L’Inde, un Modèle d’Émergence pour le Bénin ?
NEW DELHI – Malingres, malades, les enfants indolents ont longtemps été un fléau de l'Inde - "une honte nationale», selon son premier ministre, Manmohan Singh. Mais même après une décennie de croissance économique galopante, les taux de malnutrition des enfants sont pires que dans de nombreux pays d'Afrique subsahariens, et ils se distinguent comme un paradoxe dans un pays fier d’être une démocratie.
Pourtant, nombre de grandes démocraties ont quasiment éradiqué la faim. Et le fait d’ignorer les besoins vitaux des pauvres est source de périls politiques en Inde, comme le montre les déconvenues des partis lors des dernières élections.
Certains n’hésitent pas à louer l'efficacité d'un État autoritaire comme la Chine. L'Inde avec sa bureaucratie lourde et parfois corrompue s’est contentée non sans quelque hésitation de mettre en place des solutions relativement simples – comme l’iodation du sel, par exemple, ou veiller à ce que tous les enfants soient vaccinés contre les maladies évitables - pour ne rien dire de ses progrès plus laborieux sur les tâches difficiles, comme celles concernant l'action pour faire évoluer l’objet et la manière dont les parents nourrissent leurs enfants.
Mais au fur et à mesure que la Chine elle-même entre dans une ère de prospérité, elle a ses luttes avec l’organisation des services médicaux, comme le montre le délitement du réseau gouvernemental de sécurité sanitaire consécutif à l’adoption d'une économie de marché.
Alors que selon les experts l'Inde a mis en place le plus vaste programme de nutrition infantile au monde, celui-ci est mal conçu et n’a fait qu’une percée timide ces dix dernières années au sein des populations concernées. Le programme intégré de services pour la sauvegarde de l'enfance, d’une valeur de 1.3 milliards de dollars, principal effort de l’Inde dans la lutte contre la malnutrition, se résume à un réseau de soupes populaires dans les bidonvilles et les villages.
Mais la plupart des experts conviennent que la fourniture d'une nutrition adéquate aux femmes enceintes et aux enfants de moins de 2 ans est indispensable, or le programme indien n'a pas pris la mesure de l’importance de cette recommandation. Le programme n'a pas non plus réussi à suffisamment changer l'alimentation des enfants et les pratiques d'hygiène. Beaucoup de femmes restent ici en mauvaise santé et sont mal nourries ; elles courent le risque de donner naissance à des bébés de faible poids et souvent ne sont pas informées de la meilleure façon de les nourrir.
Dans un rapport élaboré en Février, le Ministère de la femme et du développement de l'enfant a reconnu que si le programme a donné quelques résultats intéressants au cours des 30 dernières années, son impact sur la croissance physique et le développement reste plutôt lent. Le rapport a recommandé l’enrichissement des aliments en micronutriments et l’éducation des parents sur la manière de mieux nourrir leurs bébés.
Un rapport du Programme alimentaire mondial du mois dernier, a noté que l'Inde abrite plus d'un quart de ceux qui souffrent de la faim dans le monde, 230 millions de personnes en tout. Le rapport a également constaté, dans huit États de l'Inde, la hausse des cas d’anémie chez les femmes rurales en âge de procréer. Les femmes indiennes sont souvent les dernières à manger dans leur foyer et souvent ont peu de chance de bien manger ou de se reposer pendant la grossesse. L’Institut International pour la Recherche en Politique Nutritionnelle basé à Washington a récemment classé l'Inde au-dessous de deux douzaines de pays d'Afrique subsaharienne sur son Index de la Faim dans le Monde.
Selon un document de l'institut, datant de 2007, l’anémie infantile, un baromètre de l'alimentation des pauvres parmi les mères allaitantes, est trois fois plus élevée en Inde qu'en Chine.
Le dernier Index de la Faim dans le Monde décrit la faim dans le Madhya Pradesh, un État pauvre dans le centre de l'Inde, comme "extrêmement préoccupante", le classement de l' État se situant quelque part entre le Tchad et l'Éthiopie.
Plus surprenant, cependant, l’index met en relief la persistance de taux de carence alimentaire assez préoccupants dans des États de l'Inde qui pourtant affichent des taux de croissance économique enviable ces dernières années, y compris au Maharashtra et au Gujarat.
A New Delhi, qui a le plus haut revenu par habitant dans le pays, 42,2 % des enfants de moins de 5 ans sont chétifs ou trop petits pour leur âge, et 26 % présentent une insuffisance pondérale. A quelques pâtés de maisons du Parlement indien, de minuscules, enfants mal nourris triment à proposer des pièces détachées aux feux de signalisation.
Finalement, comme le dit si bien Mme Menon, une chercheure de l'Institut, un grand défaut du système indien, est de faire quelque chose, mais pas de résoudre le problème.
Binason Avèkes, traduction
Publié sur New York time, extrait d’un reportage de Hari Kumar,
Copyright, Blaise APLOGAN, 2008, © Bienvenu sur Babilown
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