Publié en juin 2006
La mise en place des audits par le gouvernement pour faire l’état des lieux dans les sociétés d’Etat donnent des maux de tête à deux catégories d’agent de l’Etat.
Il y a ceux, anciens ministres et cadres qui, conformément au mot d’ordre du changement en vigueur vont voir leur gestion examinée à la loupe ; et les entrants réels ou putatifs, ministres, fonctionnaires, conseillers, cadres et autres acteurs
Si les anciens sont bons, s’il n’y a pas tant que ça à reprocher à leur gestion des affaires alors il y a péril en la demeure pour les nouveaux qui risquent de ne pas être tous casés ! Dans ce contexte concurrentiel, tout se passe comme si la fonction des audits consiste à légitimer les uns et délégitimer les autres, déshabiller Zinsou pour justifier d’habiller Sagbo.
Toute cette nervosité en dit long sur l’ambiguïté entre service de l’Etat et l’état de service, envie de servir et besoin de se servir qui est au principe des carrières d’Etat. Dans l’état actuel des choses, ce chassé-croisé des appréhensions et des ambitions crée un goulot d’étranglement dans les sphères de l’Etat. Un ralentissement inaugural des affaires qui a des conséquences sur la vie sociale et économique du pays. Il donne le tournis à certains et la migraine à d’autres, mais alternance oblige, le gouvernement ne saurait faire l’économie de l’instauration des conditions d’une gestion saine de l’économie.
Toutefois, le principe de l’audit est intrinsèquement comptable. Certes, il est censé aller de pair avec un volet juridique qui, le cas échéant peut avoir des répercussions politiques. Mais dans l’état actuel des choses, rien ne laisse subodorer que le gouvernement veut s'attaquer à la question de la responsabilité sous l’angle politique.
Son approche aride et technicienne risque tout au plus d’influer sur la surconsommation d’aspirine par les cadres de l’Etat, et encore, juste le temps de la poudre aux yeux ! Elle peut aussi améliorer la bonne santé des cabinets d’audit… Et après ? La montagne des audits accouchera-t-elle d’une souris politique ?
Au-delà des sociétés, c’est la société elle-même qu’il faudra à terme consentir à auditer. Ce constat traduit le lieu crucial où se trouve le gouvernement actuel. Entre l’obligation de répondre à l’urgence du moment dans une approche technique et un regard opérationnel, et la nécessité de prendre en compte la dimension sociétale, politique et morale du changement : faute de quoi, mille audits et une législature plus tard, on en sera toujours au même point.
Aliou Kodjovi, ip, juin 2006
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