Bénin : Délestage et Pratiques sexuelles à Risque
Avec les délestages ciblés qui plongent Cotonou, la plus grande ville du Bénin, dans l’obscurité, Alain*, jeune taximan, n’a plus à frapper aux portes des hôtels pour abriter ses relations sexuelles occasionnelles : un coin calme d’une rue sombre fait l’affaire.
Le prix élevé du pétrole a conduit à une recrudescence des délestages électriques dans maintes villes de l’Afrique de l’Ouest, parce que leur économie nationale n’a pas été en mesure de couvrir le coût additionnel pour maintenir en fonction un nombre suffisant d’usines électriques. La plupart des habitants de Cotonou voient dans les délestages un vrai problème, mais quelques jeunes gens essaient d’en tirer avantage.
« Avant je ne pouvais pas faire l’amour régulièrement parce que pour cela, il me fallait amener la femme ou bien chez moi, ou bien dans une chambre d’hôtel payée à l’heure » dit Alain, qui opère à partir de la station Jonquet à Cotonou. « C’était vraiment un casse-tête pour moi, parce que cela voulait dire qu’il fallait avoir beaucoup d’argent. »
Les hôtels payés à l’heure lui revenaient entre 1000 et 1500 francs CFA alors qu’emmener une femme chez lui était risqué, dit-il. Le quartier de Jonquet a acquis une réputation minable, même en dehors du Bénin en raison du nombre très élevé des travailleurs du sexe et leurs clients.
Jusqu’à il y a quelques mois, Jean-Marc*, célibataire de 35 ans, n’osait pas mettre les pieds à Jonquet. « Je n’ai pas de copine et... Je suis allé dans ce coin à la recherche de prostituées, mais avant j’avais vraiment honte parce que, en dépit du fait que le quartier était très actif, j’avais peur d’être reconnu» déclare-t-il. « Maintenant il fait souvent sombre dans ce quartier et je n’ai plus de souci à me faire ; je peux faire ce que je veux en toute quiétude. »
Comme Alain et Jean-Marc, beaucoup de jeunes gens acculés par la pression sociales, le contrôle familial ou les réalités financières ont trouvé une aubaine dans le délestage.
« Le délestage ciblé n’est pas entièrement négatif, même si d’une certaine manière il mine l’économie du pays et provoque des tensions » dit Guy Gbété, un mécanicien. « Au moins permettent-ils aux jeunes de s’exprimer sexuellement, parce que, voyez-vous, ces temps-ci, vivre n’est pas facile pour nous. »
Préoccupations.
Les organisations antisida, elles, ne voient pas la chose de la même manière. « Des enquêtes nous ont permis de constater que dans certains endroits de Cotonou, depuis que le délestage ciblé bat son plein, les nuits, il se passe bien des choses pas très saines sous le rapport des méthodes de prévention du sida, affirme Achille Métahou d’OSV Jordan, une ONG spécialisée dans le domaine de la santé. « Pas de doute, ajoute-t-il, les gens qui profitent des délestages la nuit pour avoir des rapports sexuels ne respectent pas les règles de base. »
Maxime Akpé, un mécanicien moto, admet que la précipitation qui caractérise ce type de rapports sexuels nocturnes à ciel ouvert, le conduit à négliger les précautions de base. « Parfois j’ai bien le préservatif sur moi, mais dans le feu de l’action, j’oublie, surtout si la jeune femme est pressée de s’en aller. Je pars au plus pressé, admet-il
Bien que la prévalence du HIV au Bénin ait décru significativement ces dernières années – moins de 2% selon les autorités – le taux d’utilisation de préservatif est en baisse : 8,2 millions vendus en 2007 contre 10 millions en trois années plus tôt, selon l’organisation internationale du marché social.
Traduit par Binason Avèkes.
In Irin : BENIN: Power cuts and risky sex
*Identité d’emprunt
Copyright, Blaise APLOGAN, 2008, © Bienvenu sur Babilown
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