Mon idéo va, vourt, vole et tombe sur :
La Grenouille sans tête
Sommé de rendre son tablier : Le directeur de l’Anpe défie Yayi Boni, lit-on dans la presse.
Ce type de défiance n’est pas nouveau. Plus d’un directeur de société ou d’organisme d’Etat s’y est déjà essayé. Un tel fait donne à réfléchir à ceux qui sont soucieux de voir notre pays aller de l’avant. Nous aimons tant à nous comparer aux pays asiatiques qui réussissent ou qui ont réussi. Et nous espérons un jour pouvoir émerger comme eux. Car pensons-nous à bon droit, les hommes étant plus ou moins les mêmes, il n’y a pas de raison que nous n’arrivions à faire ce qu’il ont fait. Surtout si, comme nous aimons à le penser, naguère nous n’étions guère plus pauvres ni moins avancés qu’eux.
Comparaison interculturelle facile, vaste sujet de débat qui mériterait qu’on s’y penche. Mais pour ne considérer que cette affaire de défiance de l’Etat on peut le dire tout net, ce genre de raisonnement est faux, archifaux : il pèche par une grotesque naïveté. En effet, dans aucun de ces pays proto-confucéens, ce genre de refus de respecter une décision hiérarchique n'est concevable ; à plus forte raison lorsque la décision émane du chef du gouvernement. Alors, je vois déjà les esprits bougons qui, rapides comme l’éclair, sont prêts à rétorquer que nous n’avons pas à nous réclamer des valeurs de ces pays. Bien, dans ce cas, pourquoi nous comparer à eux lorsqu’ils réussissent, si nous ne voulons rien entendre aux conditions éthiques qui ont permis leur réussite ? Les Porto-noviens appellent ça « manger la chair de la grenouille et refuser sa tête » Intérêt sélectif…
Soit dit en passant, si le Chef de l’Etat doit user son énergie et son temps pour régler des problèmes puérils de cette nature, quand trouvera-t-il le temps de se pencher sur les grands dossiers dont dépend la décollage du pays ? En fait, le Bénin – sans doute à l'instar de nombre d'autres cas africains – n'est pas un pays. Ce n'est qu'une superficie terrestre, un territoire ou des individus plus ou moins préoccupés de leurs business, de leur sort, chacun à sa façon, se côtoient sans reconnaître l'idée d'une règle commune, d’un ordre, à plus forte raison le bien fondé de la solidarité. Il y a deux catégories de Béninois : ceux qui font leur fortune des circonstances politiques tributaires d'une violence séculaire ; ce sont les soi-disant politiques et assimilés, et toutes les personnes qui bénéficient de leur pouvoir ; et il y a le Béninois adepte du splendide isolement, qui recherche un bonheur et un honneur solitaires qui n'ont de valeur qu'exclusivement attachés à leur seule personne, leur seul nom, sans référence à une collectivité qui, au mieux, n’a qu’un rôle de miroir ...
Entre les deux s'étend la masse stagnante des gens qu’on a du mal à qualifier de Peuple. A moins d’inventer le concept de Peuple négatif, c’est-à-dire d’un Peuple qui s’ignore en tant quel tel.
Eloi Goutchili
Copyright, Blaise APLOGAN, 2007
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