Mon Idéo va, court, vole et tombe sur ...:
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Les qualités de Kérékou, les défauts de Yayi Boni.
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Sous Mathieu Kérékou, on n’avait jamais organisé d’élection à contretemps ; la tenue à bonne date des dernières élections présidentielles qui ont porté Yayi Boni au pouvoir en dépit des soupçons de mauvaise volonté qui visaient le pouvoir d’alors, en est le bel exemple. Les premières élections de l’ère Yayi Boni ne seront pas tenues à bonne date ; et si l’on voit les joutes infantiles que se livrent le Président de la Cena et les membres de cette institution, on est en droit de se demander si les élections législatives se feront dans des conditions dignes d’un pays qui se veut modèle de démocratie en Afrique.
On peut aussi remarquer que sous le Président Mathieu Kérékou des journalistes ne sont pas allés en prison en raison de ce qu’ils ont écrit en bien ou en mal en violation ou dans le respect des règles de déontologie de leur métier. Sous le Président Yayi Boni, hasard ou pas, force est de constater que la chose s’est produite plus d’une fois, en dépit des protestations du pouvoir de n’y être pour rien. De même le Gouvernement pourra arguer de l’autonomie de la Cena et de sa seule responsabilité dans le retard qu’elle a pris. Mais les faits sont là : les premières élections de l’ère du changement n’auront pas lieu à bonne date.
Récemment encore on a vu, dans leur acharnement fébrile à faire flèche de tout bois, des hérauts assermentés du changement qui, n’hésitant pas à abaisser la crédibilité de l’Etat et son image, ont, avec une puérile désinvolture, transmué un incident qui, selon toute vraisemblance, relève du fait divers en une affaire de sécurité d’Etat mettant prétendument la vie du Chef de l’Etat en danger. L’affaire a fait le tour du monde des médias, affectant à coup sûr la crédibilité et l’image du pays. Mais les autorités compétentes n’ont pas cru devoir crier haro sur le baudet. Au lieu de tirer formellement les conséquences qui s’imposent de ce qui, quelles que soient les conclusions d’éventuelles enquêtes en cours, trahit bel et bien un fonctionnement défectueux de ses services, le pouvoir a préféré entretenir un silence pudique sur l’affaire, comme si de rien n’était.
Sous Kérékou, les choses ne se passaient pas ainsi. Ni les services secrets, ni les conseillers n’utilisaient la sécurité du Chef de l’Etat à des fins de victimisation de son image. Ces trois exemples prouvent si besoin en est qu’il y a bien changement dans notre pays... Peut-être s’agit-il d’erreurs de débutants. En vertu de la théorie des erreurs et rectifications, le nouveau pouvoir apprend peut-être son métier ; dans ce cas, il avoue au passage son inexpérience a priori. En cette période électorale, cela fait penser que la volonté de substituer intégralement des nouveaux assurément inexpérimentés à ceux qui ont blanchi sous le harnais politique n’est pas forcément rentable. Le coût des erreurs sinon des errances est à prendre en compte.
Ce sont là des pistes de réflexion pour définir un Changement digne de ce nom ; un changement qui ne soit pas seulement un mot ; un changement qui ne génère pas des maux.
Ce n’est pas un vain mot d’avoir changé Kérékou par Yayi Boni. La source de tous nos maux, ce n’est pas non plus d’avoir substitué l’ère de la volonté de bonne gouvernance à l’ère du laisser faire et de la corruption généralisée. Tout Béninois honnête en convient, le pays, pour lors, n’y a pas perdu au change. A condition toutefois que le temps de grâce où les erreurs et errances du gouvernement sont considérées comme une exception à la règle du changement ne soit pas indéfini. Car pour l’instant, à n’en juger que par les trois cas cités ci-dessus, tout se passe comme si les qualités de Mathieu Kérékou sont les défauts de Yayi Boni.
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Eloi Goutchili
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Copyright, Blaise APLOGAN, 2007
Voici un courriel que j’ai adressé récemment à un compatriote qui s’interrogeait sur le tract diffusé sur internet par un parti politique du pays dans lequel certaines insuffisances, erreurs et errances du régime ont été étalées.
Cher …,
J'ai bien peur que tu te trompes de sujet.
Nous sommes en campagne et à la veille d'une élection où quelque 2158 candidats dont 66 anciens députés et 28 maires postulent pour les 83 sièges du parlement béninois. Cette élection voit la participation de 26 formations politiques et alliances de partis.
Il ne s'agit pas de propos hors contexte. Mieux, si le débat est démocratique, il est normal d'admettre une version et un regard autres que ceux du pouvoir. Cela n'oblige personne à les admettre mais plutôt à les mettre en rapport avec des informations que l'on détient et auxquelles celles-ci doivent être confrontées.
