gens établis – en Europe et surtout en Afrique –trouvent que c'est indécent pour l'opposition en Afrique de vouloir faire un casus belli de la volonté, jugée par ailleurs légitime, d'un président africain de faire un second mandat. Ces gens établis – politiques, observateurs, Organisation internationales ou humanitaires,– trouvent que c'est indécent, voire capricieux ou extravagant de la part de l'opposition en Afrique d'être intransigeante et d'exiger la pureté effective des règles démocratiques pour un Président qui n'a fait qu'un seul mandat. Habitués à intervenir dans des cas de violation plus criante, ils trouvent que ce désir du Président africain de vouloir remplier à tout prix pour un second mandat n’est pas très grave, et qu’on peut fermer les yeux sur les moyens illégaux employés pour atteindre ce but. C'est cela qui plaide en faveur de l'innocence formelle de Yayi Boni, indépendamment de la réalité politique ou de la volonté de la majorité du peuple d'en finir avec lui. Ce sentiment ne tient plus compte de l'idée de la démocratie elle-même. Surtout si l'on considère que nous sommes en Afrique. Il explique a contrario l'acharnement à vouloir en finir avec un Gbagbo là aussi non pas parce qu'on a ausculté la réalité de la situation ivoirienne mais parce qu’on applique un regard extérieur porté sur des critères extérieurs notamment de durée ou de nombre de mandats. Gbagbo a fait plus de deux mandats donc il est suspect voire coupable, il est criminel, il est despote, ennemi de la Démocratie, et il doit partir. La malhonnêteté d'un chef d'État africain se mesure au nombre de mandats qu’il a effectués ; en tout cas, elle ne commence pas avant qu'il ait épuisé la durée totale des mandats que lui permet la constitution. C'est Chirac qui disait que l'Afrique n'est pas encore mûre pour la démocratie. Il avait alors essuyé un tollé de protestations et de critiques dont certaines le taxaient même d'ethnocentrisme.
Mais à quoi bon critiquer Chirac pour son scepticisme sur l’opportunité de la démocratie en Afrique lorsqu'on juge la question électorale et politique à l’aune de critères qui n'ont rien à voir avec les règles démocratiques elles-mêmes ? Et qu’on tolère en Afrique une culture de démocratie de période ; la période étant la somme totale des durées qu'un président peut faire au pouvoir selon la constitution. Tant qu'il n'a pas épuisé “sa période”, les Occidentaux, l'ONU, l'Europe, les O.N.G. tout ce beau monde d'experts en jugement sur la vie politique en Afrique, du haut de leur piédestal paternaliste et souvent corrompu, –c’est-à-dire complices et intéressés – considèrent qu'il n'y a pas péril en la demeure. Et ce faisant infligent injustice et frustration à ceux qui n’ont que le tort de croire au bien fondé de la démocratie. Pourtant dans l'esprit de la démocratie, la volonté du peuple est à la base de toute souveraineté. C'est elle qui donne le pouvoir. Quelle est cette démocratie intermittente, périodique et négative fondée sur l'idée du moindre mal ? Les peuples africains n'ont-ils pas une dignité égale pour faire valoir leur volonté ?
Éloi Goutchili
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