Mon idéo va, court, vole et tombe sur ... :
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La si vile frénésie du babillage
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A Paris, les Noirs – la chose saute aux yeux – sont champion de la pendaison au téléphone portable. Au début du portable, les usagers, toutes origines ethniques confondues se sont jetés sur la chose avec frénésie ; qui pour faire son numéro de communicant ; qui pour jouer les snobs à la mode ; qui pour prendre plaisir à essayer la chose, et à vibrer au rythme de la technologie nouvelle. Les Noirs étaient déjà sur le starting-block. Mais très vite les Blancs et assimilés se sont lassés de la chose et s’en sont tenus à un usage modéré. Les Noirs n’entendirent pas la chose de cette oreille. Leur frénésie du téléphone portable est allée en s’amplifiant.
Déjà maîtres à utiliser les baladeurs, dont beaucoup n’étaient pas peu fiers qu’on les considérât comme leur chose naturelle, c’est avec un naturel pour le moins déconcertant qu’ils annexèrent ce nouveau gadget à la panoplie de leurs jouets sociaux.
Mais il faut dire qu’on les y a aidés un peu.
Une certaine publicité subtile et raciste sur les bords n’avait-elle pas tôt fait de parier sur l’engouement du Noir pour ces objets dérisoires ? Elle exploitait des réalités sociologiques indéniables. Beaucoup de Noirs sont mal logés ou sans domicile fixe ; de ce fait jusque là, ils n’avaient pas accès au téléphone fixe. Or le portable fait sauter ce verrou et donne à ces précaires l’occasion d’un pied-à-terre téléphonique !
Evidemment le système qui maintient le Noir dans le noir sait le moment venu en faire une exploitation rentable. On a spéculé sur l’engouement du Noir pour les jouets sociaux dérisoires avec lesquels il essaie désespérément de se valoriser. De même on a retenu les leçons de certains « penseurs Noirs ». Comme l’idée farfelue du néo-tirailleur Senghor qui fait de l’émotion l’apanage du Nègre par opposition à la Raison qui serait hellène. Or parler relève du domaine de la spontanéité, donc de l’émotion alors qu’écrire relève de la réflexion, donc de la Raison. Enfin , l’idée de Hampâté Bâ qui met l’accent sur la Civilisation de la parole (Un vieillard qui meurt…) a été mise à contribution. Avec toutes ces manipulations, le Noir est perçu et se perçoit comme celui à qui échoit le Ministère de la parole ; celui pour qui la parole est valeur. Car à l’ère de l’hypocrisie de la mise en valeur des différences on n’a pas peur de montrer le Noir comme relevant d’une Civilisation de la parole (par opposition à la Civilisation de l’écrit et de la Raison)
Mais les Noirs sont tombés dans le panneau. Sans crier gare, on est passé de la Civilisation de la parole à la sous-culture du babillage !
Et cette si vile frénésie a de beaux jours devant elle.
Eloi Goutchili.
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Copyright Blaise APLOGAN, 2007
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