Le Peuple Béninois est victime de ses propres sautes d’humeur. Il est victime des sautes d’humeur et consensus frauduleux qui l’ont poussé à élire Yayi Boni en 2006; au lieu de bien réfléchir avant de faire son choix. Mais il est aussi victime des sautes d’humeur qui l’ont conduit à évincer Nicéphore Soglo en 1996, ce qui allait ouvrir la porte à un retour en arrière de 10 ans sous Kérékou dont c’est la spécialité historique.
Or après une période d’agitation et de grands gestes, l’action de Yayi Boni n’a pas orienté le gouvernail fermement dans ce sens. Il a plutôt préféré très vite, et ceci fidèle à sa sensibilité, une approche populiste, suborneuse, fictionnelle, démagogique, et trompeuse de son activité d’ensemble. L’agitation médiatique, les marches de soutien, les nominations régionalistes, l’achat de conscience, la guérilla de rectification électorale, la visite récurrente des chantiers de construction de ponts, et le fait d’avoir érigé ceux-ci en justification naturelle de la qualité de son action au détriment de tout ce qui peut soulager la misère grandissante du peuple, l’élimination carcérale, sous prétexte de lutte contre la corruption, de ses ennemis politiques ou de tous ceux dont la seule existence blesse son amour propre ou menace sa réputation fabriquée, la mise sous coupe des institutions de la République, le manque de pudeur et le caractère systématique du deux-poids-deux-mesures dans sa lutte douteuse contre la corruption, la manipulation sans vergogne des émotions religieuses, le mélange sans vergogne de la foi et de la Loi, etc.
Pourquoi Yayi Boni qui est un économiste de formation, le type même de ce que le peuple tenait pour un non-politique, un technocrate, un développeur a-t-il choisi d’aller dans le sens de l’agitation fictionnelle et autocratique, plutôt que dans le sens d’une action difficile, ardue et exigeante non pas pour changer le pays comme il l’a promis, mais pour le mettre sur la voie d’un changement qui arriverait peut-être dans les 20 prochaines années si on s’y attèle avec vigueur et constance ? Parce qu’il ne veut pas travailler pour le roi de Prusse ! Il ne veut pas tisser une corde et laisser la suite tisser par d’autres. Il veut faire la corde, la nasse avec la corde et attraper le poisson avec la nasse. Mais il se rend compte que tout cela n’est pas possible en 20 ans ! Et que quand vous faites honnêtement et bien votre job comme l’a fait le Président Soglo, le peuple dans ses sautes d'humeur élit ensuite qui il veut pour vous remplacer alors que vous voulez continuer à être Président. Yayi Boni a un terrible préjugé sur les sautes d’humeur du Peuple. Et il a juré qu’il ne le lui fera pas. S’il a bénéficié de ces sautes d’humeur, il n’entend pas en faire les frais. C’est pour cela qu’il choisit l’option de la fiction, sur fond d’épicurisme déguisé. Ce n’est donc pas étonnant toute l’importance démesurée qu’il donne à la propagande, comme si on était dans un régime communiste des années 60 ; et comme si le mensonge, la manipulation, le donner à croire, les jeux, le bruit, les scénario-dormitifs, réussiraient durablement à distraire le peuple de son malheur.
De ce point de vue, le peuple béninois ne peut s’en prendre qu’à lui-même. Car s’il a raison de vouloir limiter la politique en choisissant un homme dont il pensait qu’il allait s’atteler au développement du pays, ses sautes d’humeur et la naïveté de ses choix l’ont conduit vers une erreur dont il lui faudrait toute son intelligence politique pour se sortir. Désormais, il faudrait qu’il réfléchisse par deux fois avant d’entrer dans le panneau que lui tendent des faiseurs de roi, beaux parleurs, bien pensants, météorologues autoproclamés de la politique qui l’induisent en erreur. A défaut d'intelligence, il lui faudrait faire jouer son bon sens qui comme l'a dit un philosophe, est la chose au monde la mieux partagée. Ainsi, on peut espérer que l’erreur qu’a constitué le choix naïf et euphorique de Yayi Boni lui servira de leçon, pour qu’il se dise : “Plus jamais ça !” Si l’enfant du Vodounon a introduit par mégarde une vipère à la maison croyant ramener un python, il lui appartient de réparer son erreur, avant que toute la famille n’en fasse les frais. D’où il apparaît clairement que le mythe du développeur pur par opposition au politicien de terrain est à remiser définitivement au musée des sautes d’humeur et des illusions collectives
Prof. Bernard Aklassato
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