De la Prison comme Fourrière Politique
Depuis que le vent mauvais de Yayi a commencé à souffler sur le Bénin, la prison est entrée en scène comme lieu stratégique d’évacuation de l’obstacle politique par les tenants du pouvoir. Cette technique a présidé à l’avènement du pouvoir actuel. Sans qu'on soit parvenu jusqu’à présent à déterminer la manière dont la chose a été manigancée un peu à l’orée de 2006, c’est cette technique en effet qui permit d’éliminer Rachidi Gbadamassi du circuit politique du Nord.
Et, continuant – comment changer un technique qui a montré son succès ? – sur la même voie prémonitoire à son entrée en scène politique, Yayi Boni, devenu Président de la République, a manié la prison sans retenue. On ne compte pas le nombre d’ennemis plus ou moins imaginaires, d’empêcheurs de fantasmer en rond qu’au nom de la lutte contre la corruption ou de la bonne gouvernance Yayi Boni a envoyés en prison. De Sefou Fagbohoun à Pierre-Simon Adovèlandé en passant par Clément Gnonlonfoun, et autre Andoche Amègnissè. Le plus souvent, pour des motifs controuvés, spécieux et douteux. La plus récente instrumentalisation de la prison à des fins politiques opérée par Yayi Boni est celle qui, d’une manière écœurante, et proprement révoltante, à la veille des fêtes de Noël, envoya Simon-Pierre derrière les barreaux, et ce sans aucune nécessité formelle, quel que soit ce qui pouvait être reproché à l’intéressé. Simon, Pierre Adovèlandé, faut-il le rappeler, n’était pas n’importe qui. C’est l’homme qui, à la tête du MCA le mieux géré en Afrique, a fait montre de ses talents de gestionnaire, de probité, d’organisateur, et d’innovateur social. Un homme au contact des populations sur le terrain et dont l’action était appréciée par les citoyens ordinaires de toutes les couches sociales et de toutes les régions du pays. C’était trop pour notre Docteur-Président qui, en attendant de danser autour de son échangeur, – chef-d’œuvre phare de ses lubies émergentistes, et seule chose dont il repaît ses concitoyens affamés – est enlisé dans le blocage politique et un bilan économique peu reluisant. Le Béninois est jaloux de nature, et n’aime pas la réussite de son semblable, surtout lorsque lui-même ne mène pas large. Et Yayi Boni, en dépit qu’il en aie, et malgré son régionalisme mesquin est Béninois par excellence. Et, comme la médiocrité de son bilan saute aux yeux, soulignée noir sur blanc par la réussite sereine d’autres hommes d’envergure internationale comme le Président Simon Pierre Adovèlandé, il faut les éliminer, autant que faire se peut. Comme dans un rêve on élimine par tout moyen tout ce qui nous empêche de jouir, ou qui menace notre tranquillité – depuis Freud, on sait que le rêve est le gardien du sommeil. Alors fidèle à son autoritarisme nocturne et à son noctambulisme autistique, Yayi Boni fait recours à la prison, comme jadis nos rois faisaient des sacrifices humains pour assurer la paix de leur règne. Dans sa main, la prison devient un paramètre d’épuration politique, un frigidaire ou même une fourrière politique.
La belle preuve du caractère politique des emprisonnements opérés par Yayi depuis 2006 c’est leur inspiration régionaliste. Comme par hasard toutes les victimes de sa compulsion à emprisonner se recrutent parmi les Sudistes : Sefou Fagbohoun, Andoche Amègnissè, Clément Gnonlonfoun, Pierre-Simon Adovèlandé, etc.. Quelles que soient les raisons invoquées, aucune de ses victimes n’est ni du Nord, ni de son camp politique. Et pourtant la corruption ou le mal, sinon le crime ne sont l'apanage ni d'une région ni d'un camp : ils ne sont ni politiquement ni ethniquement déterminés.
Nous sommes tout simplement en face d’un arbitraire, une dérive tyrannique des principes de la Démocratie, une personnalisation du pouvoir soumis aux caprices oniriques d’un prince ténébreux. Toutes choses qui mettent à mal l’unité nationale et la paix. L’instrumentalisation des institutions de la République à des fins politiques est antidémocratique. L’usage de la prison comme fourrière politique au mépris des libertés individuelles est un crime moral et constitutionnel.
Entre autres choses, il est fort à souhaiter que 2011 nous libère de ce vent mauvais qui assombrit le ciel jusque-là lumineux du Renouveau Démocratique
Binason Avèkes
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