Le cas échéant, de mémoire d'élection démocratique en Afrique ou dans le monde, ce sera l'une des rares fois qu'on verrait un Président sortant en bonne santé et constitutionnellement en droit de se représenter à sa propre succession ne pas le faire. Ce qui montre que ce genre de bruit laisse à désirer. Toutefois la question mérite qu'on s'y penche et pour ce faire, essayons de l'aborder de façon simplement logique.
En effet, deux possibilités logiques s'offrent : 1. soit le bruit a du vrai ; 2. soit il est faux et cousu de fil blanc.
S'il est faux, il peut l'être de deux façons.
Or donc, et pour revenir au tout début de la chaîne logique ; 1. Si le bruit est vrai, c'est-à-dire si l'info selon laquelle Yayi Boni ne se représenterait pas aux élections de 2011 n'est pas de l'intox mais correspond un tant soit peu à la réalité, alors cette décision serait bien motivée. La motivation serait d'ordre psychologique ou tactique. Yayi Boni préfèrerait ne pas se représenter pour éviter un échec presque sûr. Cela suppose qu'il préfère en rester sur l'image du Président élu en 2006 à 75% que de se voir battu à un 39 ou 42% ! Cette abstention préventive qui tient lieu aussi d'abstinence politique correspondrait bien à son narcissisme à fleur de peau, qui veut que la victoire politique soit d'abord une affaire de curriculum vitae, de success story, et d'accomplissement personnel avant d'être une affaire collective. Cela correspondrait bien à la conception héroïque de la politique, par laquelle Yayi Boni est apparu et s'apparaît à lui-même comme le Docteur, le Messie ou le Sauveur du Peuple. Compte tenu aussi des excès de sa gouvernance et des fautes plus ou moins graves qui auront émaillé sa législature et dont il pourrait avoir à répondre le cas échéant devant la Haute Cour, se retirer de la compétition de façon spontanée, c'est aussi désamorcer l'engrenage de la vindicte politique et partisane qui pourrait le happer. Mais d'autre part, ne pas se présenter en 2011, outre le but préventif évoqué, pourrait avoir pour visée de préparer un retour en 2016, paré de l'image virginale de la renaissance, tel un phénix renaissant de ses cendres, et dont les œuvres auront fini par apparaître rétrospectivement sinon louables, du moins pas aussi noires qu'on les dépeint actuellement.
Au total si la dissection logique nous a permis de dresser un tableau de vérité du bruit de la non candidature du Président Yayi, il faudrait en revenir au bon sens pour comprendre qu'on est plus du côté de l'intox que de l'info. Que le but visé est de se faire désirer par le peuple et d'utiliser ce désir frauduleux pour justifier le cas échéant un succès tout aussi frauduleux. Dans tous les cas, la manœuvre, si manœuvre il y a, n'a pas que des bénéfices. Ainsi, à force de vouloir se faire désirer on risque de perdre sa place ou d'accréditer l'idée d'une culpabilité, sur le mode du "s'il ne se présente pas c'est qu'il a des choses à se reprocher" Et cette stratégie peut se retourner contre son auteur, qui perdrait alors sa prééminence de Président sortant, conformément à l'adage selon lequel, qui va à la chasse perd sa place.
Cette rumeur, puisqu'il s'agit in fine d'une rumeur, inspire quelques réflexions. Elle rappelle que décidément Yayi Boni n'aborde l'échange avec le Peuple que sous l'angle espiègle de la manipulation. Son rapport avec le Peuple n'est jamais rationnel mais émotionnel et inducteur, fait de manipulation et de subornation. Dans une telle approche, loin d'être considéré comme un être mûr, le Peuple est traité comme un objet de manipulation. Ce parti-pris de déni de la maturité du peuple confine au mépris ; il va de pair avec la propension tyrannique de Yayi Boni, son autoritarisme et en fin de compte son propre manque de maturité politique.
Prof. Bernard Aklassato
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