Retour sur : Le Banquier et le Politique
Les lieux communs et images d’Epinal associés au président Béninois façon Renouveau Démocratique sont maintenant connus. À en croire les agitations médiatiques, le bon candidat à la fonction de Président doit :
–Être économiste
– Ancien ou Actuel Fonctionnaire International
– Être Directeur d’une Banque Ouest-africaine dont le siège est de préférence à quelques encablures de Cotonou.
–Être originaire du Nord
Et enfin, être adoubé par une bande de faiseurs de rois autoproclamés dont certains, soit-disant Professeurs ou amis de la Société civile, bien qu’ayant ruiné toute crédibilité morale à ce titre, ne se gênent pas de donner de la voix ; quant aux autres, leur savoir-faire remonte comme leur âge à Mathusalem. Quoi qu’il en soit, sous d’autres cieux plus responsables ou démocratiques, ces impudents foncièrement cyniques et imbus d’eux-mêmes auraient choisi de se taire par pudeur ou mérité d’aller à la retraite.
Mais à y voir de près, c’est faire l’apologie de l’immoralité que de confier les rênes d’un pays désireux de progrès humain et de justice sociale à un banquier. Erreur éthique monumentale !
Au moment même où l’un des vecteurs programmatiques du changement dans notre société était axé sur la nécessité de moraliser la vie publique, le banquier est la dernière personne à laquelle il convenait de faire appel pour la diriger. Le banquier ne peut pas être le cocher d’un attelage national destiné à atteindre le cap de bonne espérance social et humain ; tout au plus peut-il être un cheval – ministre de l’économie ou autre – dont les rênes sont fermement tenues par un homme idoine, expérimenté, mûr et moralement confirmé. Car en effet, le banquier est un magouilleur professionnel, un falsificateur de compte, un mélangeur de registre, un prestidigitateur en matière comptable, un manieur en diable de l’argent sale.
On le voit bien avec la crise financière qui secoue les économies mondiales, et qui provient en grande partie des malversations cumulées dans les milieux de la haute finance internationale. Tout cela prouve qu’il n’y a rien de plus aventureux, de plus malsain et de plus dangereux que de confier les rênes d’un pays appauvri et corrompu à un homme sous prétexte qu’il est banquier. Le banquier n’a pas le profil éthique ni l’éthos ni l’habitus de l’homme du peuple comme le définissait un Chinua Achebe ; il n’a pas la fibre politique du politique au sens d’un Max Weber, encore moins les dispositions charismatique d’un timonier national. L’orientation collective, l’adhésion d’une nation, d’un peuple à un homme, un guide est une chose trop sérieuse pour être abaissée au seul culte monothéiste du Dieu-Argent.
L’émergence au sommet de la figure du banquier est une erreur monumentale, un contresens et un consensus frauduleux. Et le règne de Yayi Boni dont il sied de fermer la parenthèse calamiteuse, en offre un exemple malheureusement éloquent. Dans ces conditions, quoi de plus consternant que de voir la figure du Banquier aspirant au rôle politique suprême se poser comme le modèle incontournable et évident du Président au Bénin. Cette naturalisation frauduleuse participe à n’en pas douter d’un dévoiement des dimensions éthiques et pratiques inhérentes à la fonction politique. Au-delà du scandale que constitue la naturalisation de cette figure obtenue par chantage à la frustration du peuple, dans l’intérêt de notre démocratie, il sied de rejeter avec vigueur tous les consensus frauduleux, et les prêt-à-porter politiques qui tentent de prendre en otage la liberté du peuple en l’enfermant dans une formule.
Dès lors, ceux qui osent évoquer, suggérer ou en appeler à la candidature d’un homme comme Bio Tchané, qui n’est qu’une pâle copie de Yayi Boni, font partie de la race d’irresponsables romantiques qui préfèrent persévérer dans l’erreur plutôt que de corriger le tir. Au mieux, ils jouent les chacals comme tous ceux qui, originaires du Sud, considèrent qu’amener un Nordique est le nec plus ultra de l’intelligence ; au pire, ils jouent avec le feu. Ils sont animés du romantisme impudent de ceux qui, ayant fait fausse route, se lancent dans une surenchère destinée à la fois à exonérer le passé et à justifier l’illusion d’un coup double futur entièrement basée sur les belles idées dont on sait qu’elles servent surtout à paver le chemin de l’enfer. Et puis, dans un contexte fatal ou le régionalisme finit par plomber les mœurs politiques et électorales, ces pseudo-rationalistes du sud qui revendiquent l’expression de l’intelligence pensent que la meilleure chose à faire est de noyer le poisson du régionalisme en imposant un homme du Nord démographiquement minoritaire à un Sud démographiquement majoritaire. Tropisme érigé en incontournable de la pensée rationnelle mais d’une rationalité qui marche sur la tête. Car le vrai positivisme rationnel n’est pas celui d’une unité de façade autour d’un homme fût-il du du Nord qui empêcherait l’unité partielle, et du Nord d’une part et du Sud d’autre part. Cette démarche ne fait qu’enraciner le régionalisme sournois et hypocrite qui perdure dans le pays 50 ans après son indépendance. Ce n’est pas en niant par l’exemple, fût-il positif, les différences réelles et symboliques entre des entités qu’on réussit à les unir. Et tant qu’à se laisser porter par le régionalisme, il vaut mieux rejeter avec vigueur celui sournois et hypocrite que Yayi Boni a passionnément revigoré dans le pays depuis 2006, et préférer un régionalisme méthodique et provisoire, qui consolide l’union partielle de la région la plus peuplée et la moins unie du pays, à savoir le sud ; un sud dont la désunion a été politiquement exploitée à son détriment, surtout par la naturalisation d’une bonne volonté nationale en contradiction avec la persistance et le regain du régionalisme. Car combien de Nordistes accepteraient de voter pour un Président du Sud au premier tour? On les compterait facilement sur les doigts d’une main. Il n’y a qu’avec les Sudistes que ce genre d’automystification à rebours est pensable et possible ; et cette possibilité, loin d’être preuve de rationalité ou d’intelligence n’est qu’une subornation politique de mauvais goût. Tout le monde a vu que la démarche consistant à mettre la désunion du Sud sous le boisseau paradoxal d’un Président du Nord démographiquement minoritaire n’a jamais contribué à rapprocher le Nord du Sud, encore moins à consolider l’union du Sud. Dans ces conditions pourquoi continuer à vouloir entourlouper les Béninois du sud, par cette fausse bonne idée ? Bio Tchané au premier tour, non Merci : Y en a Marre de la haine de soi des sudistes déguisée sous les apparences subtiles de l’intelligence lumineuse !
Le peuple béninois n’est pas dupe. Il a déjà plus d’une fois démontré au monde et à lui-même l’acuité de son intelligence politique. Puisse cette maturité battre en brèche les entreprises des lobbies et autres coteries infâmes tapies dans l’ombre et dont les images d’Epinal et les formules clés en mains ne visent à nouveau qu’à confisquer la liberté du peuple !
Haro13
Binason Avèkes
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Atchè !
Rédigé par : B. A. | 09 février 2010 à 13:07
je vous remerci pour tout ce que vous faites pour votre nation.
Rédigé par : fadel | 08 février 2010 à 11:19