J'imagine que tu as reçu les mails d'autres acteurs de la vie politique, notamment de la FCBE et de la Présidence presque tous les jours. Il est donc intellectuellement sain que le débat contradictoire soit mené sur la place publique et non sous manteau. Il ne s'agit pas d'insinuations anonymes mais d'un débat ouvert qui amène les principaux acteurs sur le terrain à s'expliquer. Il est vrai que nous n'avons pas le privilège d'être là-bas pour pouvoir suivre l'évolution globale des débats.
Justement, l'argument de la mal gouvernance de l'ancien gouvernement interdit de se réduire désormais au silence face à n'importe quel gouvernement et d'attendre la fin des erreurs, parfois irréversibles et le plus souvent douloureuses pour les populations, notamment faibles.
Je ne voudrais rien enlever de ton opinion mais permets que je puisse ne pas en admettre la pertinence alors que des éléments importants doivent attirer notre attention.
Comment comprends-tu :
• que Fagbohoun que je n'apprécie pas du tout dans ses accointances avec les pouvoirs politiques depuis l'affaire de la BCB puisse être en prison alors que pour déposséder l'Etat comme cela a pu l'être c'est qu'il y a des responsabilités de décideurs et dirigeants politiques ? Les trouve-t-on cités dans cette affaire ?
• que la DG de la SBEE enlevée en décembre dernier soit de liste (Liste établie en définitive par le Président Yayi) alors que le ministre de l'économie a annoncé le 27 décembre dernier à la télévision nationale qu'il y a une dette de 68 milliards (SBEE) ?
• que son remplaçant qui était déjà adjoint ait déjà le temps et l'argent nécessaires après sa nomination en décembre dernier pour être également texte de liste (même liste) alors que les populations n'ont jamais autant souffert des affres et la misère du délestage ainsi que l'insécurité que celui-ci engendre dans le pays la nuit ?
• que, au moins deux ministres de Kérékou, soient sur cette même liste alors que les audits qu'on brandit les concernent ?
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• la liste est longue et pour apprécier certaines choses, on n'a pas besoin d'attendre deux, trois ans... A ce rythme, on finira par dire que ce n'est pas la peine de dire quoi que ce soit parce que, dans quelques mois, ce sera le tour de renouveler les conseillers municipaux ...
• Ce qui dévalorise, c'est le type de propagande du genre "attaque du cortège présidentiel" alors que tout indique qu'il s'agit de tout sauf de ce que l'on a voulu nous laisser croire. Crois-tu qu'un investisseur sérieux peut aller dans un pays où même le Président de la République peut être attaqué par des "coupeurs de route" ? As-tu vraiment idée du battage médiatique international de cette affaire ? Moi, c'est du Japon que quelqu'un m'a appelé pour savoir si j'avais plus d'information ou non sur ce qui se passait au pays ?
• On peut exprimer une critique sans être contre quelqu'un et encore moins contre son pays et ses intérêts. Nous avons appris à faire la dissertation, à savoir écrire une thèse en intégrant l'antithèse, nous devons reconnaître et pratiquer avec beaucoup de tolérance l'émergence du débat contradictoire que "vivre ensemble" impose à ceux qui ont ou non accepté les règles.
Permets-moi, enfin, de rappeler que :
• lorsque tout le monde harcelait le candidat PRD afin qu'il se positionne dans l'opposition et qu'il avait dit que, a priori, aucune raison ne lui permet, d'adopter cette posture et qu'il laissera le temps à la nouvelle équipe, dont il appréciera les efforts répondant aux exigences de développement et dont il critiquera les dérives conduisant à des impasses démocratiques et des expérimentations hasardeuses au détriment du bien-être des populations, on le traitait de tous les noms ;
• lorsque Bruno Amoussou a été en finale avec Kérékou en 2001, dans les circonstances que tu sais, personne n'a posé la question à ce dernier de savoir pourquoi il n'est pas allé dans l'opposition !
• lorsque des alliés de première heure comme Candide Azannaï crie, c'est qu'il est conscient qu'il n'est pas dans le désert ;
• lorsque quelqu'un comme Atchodé qui a été le moteur de la formation de la FCBE dit que quelque chose ne tourne pas rond, il n'est pas devenu subitement fou.
Certes, je ne nie nullement ce que nous avons tous fini par identifier comme "béninoiseries" mais reconnais après coup que ce n'est pas le cas dans ce qui fait débat ici.
J'espère que j'ai pu être direct du mieux que je peux pour essayer de continuer avec toi ce débat citoyen, fraternel et amical. On ne peut pas tout dire en une fois !
BAK
Rédigé par : BAK | 25 mars 2007 à 15:44