Pourquoi Yayi Boni a-t-il besoin de la Lépi avant de tricher aux élections de 2011 ? Pourquoi a-t-il besoin de la Lépi alors que la fraude a toujours existé, même et surtout en 2006 où Yayi Boni a été plébiscité, en dépit des accusations de fraude massive portée à son encontre à l’époque par le Président Kérékou lui-même ? Le malin a-t-il à ce point si massivement fraudé pour être convaincu que même dans l’opposition au Bénin, on peut surprendre et dépasser le pouvoir en place en matière de fraude électorale ? En tout cas, à première vue, le trouble que cause son insistance sur la confection d’une Lépi décriée amène à ce poser ce genre de questions. Mais au-delà de cette suspicion légitime et fondée la vraie raison de la considération de la Lépi comme l’instrument conditionnel de la fraude est ailleurs : elle est d’abord logique avant d’être politique. Parce que sans la Lépi, c’est le règne de la fraude plurielle ; tout le monde peut tricher, aussi bien le pouvoir que l’opposition. Et les dernières élections locales où ses grandes espérances ont été laminées ont montré les limites de l’intérêt pour le pouvoir de la fraude plurielle.
Au contraire avec la Lépi, c’est la fraude à instance unique, celle du pouvoir qui en détient les clés – en amont comme en aval. À ce privilège il faut ajouter la légitimation par le discours scientiste fondé sur le mythe ternaire de l’exactitude, de l’objectivité, et de l’impartialité d’un outil supposé scientifique. Sans la Lépi tout le monde fraude ; la fraude est décentralisée. Avec la Lépi truquée seul le pouvoir fraude ; la fraude devient centralisée. De façon ironique la Lépi truquée s’impose comme un outil antidémocratique par excellence, puisqu’elle vise à ruiner le caractère démocratique de la fraude. En clair, la Lépi truquée est un outil autoritaire. Et c’est la raison pour laquelle il a la préférence de l’autocrate. Le véritable enjeu de la guerre de la Lépi se situe donc dans le scepticisme d’une élection sans fraude arcboutée à la volonté d’une centralisation de la fraude.
Aminou Balogoun
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